Et demain ? un horizon mondial sous le signe du développement

À cinq ans de la Coupe du monde 2030, le Maroc se prépare à vivre une transformation historique. Au-delà du simple événement sportif, le Royaume mise sur une stratégie ambitieuse : faire du Mondial un catalyseur de modernisation, d’intégration territoriale et de rayonnement international. Entre stades géants, infrastructures modernisées et gouvernance innovante, le pays entend franchir un cap décisif pour s’affirmer comme une puissance émergente sur la scène mondiale.
Le 10 juillet 2025 restera comme une date charnière dans l’histoire moderne du Maroc. Réuni sous la présidence d’Aziz Akhannouch, le Conseil de gouvernement a approuvé la création de la Fondation «Maroc 2030», une structure qui cristallise une ambition, celle de faire de la Coupe du monde 2030 un levier de transformation nationale. Derrière ce projet de loi, on retrouve les orientations royales édictées dès décembre 2024 : réussir le Mondial, et surtout en faire un tremplin durable.
Annoncée par Fouzi Lekjaa, président de la FRMF et ministre délégué chargé du Budget, la Fondation «Maroc 2030» n’est pas une simple énième structure technocratique. Son rôle est d’être l’architecte discret mais déterminant de l’ambition mondiale du Royaume.
Accélérer est le maître mot… Accélérer les chantiers, les synergies, les livraisons. Avec une approche participative, la Fondation réunit administrations, collectivités, secteur privé, société civile, diaspora et même compétences africaines. La finalité n’est autre que de livrer des projets complexes (stades, transports, hébergements, réseaux) sans les blocages habituels de l’administration classique. La vision dépasse le cadre des seules villes hôtes. Les bénéfices du Mondial doivent irriguer tout le territoire, urbain comme rural. Car le Roi Mohammed VI ne voit pas le sport comme une fin en soi, mais comme un moteur de développement global assurant cohésion sociale et rayonnement stratégique.
Des chantiers titanesques
Pour tenir ses promesses, le Maroc a engagé des transformations d’une ampleur inédite. Le Grand Stade Hassan II de Benslimane en est le symbole. Avec 115.000 places et un budget de 5 milliards de dirhams (MMDH), il sera le plus grand du monde, «un lieu de communion planétaire» inspiré du moussem marocain et de la tente traditionnelle.
Conçu comme une arène multifonctionnelle, il devrait accueillir non seulement la finale du Mondial, mais aussi des concerts et peut-être, un jour, les Jeux olympiques. Ce serait une première pour l’Afrique. Autour de cette icône architecturale, tout un écosystème d’infrastructures se met en place. Le ministre de l’Équipement, Nizar Baraka, a présenté un plan de modernisation du réseau routier avec triplement d’axes autoroutiers stratégiques (Casablanca-Berrechid, contournement de Casablanca), nouvelle autoroute Rabat-Casablanca de 59 km reliant directement la métropole au stade de Benslimane.
Dans le même esprit, le réseau ferroviaire s’étend : 87 MMDH pour prolonger la LGV de Kénitra à Marrakech et créer un RER dans les régions de Casablanca, Rabat et Marrakech. L’expansion se poursuit dans les airs : l’Office national des aéroports injecte 12,3 MMDH pour moderniser les plateformes de Casablanca, Rabat, Marrakech et d’autres.
En parallèle, Royal Air Maroc prévoit de quadrupler sa flotte à 200 avions d’ici 2035 pour asseoir Casablanca comme hub continental. L’enjeu n’est pas seulement sportif ou logistique. La Coupe du monde agit comme un catalyseur urbanistique : réhabilitation de 30 villes, quasi-disparition des bidonvilles, généralisation des hôpitaux universitaires, théâtres, bibliothèques.
La régionalisation avancée stimule une émulation positive entre villes, et l’exode rural doit être endigué grâce à des projets incluant zones rurales et périurbaines. Des opérations audacieuses de relogement ont déjà permis d’assainir des quartiers insalubres. Mais l’ambition est plus large. Former le citoyen de demain, responsable et engagé. Le respect naît d’infrastructures de qualité, des bus modernes et propres suscitent l’adhésion, à l’inverse des équipements vétustes livrés au vandalisme.
Un impact à 10 milliards de dollars
L’impact économique attendu du Mondial se chiffre entre 8 et 10 milliards de dollars. Comme pour le Qatar en 2022, le retour sur investissement viendra des droits TV, du tourisme, des recettes publicitaires, de l’hôtellerie et des services. L’organisation du Mondial catalyse aussi le déploiement de la 5G (70% de couverture d’ici 2030), plus de 2 millions de touristes supplémentaires sont attendus pour le seul événement du Mondial, et de nombreux emplois directs et indirects seront créés.
Le plus grand risque serait de tout miser sur l’événementiel sans capitaliser sur l’après. Le Maroc veut éviter ce piège. La Fondation «Maroc 2030» prépare déjà la CAN 2025, mais surtout l’inscription de ces acquis dans un projet de développement durable : mobilité, intégration régionale, développement humain et attractivité touristique prolongée. Les douze Cités des métiers et des compétences témoignent de cette ambition. Former les compétences pour faire durer la dynamique au-delà de 2030.
Dans six ans, Tanger, Rabat, Casablanca, Marrakech Fès et Agadir devront être prêtes. Routes fluides, aéroports modernes, stades au standard mondial… Mais au-delà des infrastructures, c’est un pacte collectif qui se dessine, celui de faire du sport un levier de fierté nationale, d’intégration et d’ouverture.
Pour la première fois, le Maroc ne vise pas seulement un exploit sportif, mais un changement de modèle. Un pays africain qui s’affirme parmi les grands grâce à une gouvernance agile et un projet commun. Reste à transformer l’essai pour éviter que l’après-Mondial ne ressemble à un ballon dégonflé. La Fondation «Maroc 2030» portera cette promesse : que les stades, routes et trains ne soient pas seulement des vitrines de circonstance, mais les fondations d’un Maroc nouveau, à la hauteur de ses rêves mondiaux.
Ilyas Bellarbi / Les Inspirations ÉCO