Congrès extraordinaire de l’UGTM : Le trio Mayara-Lebbar-Zoumi ne lâche rien
Ayant plébiscité Enaam Mayara dimanche dernier à la tête du syndicat, tout reste à jouer pour ces refuzniks qui veulent le changement face à Hamid Chabat et à l’actuel SG, Mohamed Kafi Cherrat. Avant le congrès, Mayara affirme avoir recueilli les 2/3 requis des signatures des secrétaires provinciaux avec des preuves à l’appui.
L’UGTM est suspendue au récépissé du ministère de l’Intérieur. Voilà pour résumer, en quelques mots, la situation au sein de la centrale syndicale proche du parti de l’Istiqlal. Des mécontents du syndicat ont pris le staff dirigeant au dépourvu en organisant un congrès extraordinaire dimanche dernier dans un hôtel de Rabat. Les refuzniks ont déposé leur demande auprès des autorités locales en respect des usages et de la loi. Ils attendent ledit récépissé qui fait office d’approbation du congrès. Lequel a débouché sur l’élection d’un nouveau secrétaire général de la centrale en la personne d’Enaam Mayara, 49 ans, cousin de Hamdi Ould Errachid, maire de Laâyoune et l’un des piliers du comité exécutif du parti de l’Istiqlal.
Lors d’une rencontre, mercredi soir à Rabat, Mayara a voulu mettre les choses au clair, son élection à la tête de l’UGTM n’aurait aucun rapport avec ses liens familiaux avec l’ennemi juré de Hamid Chabat, avant que les deux hommes n’enterrent la hache de guerre il y a quelques jours seulement pour préserver l’unité du parti. Il y a deux semaines au congrès extraordinaire du parti de la balance, l’image de Chabat, main dans la main, avec Ould Errachid scelle la fin des hostilités, du moins en apparence car comme le montre ce récent rebondissement au sein du syndicat, la plaie est toujours ouverte. Et juste après le congrès anti Mohamed Kafi Cherrat, secrétaire générale «déchu» du syndicat, Hamid Chabat, flanqué d’Abdelkader El Kihel, membre du comité exécutif, «occupent les locaux empêchant des secrétaires nationaux d’y avoir accès». C’est en tout cas ce qu’ont confirmé en chœur, Mayara, Abdeslam Lebbar, président du groupe istiqlalien à la Chambre des conseillers et Khadija Zoumi, conseillère et figure de proue de la centrale. Ce trio constitue la cheville ouvrière du mouvement rectificatif qui est né au sein de l’UGTM il y a plus d’un an.
À l’époque, le parti n’avait pas bien saisi cet appel au changement qui couvait parmi les militants, un nombre considérable de secrétaires régionaux et membres du bureau exécutif de la centrale. C’est sans compter sur Kafi Cherrat qui ne reconnaît absolument pas le congrès extraordinaire de dimanche dernier et qui a appelé pour le «vrai congrès extraordinaire» dont il a fixé la date au 10 juin prochain. C’est donc dans une course à la montre que les deux clans du syndicat se sont engagés. À savoir le front Kafi Cherrat, soutenu officiellement par Chabat et le front de Mayara-Lebbar-Zoumi, épaulé officieusement par Ould Errachid ou du moins, c’est ce qui se colporte dans les coulisses. Si, ces derniers obtiennent le récépissé du ministère de l’Intérieur avant le 10 juin, Kafi Cherrat sera en porte-à-faux avec la loi dans le cas où il organiserait son congrès extraordinaire.
Dans le cas contraire, c’est le congrès qui déterminera le sort du syndicat. D’ici là, l’expectative est de mise sans pour autant exclure des mouvements de ralliement des troupes des deux clans. D’un point de vue procédural, il faut signaler comme le confirme Mayara que le congrès de dimanche dernier a été tenu dans les règles de l’art. «Avant la tenue du congrès, nous avons sillonné le pays et recueilli les deux tiers des signatures des secrétaires provinciaux requises, soit 167 signatures sur un total de 197», argumente-t-il, ce qui octroie une majorité confortable pour faire valoir l’authenticité d’un congrès non-reconnu pas l’aile Chabat-Kafi Cherrat. En effet, le congrès extraordinaire a vu la présence de 154 membres parmi les 197 qui constituent le conseil général de la centrale et 33 membres sur les 60 que compte le bureau exécutif.
Au-delà des chiffres de représentativité de ce mouvement rectificatif, un constat est partagé par un nombre considérable de militants UGTM : la centrale s’affaiblit, peine à se moderniser et devient de moins en moins un interlocuteur valable face à un gouvernement qui saborde le social dans son programme, comme le soutient d’ailleurs Mayara. «Pour notre syndicat, la première rencontre de prise de contact était un fiasco», tonne-t-il. Avant d’ajouter que l’heure a sonné pour le changement quand bien même le risque d’entrer en clash direct avec Chabat est grand.
Les priorités de Mayara
Celui qui a été plébiscité à la tête de l’UGTM au congrès extraordinaire de dimanche dernier, et malgré son jeune âge (49 ans), a roulé sa bosse au sein de ladite centrale pendant 21 ans. Il connaît donc les vrais enjeux de ladite centrale, cette force de proposition et de plaidoyer qu’elle était même au temps d’Abbas El Fassi, à la tête du gouvernement. Interrogé par les ÉCO sur ses priorités pour le syndicat, il en a recensés trois. Primo, restructurer l’UGTM depuis les provinces et jusqu’aux fédérations afin de renforcer les structures régionales. Secundo, s’engager fortement dans le dialogue social dans le cadre d’un groupe homogène tout en restant en contact permanent avec les militants pour faire remonter l’information et mieux présenter les cahiers revendicatifs. Tertio, la formation syndicale sera une priorité durant les deux prochaines années pour mieux saisir les enjeux sociaux et partant être un meilleur interlocuteur face à l’Exécutif.