Evènements d’Al Hoceima :Ramid sort de son silence
Le ministre d’État chargé des droits de l’Homme, Mustapha Ramid, vient enfin de sortir de son mutisme concernant les évènements d’Al Hoceima. Le responsable gouvernemental était très attendu par l’opinion publique sur cette question. Mais sa première sortie officielle, bien que saluée, est visiblement jugée décevante par bon nombre de représentants de la société civile.
Les acteurs associatifs n’y sont pas allés de main morte, lors de la conférence-débat organisée jeudi dernier sous la supervision du ministre d’État chargé des droits de l’Homme avec la société civile sur le mouvement de contestation d’Al Hoceima. Mustapha Ramid est épinglé en raison de l’approche adoptée dans la tenue de cette rencontre. On lui reproche de s’être contenté de livrer la thèse du ministère de l’Intérieur, bien qu’il ait reconnu certains dépassements des forces de sécurité. Ramid, qui a retracé l’historique du Hirak, appelle à l’objectivité dans l’analyse des faits, reprochant à l’opinion publique de s’être rattachée à la culpabilité des forces de sécurité dans la mort de Mohcine Fikri -à l’origine des protestations- même si les résultats des enquêtes et des poursuites effectuées par les autorités compétentes ont révélé des faits attestant une «mort par erreur suite à un geste involontaire d’un ami».
Le gouvernement entend dorénavant se rattraper sur le plan communicationnel pour éviter de réitérer les erreurs des derniers mois, liées à la non-maîtrise de la communication. Le ministre d’État estime que le dialogue avec les acteurs associatifs s’impose pour trouver des solutions concrètes à la crise à travers le partage des informations voire, le cas échéant, leur rectification en vue d’élaborer une vision commune de la situation actuelle. Les représentants de la société civile, qui ont marqué de leur présence la conférence-débat tenue pendant près de six heures à l’Institut supérieur de magistrature -lieu hautement symbolique- parlent d’une même voix: la libération des détenus est une condition sine qua non pour l’apaisement à Al Hoceima.
À l’instar du chef de gouvernement qui a récemment précisé que cette question dépend uniquement de la justice, le ministre des droits de l’Homme relève que le verdict est entre les mains de l’autorité judiciaire sans pour autant exclure une probable éclaircie dans l’affaire au vu du caractère social des évènements. Une réponse qui ne semble pas satisfaire certains acteurs de la société civile, qui émettent des doutes quant à l’indépendance de la justice. Pour l’ancien ministre de la Justice, la question à débattre n’est pas celle de l’indépendance, mais plutôt de l’intégrité des juges. Le hirak du Rif met, en effet, la justice à rude épreuve. Pour le bâtonnier Abderrahim El Jamai, la priorité consiste désormais à lever la pression sur la justice et défendre la présomption d’innocence qui est bafouée de part et d’autre. Certains estiment nécessaire de trouver une issue urgente à la crise des détenus en érigeant les droits de l’Homme en priorité pour pouvoir, par la suite, jeter les bases du dialogue sur les requêtes sociales. L’accélération de la cadence s’impose à tous les niveaux. Le refus de poursuivre les jeunes détenus en état de liberté est vertement critiqué. La société civile appelle à accorder un grand intérêt à la question de torture subie par les détenus en faisant référence au rapport du Conseil national des droits de l’Homme.
À ce titre, Ramid signale que des mesures juridiques ont été prises au sujet de tous les prétendus cas qui ont fait l’objet d’examens médicaux, de même que des enquêtes. Des mesures jugées insuffisantes. Pour Mohamed Reda, membre du bureau exécutif du Forum de la dignité pour les droits de l’Homme, le ministre de la Justice a l’obligation d’ouvrir une enquête judiciaire sur les allégations de torture.
Par ailleurs, les représentants des associations ont tenu à soulever encore une fois le caractère spécial du mouvement du Rif. Le retard pris dans la mise en œuvre des recommandations de l’Instance équité et réconciliation est pointé du doigt. Le gouvernement assume une grande responsabilité en la matière, notamment sur le volet de la gouvernance sécuritaire. Représenté par Abderrazak El Hannouchi, chef de cabinet de Driss El Yazami, le Conseil national des droits de l’Homme a présenté le volet de la mise en œuvre des recommandations en relation avec ses prérogatives. Le budget global des projets de la réparation communautaire atteint 3.623.400 DH à Al Hoceima et 2.818.522 DH à Nador. Quelque 889 bénéficiaires ont été, jusque-là, indemnisés par l’IER et la commission de mise en œuvre de ses recommandations pour un montant de 44.279.169 DH. À cela s’ajoute la mise en œuvre des recommandations relatives à l’intégration sociale qui concerne 64 cas (emploi dans la fonction publique, logement, agréments de transport, appui aux projets…), à la régularisation administrative et financière (12 cas) et à la couverture médicale (338 cartes distribuées).
Les projets de développement
Le budget global alloué à la réalisation des projets de développement programmés est estimé à près de 9,9 MMDH répartis sur 522 projets (286 en cours de réalisation et 236 en cours de lancement) dans 14 domaines. Dans le secteur de l’agriculture et de la pêche maritime, la réalisation des projets de la convention «Al Hoceima Manarat Al Moutawassit» nécessite une enveloppe de 320 MDH jusqu’à 2019. S’agissant de la santé, plusieurs projets sont programmés dans le cadre de cette convention dont la construction du nouvel hôpital provincial d’une capacité de 250 lits, la mise à niveau et l’équipement des structures médicales de la province, l’équipement du centre régional d’oncologie et la construction et l’équipement de cinq centres médicaux de proximité. Dans le secteur de l’enseignement, les efforts portent sur la mise sur pied de plusieurs écoles communautaires et primaires, de lycées collégiaux et qualifiants et d’internats ainsi que la création d’un noyau universitaire et de deux instituts de technologie appliquée.