Gérald Darmanin au Maroc : coulisses d’une visite express
Initialement prévu pour 48h les 15 et 16 octobre, le déplacement au Maroc du ministre français de l’Intérieur n’aura duré que le temps d’une rose. Malgré cela, la visite de Gérald Darmanin a été très studieuse.
La visite de Gérald Darmanin au Maroc ne s’est pas déroulée comme prévu. En déplacement dans le royaume pour sa toute première sortie officielle en dehors des frontières de la zone euro, depuis sa nomination au sein du nouveau gouvernement de Macron dirigé par Jean Castex, le ministre français de l’Intérieur a cependant regagné son pays en urgence vendredi après-midi. Un peu plus tôt dans la journée, un professeur d’histoire-géographie qui avait montré à ses élèves des caricatures de Mahomet (PSL) a été décapité en région parisienne par un jeune musulman d’origine russe. «Un attentat terroriste islamiste caractérisé», selon les mots d’Emmanuel Macron. Il s’agit de la 5e attaque du genre sur le territoire français depuis le début de l’année. Darmanin se devait donc de mettre un terme à sa visite de 48h au Maroc. Cependant, il ne rentrera pas bredouille à Paris. Durant son court séjour, le ministre français s’est entretenu avec quelques hauts responsables marocains. Il a notamment rencontré son homologue Abdelouafi Laftit et le chef de la diplomatie marocaine Nasser Bourita. Outre la coopération économique entre les deux pays, trois sujets ont été mis en avant dans les discussions à savoir la lutte contre le terrorisme, l’immigration clandestine, notamment celle des mineurs isolés, et le trafic de drogue.
Drogue, terrorisme, immigration…
Si le trafic de stupéfiants à destination des pays européens depuis le Maroc a fait l’objet d’une grande attention lors des entretiens, le terrorisme et l’immigration dans l’hexagone ont été au cœur des débats, au moment où un projet de loi sur les séparatismes, longtemps en préparation, est en passe de devenir une réalité en France. Un projet que le pays compte concrétiser «en lien tout particulier avec le Maroc, avec qui nous avons des relations séculaires, amicales et qui sont fondées sur le respect et la confiance», a insisté Darmanin vendredi à l’issue d’un tête-à-tête avec Laftit. Dans le fond, il était question de discuter de l’organisation du culte musulman en France et du recrutement des imams, thèmes d’ailleurs inscrits dans ledit projet de loi destiné à contrer l’islam politique dans ce pays. Devant la propagation «d’un discours extrémiste et dangereux», la France est bien décidée à former ses propres imams. Lors d’un récent face-à-face avec la presse hexagonale, l’actuel locataire de l’Elysée a affirmé : «Nous savons d’où viennent les financements. Ils sont venus très régulièrement d’Arabie saoudite, du Qatar, de Turquie, et sont venus plus marginalement du Maroc et d’Algérie», a déclaré le chef de l’État français. À ce sujet brûlant s’ajoute la lancinante question des mineurs marocains isolés en France, souvent considérés comme une sérieuse source de problèmes. Lorsque les migrants «sont majeurs, nous avons convenu qu’il était normal de continuer, malgré la crise du Covid, à ce qu’ils reviennent sur le territoire marocain, et lorsqu’ils sont mineurs, de continuer à (les) protéger et pouvoir les ramener quand on le peut, auprès de leur famille au Maroc ou dans des centres éducatifs marocains», a laissé entendre l’hôte français. À ce propos, le Maroc et la France sont déterminés à renforcer leur coopération sécuritaire, notamment à travers l’échange de renseignements et d’expertises et la consolidation du cadre juridique régissant leur coopération dans ce domaine, ont affirmé les deux parties.
Davantage de synergies
Il faut noter qu’en dehors de ces sujets, les deux pays plaident pour davantage de synergies entre leurs entreprises, notamment les TPE-PME. C’est d’ailleurs tout le sens de la récente visite, à Casablanca, de Franck Riester, ministre délégué auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères. «Nous devons aussi aller plus loin dans ce contexte de crise mondiale où la coopération est fondamentale pour faire face ensemble aux défis mondiaux existants et émergents, comme celui des opérateurs européens et plus particulièrement français qui cherchent aujourd’hui à raccourcir leurs chaînes d’approvisionnement», a notamment plaidé, devant le patronat, le chargé du Commerce extérieur et de l’attractivité qui était ainsi venu baliser le terrain à Darmanin.
Khadim Mbaye / Les Inspirations Éco