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La réforme du système d’évaluation s’impose

Le ministère de l’Éducation nationale entend revoir le système d’évaluation en se basant sur les recommandations de l’OCDE qui relèvent plusieurs dysfonctionnements. La réforme sera axée sur plusieurs niveaux : l’élève, l’enseignant, l’établissement scolaire et le système éducatif.

Le Maroc est appelé à développer un cadre d’évaluation cohérent et centré sur l’amélioration des apprentissages des élèves pour améliorer son système éducatif. C’est l’une des recommandations principales de l’organisation de la coopération et du développement économiques dans un récent rapport publié dans le cadre du programme pays Maroc. Le royaume est appelé à renforcer ses capacités en évaluation aussi bien au niveau central que régional au sein des écoles pour que le cadre d’évaluation soit plus effectif. À cela s’ajoute la nécessité d’une meilleure exploitation des données des évaluations pour informer et éclairer les politiques d’éducation et le public en vue d’assurer la cohérence des réformes et fédérer les acteurs autour des objectifs de la vision 2030. En premier lieu, il faut soutenir les élèves dans leur apprentissage. Afin de renforcer le rôle de l’évaluation dans l’amélioration des apprentissages, le Maroc doit développer la capacité des enseignants à mettre en place et exploiter des évaluations formatives alignées avec le curriculum.

La révision du système d’évaluation actuelle permettra d’aider les enseignants à identifier les difficultés d’apprentissage de leurs élèves. Il s’avère aussi nécessaire pour les enseignants de suivre une formation plus approfondie en évaluation en classe dans le cadre de leur formation initiale et de la formation continue. Parmi les difficultés essentielles à résoudre figure celle du décrochage précoce en cycle primaire. Le système éducatif marocain est appelé à limiter le redoublement dans l’enseignement obligatoire, notamment lors des premières années du primaire. Il est aussi recommandé de supprimer l’examen du certificat d’étude primaire et de le remplacer par une évaluation nationale standardisée sans enjeu de passage pour les élèves. L’objectif est de pouvoir mesurer de manière plus juste les acquis des élèves tout en faisant ressortir les informations nécessaires à l’amélioration des pratiques d’enseignement et des politiques nationales. La responsabilité de la réussite ou de l’échec scolaire ne sera plus donc celle de l’enfant mais du système dans sa globalité.

L’OCDE plaide aussi pour un renforcement de la fiabilité des examens certificatifs du brevet et du baccalauréat pour permettre d’évaluer de manière précise les acquis des élèves et de ce fait mieux refléter les compétences attendues par le curricula et celles désirées par le marché du travail. La révision escomptée ne peut réussir sans l’amélioration de l’évaluation des enseignants. Ainsi le Maroc doit mettre en place des normes professionnelles d’enseignement pour ancrer les évaluations et s’assurer qu’elles servent bien l’objectif d’amélioration des pratiques d’enseignement. Conscient de cet enjeu, le ministère de tutelle a d’ailleurs entamé le développement de ces normes. À ce titre, l’OCDE souligne l’importance de créer une évaluation plus efficace fournissant à la fois un accompagnement et une supervision. La concrétisation de cet objectif ne se fera pas du jour au lendemain. On s’attend à ce qu’elle prenne du temps et demande un important investissement en ressource sur le moyen et long termes. Un autre niveau d’évaluation est à prendre en considération, celui des établissements scolaires. Le ministère de l’Éducation nationale gagnerait à renforcer cette pratique naissante dans le cadre du projet d’établissement.

En dépit des mesures lancées au cours des dernières années, il reste encore plusieurs lacunes à dépasser dont les capacités limitées en évaluation aussi bien au niveau des écoles que sur les plans régional et central ainsi que l’absence de normes de qualité claires pour les écoles et une culture de la gestion et de la planification scolaire balbutiante. Les inspecteurs pédagogiques devront être associés à l’évaluation des établissements en prenant en charge la partie évaluation de la qualité de l’enseignement à travers l’observation des pratiques en classes d’enseignement et d’apprentissage. S’ajoute à cela le renforcement des capacités d’auto-évaluation au sein des écoles. Par ailleurs, l’évaluation du système éducatif s’impose. L’OCDE recommande de mettre en place un plan stratégique sur le moyen terme pour clarifier les objectifs de la Vision 2030 et permettre d’orienter l’action de l’ensemble des acteurs pour sa réalisation. Le cadre d’évaluation devrait contenir à la fois un système de gouvernance claire de l’évaluation, le développement d’indicateurs de suivi ainsi que des processus de communication et de dissémination de l’information transparents pour promouvoir la responsabilisation de l’action publique. Le principal objectif est de permettre au Maroc d’améliorer les apprentissages des élèves.


Paulo Santiago
Chef de la division Conseil et mise en œuvre des politiques éducatives à l’OCDE

«Le Maroc a encore des progrès à faire»

Les ÉCO : Quel regard portez-vous sur l’évaluation éducative au Maroc ?  
Paulo Santiago : Le rapport se concentre sur les pratiques d’évaluation éducative qui impactent les apprentissages. On a remarqué une expansion considérable du système ainsi que des progrès permettant de s’assurer que les élèves restent dans l’école. Néanmoins, des efforts restent à faire au niveau des apprentissages qui sont encore décevants. On note aussi un niveau élevé d’abandon scolaire et des situations d’iniquité dans le système qui ne sont pas encore complètement prises en compte. Il faut se baser sur les acquis et utiliser l’évaluation comme levier essentiel pour soutenir les élèves qui en ont besoin le plus, notamment les élèves défavorisés qui sont souvent ceux qui sont en difficultés d’apprentissage. L’idée principale du rapport est de faire en sorte que les pratiques d’évaluation changent l’apprentissage dans l’école et permettent de soutenir tous les acteurs dont les élèves en difficulté. Il faut rééquilibrer les fonctions de l’évaluation dans le système éducatif marocain qui est encore basé sur un résultat et une note. L’idée est que les différents acteurs (les enseignants, les écoles et les autorités éducatives) se responsabilisent. Cela implique aussi l’ouverture des résultats de l’apprentissage à la société en générale pour participer dans l’évaluation.

Les notes reflètent-elles le niveau réel des élèves ?
Il faut s’assurer non seulement que les examens captent tous les objectifs de l’apprentissage mais aussi assurent la justice des résultats en garantissant une évaluation uniforme d’une école à une autre et d’un enseignant à un autre. Le problème le plus grave au Maroc est le décrochage scolaire. Il faut se concentrer sur cette problématique et apporter des moyens et des ressources pour permettre à tous les élèves de rester dans le système.

Le Maroc doit-il augmenter les investissements dans le secteur de l’enseignement pour atteindre les objectifs tracés ?
La comparaison avec d’autres pays similaires fait ressortir que les dépenses au Maroc dépassent la moyenne. Il faut dire que pour atteindre les objectifs escomptés, il ne s’agit pas du niveau de la dépense mais de la manière dont on dépense. Il faut plutôt lancer la réflexion sur la manière d’affecter les ressources et s’assurer de cibler les jeunes les plus défavorisés. C’est d’ailleurs ce que font d’autres pays.


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