L'invité des ÉcosMaroc

Agadir Souss-Massa : la recette économique de Karim Achengli pour développer la région

Ce premier passage d’un président de région dans le cadre de «L’Invité des ÉCO», rendez-vous périodique des Inspirations ÉCO, a mis l’accent sur trois axes d’intervention. Karim Achengli s’y est livré à un exercice de questions-réponses concernant la question du développement régional. Détails.

Occupant une position médiane en tant que 6e région créatrice de richesse au niveau national, Agadir Souss-Massa, qui contribue à hauteur de 6,2% dans le PIB national, a été replacée, il y a plus de quatre ans, dans le cadre d’une nouvelle centralité géographique conformément au discours royal prononcé à l’occasion du 44e anniversaire de la Marche Verte. Ce n’est donc pas par hasard que Karim Achengli, président du Conseil régional Souss-Massa, a été l’Invité des ÉCO, le vendredi 6 avril, à Casablanca.

Ce premier passage d’un président de région, dans le cadre de ce rendez-vous périodique des Inspirations ÉCO, a mis l’accent sur trois axes d’intervention où le président de la région d’Agadir Souss-Massa s’est livré à un exercice de questions-réponses. Elles concernent, d’une part, la position de la région sur le podium de la richesse nationale et la nécessité d’améliorer son classement en termes de PIB national.

D’autre part, l’état d’avancement du Programme de développement régional (PDR) a été abordé ainsi que les défis auxquels est confrontée cette feuille de route régionale. Idem pour le chantier de la régionalisation avancée et le processus de déconcentration et de décentralisation administrative. D’entrée de jeu, Achengli a souligné que la cartographie des 12 régions adu Maroc implique forcément la question de compétitivité inter-régionale.

«Aujourd’hui, chaque territoire a le droit de pouvoir espérer une place dans le podium des régions les plus contributrices à la richesse nationale et figurer parmi les plus riches. De ce fait, au moment où on considère que ces régions sont des locomotives de développement, il y a donc des enjeux de taille et des défis importants à relever. Par conséquent, c’est la question de comment pouvoir retrouver ce chemin de croissance pour la région Souss-Massa qui est essentiel pour nous, en réussissant ce volet de compétitivité», explique Achengli.

Croissance : le développement passe inévitablement par les trois secteurs historiques
Actuellement, avec l’amorçage du PDR qui vient de souffler sa quatrième bougie, et la mise en œuvre de la déclinaison régionale du Plan d’accélération industrielle (PAI) pour la période 2014-2021, la région ambitionne de passer de la sixième à la quatrième place en matière de poids économique, conformément à son Schéma régional d’aménagement du territoire (SRAT) dont les orientations sont étalées à l’horizon 2046. Cette ambition appuyée passe impérativement par la consolidation du secteur secondaire qui représente à peine 16,6% du PIB régional afin de transformer l’économie régionale via le renforcement de la part du secteur industriel. Pour Achengli, la question de comment pouvoir retrouver le chemin de la croissance pour la région est essentielle pour réussir sa compétitivité.

«Notre territoire doit non seulement être compétitif par rapport aux autres régions, mais aussi, être très attractif tout en consolidant les ressources propres à notre région, sur lesquelles il va falloir capitaliser», insiste-il.

Aujourd’hui, la croissance de la région, qui dispose d’un leadership incontesté, selon le président du Conseil régional sur trois niveaux d’activités, à savoir, l’agriculture, la pêche et le tourisme balnéaire, passera inévitablement par le développement de ces trois secteurs.

«Pour l’agriculture, confrontée au stress hydrique et aux changements climatiques, le renforcement de son rôle est passé par des solutions alternatives, notamment le lancement de la station de dessalement ainsi que son extension qui, aujourd’hui, irrigue aujourd’hui la plaine de Chtouka. Il y aussi des solutions de traitement des eaux usées qui vont être utilisées par la suite à un niveau supérieur pour l’agriculture», fait savoir Achengli.

Pour ce qui est du tourisme, l’action passe par quatre axes prioritaires réunis sous le sigle PAPA (Promotion, Aérien, Produit et Animation). «La feuille de route du tourisme répond à ce volet puisque le ministère a identifié les maux du secteur en trouvant aussi des solutions et en activant des leviers pour booster l’offre de ce secteur, y compris le tourisme rural». Pour rappel, l’objectif assigné à la feuille de route touristique régionale est d’atteindre deux millions de touristes à horizon 2026.

«C’est un gros challenge puisqu’il faut passer au double. Je pense que cet objectif sera atteint grâce à l’intelligence collective qui passe par toute une convergence des politiques et du travail collectif entre les parties prenantes de notre territoire», explique Achengli qui indique qu’actuellement, le contrat-programme, sous forme d’engagements pour le développement mutuel du tourisme, est en train d’être finalisé.

«On a fait un travail de convergence entre le PDR, établi par la région, et la feuille de route touristique pour essayer, justement, de trouver un terrain d’entente entre les deux documents. «En tenant compte, bien sûr, de l’espace temporel qui est important (2026 pour la feuille de route touristique et 2027 pour le PDR), il fallait prendre en considération les projets qui sont réalistes et réalisables. C’est très important de s’entendre sur ce volet qui a un peu retardé le contrat d’application», indique-t-il.

S’agissant de la pêche qui est très cyclique, à l’heure actuelle, «le challenge est de pouvoir passer à un niveau supérieur, c’est-à-dire aller vers plus de transformation des produits de la mer et assurer ce passage vers l’agro-industrie, autrement dit, industrialiser la matière première et créer de la valeur ajoutée pour gagner des points en terme de PIB régional et générer plus d’emplois», affirme Achengli. Sur un volet beaucoup plus innovant, «la recherche et développement a prouvé qu’on pouvait faire aussi d’excellentes choses. C’est un aspect qui nous interpelle, notamment les écailles de poissons qui sont une source de collagène extrêmement prisée, ce qui nous permet d’être aussi performants dans nos objectifs de développement durable», ajoute-il.

Industrialisation : mettre le cap sur d’autres secteurs émergents
Concernant un autre registre d’industrialisation, la région Souss-Massa s’est positionnée sur le développement de l’industrie en tirant profit des acquis de la déclinaison régionale du Plan d’accélération industrielle (PAI).

«Il y a un événement majeur qui est aujourd’hui propre à la région, notamment la déclinaison régionale du Plan d’accélération industrielle au niveau de la région Souss-Massa, lancé en 2018, par sa Majesté le Roi Mohamed VI», souligne Achengli.

En ajoutant qu’à partir de cette date, la région a fait un état des lieux et la première des choses dont on s’est rendu compte, c’est que la région ne dispose pas d’un recensement du foncier industriel mobilisable». C’est pourquoi, depuis ce coup de projecteur, le foncier industriel a été l’épine dorsale du projet industriel du Souss-Massa. «Quand on parle d’industrie, on parle forcément de locomotives et d’IDE, avec la mise en place d’une Zone d’accélération industrielle. À partir de là, on s’est dit qu’on ne va pas se limiter seulement aux secteurs traditionnels, mais en développer d’autres. En dehors des trois écosystèmes historiques réunissant la Construction navale, l’Agro-industrie et la Chimie, cinq secteurs émergents, leviers d’accélération industrielle incluant la Plasturgie, l’Automobile, l’Offshoring, le Cuir et les Matériaux de construction ont été inscrits dans le cadre de cette déclinaison confrontée au contexte pandémique et post pandémique.

«Aujourd’hui, toutes les zones industrielles qui ont été mises en place sont opérationnelles et complètement commercialisées. Nous sommes à un taux de finalisation d’à peu près 70%, soit quasiment un chiffre similaire d’opérateurs qui sont en train de travailler et créer de la valeur. Cela se concrétise avec l’implantation d’une très grosse locomotive au niveau de la ZAI, notamment l’écosystème automobile, avec la création de 7.000 emplois», a révélé le président de la région.

Selon lui, «si Leoni et d’autres se sont installés dans la région, c’est parce qu’on leur a donné la garantie d’une attractivité et d’une compétitivité, parallèlement aux incitations qui ont été mises en place en fonction des emplois générés».

Connexion : l’incontournable vocation centrale, africaine et atlantique
Par ailleurs, l’assurance de mieux exporter et d’avoir une connexion portuaire a été apportée par le PDR, avec la mise à niveau du port qui a mobilisé des investissements assez conséquents, selon Achengli, en plus de la future réalisation du port sec avec tous les avantages d’un port terrestre. Sa finalité est de décongestionner le port actuel et de mobiliser des services beaucoup plus personnalisés, tout en prévoyant une ligne de cabotage reliant le port d’Agadir à celui de Tanger Med. Sur ce registre de connectivité – qui représente l’un des enjeux pour le développement économique de la région à vocation exportatrice -, Karim Achengli estime que le territoire d’Agadir Souss-Massa est interpellé par cette question.

«Le dernier discours de Sa Majesté a évoqué la dimension atlantique et africaine, qui est conjuguée avec une volonté royale de faire de notre région un centre géographique névralgique du Maroc. Donc, forcément, la problématique de connectivité est posée avec le développement de lignes maritimes et une performance du port actuel, surtout avec les récents blocages», explique Achengli.

«Nous avons un partenariat prévu avec le port de Dakar et un autre avec ceux d’Abidjan et de Saint Pedro en Côte d’Ivoire, et il est urgent de travailler dans ce sens avec une échéance fin 2024 pour lancer ces lignes maritimes.

Maryem Ouazzani & Yassine Saber & Moulay Ahmed Belghiti / Les Inspirations ÉCO



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