Appel à la grève le 26 février
La prison vous guette !
Abus de confiance, c’est la question qui taraude le plus la communauté des intermédiaires, surtout depuis l’entrée en vigueur (avril 2016) de la nouvelle circulaire de l’Acaps relative à l’encaissement des primes d’assurance. La prime désormais considérée comme encaissée dès l’octroi de l’attestation aux assurés, l’application de la circulaire devrait naturellement se traduire par une suppression des facilités de paiement historiquement accordées à la clientèle (règlement fractionné via des chèques, etc.). À défaut de reverser les primes aux compagnies dans les délais impartis (avant le 15 de chaque mois), les courtiers et agents tombent automatiquement sous le coup du Code pénal (voir article 547) et risquent ainsi la prison. «Nous sommes tous en liberté provisoire», ironise Bounoual, en rappelant qu’en marge de la promulgation de ladite circulaire, près de 90% des intermédiaires avaient signé un protocole dans lequel ils reconnaissent avoir encaissé une part des primes à reverser aux compagnies, laquelle reconnaissance est aujourd’hui qualifiée d’abus de confiance par les compagnies, à en croire l’Umac. Les intermédiaires se sentent ainsi «lésés, victimes d’un rapport de force qui penche en faveur des compagnies d’assurances».
Invité à apporter un éclairage juridique sur cette notion d’abus de confiance, l’Ex-bâtonnier, Abdelkbir Tabih, reconnaît le caractère injuste de cette sanction destinée aux crimes à effet nuisible et qui, à ses yeux, ne correspond pas à la nature de l’activité des intermédiaires, eu égard au rôle qui leur est dévolu en matière de collecte de primes et d’impôts au profit des compagnies de la collectivité et de l’économie nationale de manière générale.
Les débats juridiques de la rencontre de Casablanca ont révélé deux versions opposées. D’une part, celle évoquée par Tabih qui remet en cause l’abus de confiance en cas d’encaissement de la prime, en faisant appel au contexte concurrentiel dans lequel opèrent les courtiers et agents et qui, pour la plupart, n’arrivent pas à couvrir leur charge et se voient ainsi contraints de puiser dans les primes. D’autre part, la version évoquée par les membres de l’Umac qui tentent de rejeter le fondement juridique d’un abus de confiance en l’absence d’encaissement, car pour rester compétitifs, arguent-ils, ils seraient obligés d’offrir des facilités de paiement, quitte à réduire au maximum le niveau de la commission, au point d’accorder des fois la gratuité à leurs clients premium (la gratuité enfreint la loi de la concurrence, prévient Tabih).
La contestation s’organise
Face à cette confusion, l’ex-bâtonnier n’y va pas par quatre chemins et n’hésite pas à révéler le fin mot de l’histoire. Pour résoudre ce problème, dit-il, la réponse ne se trouve pas dans le tribunal, mais exige de mener une action de lobbying auprès des compagnies d’assurances et du ministère des Finances. L’avocat propose de négocier une charte encadrant la relation entre les intermédiaires et les compagnies d’assurances, qui laisse une marge de manœuvre adaptée au vécu quotidien des distributeurs de produits d’assurances. Au fil des discussions, les membres de l’Umac ont convenu de recenser les agents et courtiers en difficulté et/ou en contentieux, qui risquent d’être poursuivis pour abus de confiance, en vue de soumettre leurs dossiers à l’autorité de régulation.
«Quiconque de mauvaise foi détourne ou dissipe au préjudice des propriétaires, possesseurs ou détenteurs, soit des effets, des deniers ou marchandises, soit des billets, quittances, écrits de toute nature contenant ou opérant obligations ou décharges et qui lui avaient été remis à la condition de les rendre ou d’en faire un usage ou un emploi déterminé, est coupable d’abus de confiance et puni de l’emprisonnement de six mois à trois ans et d’une amende de 200 à 2.000 dirhams.
Si le préjudice subi est de faible valeur, la durée de la peine d’emprisonnement sera d’un mois à deux ans et l’amende de 200 à 250 dirhams sous réserve de l’application des causes d’aggravation prévues aux articles 549 et 550».