Maroc

Finance : la convention anticorruption franchit un nouveau cap

Signée en 2019, la Convention de coopération anticorruption dans le secteur financier fait, aujourd’hui, l’objet d’une évaluation, six ans après son entrée en vigueur. Réunis pour leur cinquième session annuelle, ses signataires actent le renforcement des dispositifs internes et annoncent une révision prochaine de ses modalités d’application.

Depuis six ans, la Convention de coopération dans le domaine de la prévention et de la lutte contre la corruption dans le secteur financier s’est imposée comme une trame de fond pour les autorités de régulation. En réunissant autour de la même table l’Instance nationale de la probité (INPPLC), Bank Al-Maghrib, l’AMMC et l’ACAPS, le texte avait pour ambition d’amorcer une dynamique sectorielle.

Cette cinquième réunion annuelle, tenue à Rabat, marque une étape importante dans cette trajectoire, puisqu’elle entérine la feuille de route 2025-2026 tout en esquissant une réévaluation du cadre conventionnel. Il faut dire que l’enjeu dépasse la seule mise en conformité. Il s’agit, d’abord, de consolider les capacités internes par la formation, pierre angulaire de la stratégie engagée.

À ce jour, plus de 1.600 cadres ont été sensibilisés aux mécanismes de prévention de la corruption au fil de séminaires et d’ateliers portant, notamment, sur la gestion des conflits d’intérêts ou les politiques de «cadeaux».

Dans les faits, cette montée en puissance s’est appuyée sur plusieurs leviers. D’une part, la collaboration avec la Fondation marocaine pour l’éducation financière a permis d’ancrer les principes d’intégrité au niveau de la formation initiale. D’autre part, le développement de cartographies sectorielles des risques amorce un changement d’échelle dans l’approche.

À l’image de ce qui a été lancé dans le secteur bancaire, des plans d’action seront bientôt déployés dans l’assurance et les marchés de capitaux. Cette approche par «secteur» constitue une évolution notable. Elle repose sur le principe que «chaque activité financière possède sa propre topographie des risques», comme un acteur proche du dossier.

Lisser les écarts de maturité entre institutions
Si le secteur bancaire a jusqu’ici fait figure de pilote, c’est aussi parce qu’il bénéficie d’un encadrement prudentiel plus avancé. L’un des enjeux, désormais, consiste à harmoniser les niveaux d’avancement, tout en laissant à chaque régulateur la liberté d’adapter ses méthodes. Ce point a notamment été abordé lors du séminaire sur la gestion des risques de corruption, qui a réuni plus de 80 participants du monde bancaire, assurantiel et des marchés de capitaux.

«Ce type d’espace de dialogue permet de lisser les écarts de maturité entre institutions et d’identifier les chantiers prioritaires», rappelle le communiqué issu des différentes parties prenantes.

En parallèle, le projet d’évaluation des risques dans le secteur des assurances, mené avec l’appui d’experts onusiens, entre dans sa phase finale. Un exercice similaire est amorcé dans les marchés de capitaux, avec des livrables attendus d’ici fin 2026. Cette approche évaluative, appuyée sur des standards internationaux, vise à doter les régulateurs d’une boussole commune.

Au-delà des outils, la convention entame un tournant structurel. Pour la première fois, ses signataires envisagent une révision de ses modalités d’application. Ce processus d’autoévaluation devrait permettre d’actualiser le dispositif en fonction des réalités opérationnelles et des nouveaux défis, tels que les risques liés à la digitalisation ou aux nouvelles formes d’intermédiation.

«Les quatre institutions ont réaffirmé leur engagement à poursuivre et à renforcer cette dynamique de coopération interinstitutionnelle», précise encore le communiqué, sans entrer dans les détails du futur cadre.

À moyen terme, plusieurs éléments pourraient peser dans la balance. La pression internationale en matière de conformité, l’activation de mécanismes de redevabilité plus transparents, mais aussi la généralisation d’indicateurs de performance dans la lutte anticorruption.

En interne, les régulateurs envisagent d’affiner leurs dispositifs en croisant davantage les données, en partageant leurs retours d’expérience et en consolidant les dispositifs d’alerte. Si la convention reste encore cantonnée à un cercle d’acteurs spécialisés, son impact pourrait s’élargir. C’est d’ailleurs tout l’objet de l’autoévaluation annoncée.

À l’heure où les standards internationaux évoluent – notamment avec l’intégration des critères ESG dans les obligations de conformité – les signataires entendent adapter les termes de la Convention aux nouveaux enjeux du secteur. En élargissant les périmètres de coopération, ils espèrent créer un effet d’entraînement dans d’autres secteurs régulés. Si la démarche demeure progressive, elle pourrait à terme inspirer des dispositifs similaires dans les télécoms, la santé ou les marchés publics.

Ayoub Ibnoulfassih / Les Inspirations ÉCO



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