Climat des affaires : le plaidoyer du patronat
S’exprimant lors de la 12e réunion annuelle du Comité national de l’environnement des affaires, qui a vu l’adoption de la politique nationale de l’environnement des affaires 2021-2025, le patron des patrons a appelé à accélérer la cadence des réformes sur ce qu’il a dénommé les défis fondamentaux et les chantiers prioritaires. Décryptage…
Le président de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), Chakib Alj, appelle à une mise en œuvre rapide de la politique nationale de l’environnement des affaires. S’exprimant lors de la 12e réunion annuelle du Comité national de l’environnement des affaires (CNEA), marquée par l’adoption de cette feuille de route pour la période 2021-2025, le patron des patrons a notamment déclaré : « maintenant que nos priorités sont définies, accélérons la cadence de mise en œuvre. Notre pays dispose d’innombrables acquis qui le rendent très attractif en matière d’investissement. Ces acquis doivent être consolidés rapidement par des réformes». Insistant sur le fait que cette période post-Covid est le bon timing, Alj a ensuite expliqué que « les chaînes de valeur mondiales sont actuellement en train d’être redéfinies et le Maroc ne doit pas rater ce tournant décisif pour se positionner ». En effet, même si la BERD a déjà approché le royaume, en y organisant, en partenariat avec la CGEM et la Bourse de Casablanca, 9 workshops destinés à repositionner le Maroc dans les chaînes de valeur industrielles post-covid 19 en Europe, la partie ne peut être vraiment gagnée qu’avec des réformes favorisant la compétitivité de l’entreprise marocaine. «Pour investir, un chef d’entreprise a besoin de se sentir soutenu et en confiance», a indiqué le président de la CGEM, ajoutant que l’investisseur a aussi besoin d’un cadre légal et réglementaire clair, attractif et favorable à l’innovation, d’un guichet unique efficient, d’un capital humain formé, d’infrastructures et de services de base de qualité et d’un accès simplifié au financement. Saluant les avancées enregistrées par le CNEA depuis sa création en 2010, Alj l’a, toutefois, appelé à redoubler d’effort et adopter un rythme plus soutenu, afin de positionner le royaume comme un hub d’investissement de référence, régional, continental et international.
Le foncier et l’énergie, des défis fondamentaux
Pour commencer, le patron des patrons a mis l’accent sur la nécessité d’agir rapidement sur ce qu’il a dénommé les défis fondamentaux et les chantiers prioritaires. Comme défis fondamentaux, il a notamment pointé les coûts des facteurs de production qui méritent d’être améliorés, en particulier, le foncier et l’énergie, à travers la mise en place de plateformes de location à proximité des pôles économiques et l’accélération de l’adoption de la Loi sur l’autoproduction. En effet, si les efforts consentis par les pouvoirs publics sur le foncier sont aujourd’hui perceptibles par les investisseurs dans les quatre coins du Maroc, il n’en est rien dans l’énergie où tout le monde est suspendu à l’entrée en vigueur de la loi 13-09. L’autoproduction d’électricité à partir de sources renouvelables (solaire, éolien…) prend beaucoup de temps à entrer en vigueur. En début 2019, le ministre de l’énergie, des mines et du développement durable déclarait que « ce serait l’année de la 13-09 ». En 2021, on attend encore ! L’attente est tellement longue que certains investisseurs qui y croyaient ont préféré plier bagage pour d’autres cieux plus disposés. Comme chantiers prioritaires, le président de la CGEM a ensuite cité, en premier, la législation du travail où il réclame un assouplissement, à travers l’adaptation du code du travail aux réalités du marché, notamment en établissant une flexibilité responsable visant à encourager les entreprises à créer de l’emploi de qualité.
Le financement, l’innovation et la technologie, des chantiers prioritaires
S’en est suivi la question du financement où le patron de la CGEM a appelé à davantage d’innovation en favorisant la mise en place de nouveaux leviers comme les dettes mezzanines, les fonds de soutien ou encore des prises de participation, à travers le marché des capitaux, et en accélérant la mise en place des circulaires d’application de la loi relative au crowdfunding (Financement collaboratif). Ceci, en plus de l’innovation et la technologie qu’il trouve encore très coûteuses au Maroc, tout en rappelant sur ce plan que la CGEM a toujours recommandé la mise en place d’un cadre juridique et fiscal incitatif et l’amélioration des mécanismes d’aide au financement de l’innovation, qui demeurent très faibles dans le pays. Alj s’est également arrêté sur la commande publique où l’Etat doit mieux faire. Selon lui, la commande publique doit jouer son rôle de levier stratégique de développement économique et social au Maroc. Pour ce faire, il faudra renforcer la visibilité sur les marchés publics et avoir une démarche plus inclusive des TPME, notamment en région, et qui favorise la préférence nationale qui doit concerner tous les Établissements et entreprises publics (EEP) et doit être généralisée à tous les marchés, que ce soit en matière de fournitures, de travaux, ou de services». Rappelons que la politique nationale de l’environnement des affaires comprend un total de 33 chantiers de réforme relatifs à la simplification des procédures administratives, à l’amélioration du cadre juridique et réglementaire des affaires, aux délais de paiement et à l’accès au financement, à l’infrastructure et à la commande publique, à la qualification du capital humain, au renforcement des mécanismes d’accompagnement des entreprises et à l’intégration du secteur informel.
Back To Business
Neuf workshops se sont déroulés jusqu’à fin décembre dernier au Maroc. C’était l’occasion pour la BERD, via son initiative «Back To Business» , d’aller à la rencontre des industriels marocains pour leur montrer les opportunités de business qui se profilent sur le marché des 26 pays de l’UE suite aux mouvements de relocalisation envisagés. Il était aussi question de leur donner les moyens techniques et financiers pour saisir ces opportunités. Par exemple, rien qu’en France, principal partenaire commercial du Maroc dans l’UE, les mouvements de relocalisation ont été estimés par une étude à 115 milliards d’euros (environ 1265 MMDH), soit plus de 30% des exportations de l’Hexagone (382 milliards d’euros). Selon la même étude, ces mouvements touchent plusieurs secteurs comme la chimie-parachimie, l’automobile, l’aéronautique, l’agro-industrie, etc… Des secteurs où le Maroc a une sérieuse carte de compétitivité à jouer, à condition d’accélérer les réformes pour améliorer la compétitivité de l’entreprise marocaine.
Aziz Diouf / Les Inspirations Éco