Mobilité ferroviaire : la Banque mondiale injecte 350 millions de dollars

Avec un financement de 350 millions de dollars, la Banque mondiale engage Casablanca sur une trajectoire de transformation ferroviaire majeure. L’ambition est de désaturer la métropole, reconnecter les périphéries au cœur urbain et ancrer le rail dans une stratégie de mobilité durable et inclusive.
La Banque mondiale injecte 350 millions de dollars dans la refonte de la mobilité du Grand Casablanca, donnant une nouvelle impulsion à un territoire sous forte pression urbaine. Ce soutien financier massif vient consolider une vision ambitieuse de faire du rail un levier central d’inclusion, d’efficacité économique et de durabilité environnementale.
À travers le programme « Service intra-métropolitain rapproché » (SIR), le projet entend désengorger une métropole saturée, reconnecter les périphéries au cœur urbain, et inscrire le transport ferroviaire au centre d’une stratégie intégrée de développement.
Le rail, levier de cohésion et d’inclusion urbaine
Casablanca, cœur économique du Maroc et première métropole du Royaume, est aussi le théâtre d’inégalités territoriales en matière de mobilité.
Pour des dizaines de milliers de travailleurs résidant en périphérie, à Nouaceur, Bouskoura, Zenata ou encore Mohammedia, accéder au centre urbain reste une course contre la montre, souvent compliquée par la congestion routière et le manque d’alternatives fiables. Le projet financé par la Banque mondiale apporte une réponse concrète à la fracture liée à l’accès à la mobilité.
L’institution de Bretton Woods entend renforcer et électrifier le service ferroviaire métropolitain, avec une fréquence accrue des dessertes, une amélioration substantielle de la qualité de service et un temps de trajet rationalisé.
Grâce à ce dispositif, près de 560.000 habitants devraient bénéficier d’une connexion efficace aux emplois et aux services essentiels d’ici 2031, avec une augmentation de plus de 7% des zones d’activités accessibles en moins de 45 minutes.
Une vision intégrée de la mobilité urbaine
Le financement de la Banque mondiale s’inscrit dans une approche globale qui dépasse le seul volet du transport de voyageurs. Sur une emprise de 73 kilomètres, le programme SIR prévoit de moderniser les infrastructures ferroviaires existantes, de renforcer les systèmes électriques et de signalisation, et de construire ou réaménager quinze gares multimodales selon des standards d’accessibilité universelle.
Cette approche intégrée reflète un tournant stratégique, le rail n’est plus seulement un mode de transport, mais un catalyseur de développement urbain durable. Les gares à venir seront pensées comme des hubs de vie, connectés à d’autres moyens de transport et à des zones d’activité, dans une logique de « transit-oriented development ».
À terme, l’ensemble du réseau bénéficiera d’une meilleure résilience climatique, condition essentielle pour répondre aux enjeux du changement global.
Renforcement institutionnel et transformation de l’ONCF
Au-delà de la seule dimension infrastructurelle, le projet soutenu par la Banque mondiale entend renforcer les capacités de planification, de gouvernance et de financement de l’ONCF. L’opérateur ferroviaire national, déjà engagé dans une trajectoire de modernisation, voit ainsi son rôle réaffirmé dans la construction d’un service public ferroviaire plus agile, plus performant, et mieux intégré dans l’écosystème urbain.
«L’appui de la Banque mondiale renforcera la gouvernance et les capacités opérationnelles de l’ONCF, appuyant ainsi sa vision à long terme de transformation en société anonyme jouant un rôle de premier plan dans la prestation de services clients», souligne Ahmadou Moustapha Ndiaye, directeur de division pour le Maghreb et Malte à la Banque mondiale.
Cette évolution institutionnelle vise à rendre l’ONCF plus autonome, plus attractif pour les investisseurs et mieux outillé pour porter les grands chantiers d’avenir, y compris dans le fret ferroviaire.
Le projet inclut d’ailleurs des investissements ciblés dans la logistique urbaine, avec une priorité donnée à la modernisation des installations à Aïn Sebaâ et à la structuration d’une nouvelle zone logistique à Zenata.
Casablanca, épicentre d’une ambition nationale
La dynamique engagée dans le Grand Casablanca s’inscrit dans une trajectoire plus large. Avec une population urbaine qui atteindra 70% d’ici 2050, le Maroc a pleinement conscience de l’enjeu que représente la mobilité urbaine pour sa compétitivité et sa cohésion sociale.
Le programme SIR, adossé à la stratégie nationale de développement durable et aux objectifs climatiques du pays, illustre l’effort croissant pour structurer un transport urbain sobre, inclusif et résilient.
La région Casablanca-Settat, qui concentre à elle seule une part significative du PIB national, devient ainsi un laboratoire grandeur nature de cette transition. L’objectif étant d’améliorer les conditions de vie des citoyens tout en préparant les infrastructures aux défis de demain, qu’il s’agisse de croissance démographique, d’évolution des flux logistiques ou de décarbonation des mobilités.
Une réponse systémique aux défis urbains
En soutenant l’intermodalité, en améliorant l’accès aux services, en fluidifiant les connexions entre le centre et les périphéries, et en réduisant l’empreinte carbone de la mobilité urbaine, ce programme s’attaque de front à l’un des défis les plus critiques des grandes agglomérations marocaines : celui de la soutenabilité urbaine.
Ce modèle de rail métropolitain électrifié, centré sur l’efficacité, la fréquence et la proximité, pourrait à terme être répliqué dans d’autres régions du Royaume, à mesure que les villes cherchent à relever le double pari de l’inclusion territoriale et de la transition écologique.
Sanae Raqui / Les Inspirations ÉCO