Maroc

Impôts : le Maroc s’installe dans la “transition fiscale”

C’est un signe qui ne trompe pas. Les discussions autour du Projet de loi de finances portent de moins en moins sur le poids de l’impôt, du côté des opérateurs économiques. La préoccupation centrale du patronat (CGEM) concerne désormais la lutte contre l’informel et une meilleure répartition de la charge de l’impôt. Même avec une pression fiscale (calculée en 2022) de 29,9% du PIB, et de 27,23% non compris les prélèvements de sécurité sociale, le Maroc est juste derrière la Tunisie qui affiche un taux de 33,5%, selon l’édition 2024 de l’étude sur les recettes fiscales.

La pression fiscale du Maroc – un indicateur qui renseigne aussi sur la qualité du recouvrement de l’impôt – est à 13 points au-dessus de la moyenne des 36 pays de l’échantillon, située à 16%. Ce ratio a augmenté de 0,5 point en une année.

Bien sûr que les TPE marocaines rêveraient d’être exemptées de l’IS comme au Nigéria, où les entreprises qui réalisent moins de 600.000 dirhams de revenu sont hors champ de l’impôt sur le résultat. Mais dans le contexte marocain, cela coûterait trop cher au Trésor car plus de quatre sociétés sur cinq inscrites dans le fichier de l’IS dégagent en moyenne, moins de 3 MDH de chiffre d’affaires par an.

Par ailleurs, à la différence de la plupart des pays objet de l’étude, le Maroc a entamé sa transition fiscale, qui correspond à une situation où les impôts directs supplantent la fiscalité de porte (les droits de douane) pour devenir le pilier du système d’imposition.

Les impôts directs en pole position
L’exercice fiscal (2024) qui s’achèvera dans quelques semaines, confirme l’ancrage du Royaume dans la transition fiscale. Avec 117 milliards de dirhams attendus, les impôts directs devraient rapporter largement plus que la fiscalité de porte (droits de douane).

À l’instar de ce qui est relevé au Maroc, l’augmentation des recettes de l’IS dans les 36 pays africains explique largement l’accroissement des recettes fiscales, en hausse de 0,4 point en moyenne, à la faveur du boom des bénéfices du secteur pétrolier et gazier.

Dans la catégorie des impôts sur les biens et services, les recettes tirées de la TVA et des droits à l’importation ont augmenté en 2022, de 0,1 point en pourcentage du PIB tandis que celles de l’impôt sur le revenu des personnes physiques et les cotisations de sécurité sociale sont restées inchangées. Les niveaux de la pression fiscale sont assez disparates selon les pays, allant de 7,9% au Nigéria à 33,5% en Tunisie.

Le niveau moyen des recettes fiscales rapporté au PIB en Afrique reste inférieur aux niveaux des Caraïbes, par exemple (21,5%). La moyenne africaine est 18 points en dessous de pays de l’OCDE (34%). La pression fiscale enregistre de grandes différences d’un pays africain à l’autre, allant de 2,6% en Somalie à 33,5% en Tunisie ; 19 des 36 pays présentaient un ratio inférieur à 15%.

Les recettes fiscales en pourcentage du PIB ont augmenté dans 23 pays et diminué dans 11 pays. Elles sont restées inchangées dans 2 pays entre 2021 et 2022. Le niveau du ratio impôts/PIB moyen, plutôt bas, affiché par beaucoup de pays, n’est pas en soi un quelconque indice de compétitivité. Il reflète surtout la faible capacité à lever l’impôt et le peu de marge de manœuvre de certains gouvernements à investir dans des secteurs cruciaux tels que la santé, l’éducation et les infrastructures.

La TVA, un grand malade
En 2022, les recettes de TVA ont généré le gros des rentrées d’impôts dans les pays couverts par l’étude, représentant en moyenne 27% des recettes fiscales. Mais cette croissance ne renseigne pas sur les pertes dues à l’importance du secteur informel.

Pour se faire une idée précise, il faut décrypter le ratio des recettes de TVA, le fameux «RRT» qui mesure l’écart entre les recettes de TVA effectivement collectées et celles qui auraient théoriquement pu être obtenues dans l’hypothèse où l’on aurait appliqué le taux normal de la TVA à la totalité de la base d’imposition potentielle.

Ce ratio correspond au rapport entre les recettes de TVA effectives et le produit de la consommation finale (net des recettes de TVA) et du taux normal de TVA. Cet indicateur donne un aperçu sur la part des recettes de TVA non recouvrées sous l’effet des niches, des taux réduits, des pratiques de fraude et d’optimisation fiscale, ainsi que des défaillances de l’administration fiscale.

Néanmoins, cet indicateur doit être interprété avec prudence en se référant aux caractéristiques fondamentales du système de TVA propre à chaque pays, car un RRT élevé peut résulter d’effets de cascade ou du non-remboursement de la TVA acquittée sur les intrants. D’autres facteurs peuvent gonfler le ratio, par exemple lorsque les règles relatives au lieu d’imposition des ventes internationales dérogent au principe de destination.

Les 36 pays de l’échantillon de l’étude

Afrique du Sud, Botswana, Burkina Faso, Cabo Verde, Cameroun, Côte d’Ivoire, Gabon, Guinée, Guinée équatoriale, Égypte, Eswatini, Ghana, Kenya, Lesotho, Madagascar, Malawi, Mali, Maroc, Maurice, Mauritanie, Mozambique, Namibie, Niger, Nigeria, Ouganda, République démocratique du Congo, République du Congo, Rwanda, Sénégal, Seychelles, Sierra Leone, Somalie, Tchad, Togo, Tunisie et Zambie. Le Mozambique, la Somalie et la Zambie sont inclus pour la première fois dans cette édition des «Statistiques de recettes fiscales en Afrique».

Abashi Shamamba / Les Inspirations ÉCO



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