Smala & Co suspend ses activités
La plateforme opérant au Maroc tout en étant de droit français a annoncé la suspension de ses activités en raison d’une nouvelle réglementation en France. Elle dépend désormais de l’évolution du cadre réglementaire marocain.
Mauvaise nouvelle pour le crowdfunding! Smala & Co, une des plateformes les plus dynamiques sur le marché marocain, verra ses activités suspendues. La plateforme soulignait dans sa page Facebook que «de très récentes évolutions réglementaires en France nous contraignent à suspendre nos activités faute de pouvoir répondre aux nouvelles conditions appliquées aux plateformes de don. Nous sommes désormais dépendants de l’évolution du cadre réglementaire marocain pour poursuivre l’aventure Smala & Co». En effet, à l’origine de cette suspension figure une ordonnance de l’État français pour renforcer la lutte contre le blanchiment d’argent, entrée en vigueur le 1er janvier dernier. En effet, sachant que le Maroc ne dispose pas de cadre réglementaire autorisant le don -mécanisme par lequel fonctionne la majorité des plateformes de crowdfunding- Smala & Co s’est constitué comme société de droit français opérant sur le sol marocain.
La France muscle le renseignement financier
Ladite ordonnance introduit une nouveauté dans le sens où elle précise, dans son article 11, que «Les personnes qui exercent, à titre habituel, l’intermédiation (…) et qui ne proposent que des opérations de dons sont également intermédiaires en financement participatif». Autrement dit, les plateformes de dons sont désormais considérées comme intermédiaires en financement participatif, ce «qui implique notamment une déclaration auprès de l’ORIAS (registre unique des intermédiaires en assurance, banque et finance, ndlr) ainsi que la contractualisation d’une RC pro (police d’assurance de responsabilité civile professionnelle, contrat établi pour couvrir les dommages liés à l’exercice d’une activité, ndlr)», explique Arnaud Pinier, directeur et fondateur de Smala & Co.
De ce fait, de nouvelles normes s’imposent aussi aux prestataires monétiques. Ceux-ci, pour être compatibles, doivent désormais répondre aux normes Tracfin (similaire à la marocaine UTRF ou Unité de traitement du renseignement financier; il s’agit d’un service de renseignement rattaché au ministère des Finances et des comptes publics français visant à lutter contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme, ndlr). Pinier ajoute d’ailleurs que rares sont les prestataires monétiques qui répondent à ces nouvelles normes. C’est le cas notamment de son actuel prestataire. De même, «aucun prestataire, respectant ces nouvelles normes, ne peut nous offrir la possibilité de travailleurs dans la zone Maghreb sauf Paypal, mais ce n’est pas suffisant», précise-t-il. L’objectif du législateur français est de renforcer les contrôles sur les plateformes crowdfunding basées sur le don, et celles-ci doivent donc désormais utiliser des prestataires monétiques qui répondent parfaitement aux exigences Tracfin, résume le directeur de Smala & Co.
Une fédération pour le crowdfunding
En attendant que le cadre réglementaire voit le jour au Maroc, les opérateurs de crowdfunding se sont dotés, courant novembre dernier, d’une fédération. Il s’agit de la Crowdfunding Morocco Federation (CMF), en accord avec le ministère et en collaboration avec de nombreux acteurs de l’écosystème du crowdfunding, notamment l’ambassade américaine, des cabinets d’avocats ainsi que les plateformes de crowdfunding.
La fédération est en cours de finalisation sur le plan juridique. La mission de la fédération est de créer et développer l’industrie du financement collaboratif au Maroc et en Afrique. Elle se fixe pour objectifs d’informer les citoyens, les entrepreneurs, les acteurs économiques et politiques sur le financement collaboratif, mais aussi d’accompagner le développement des premières plateformes de financement collaboratif. Elle ambitionne également d’être une force de proposition auprès des autorités de régulation, d’attribuer un label de confiance aux opérateurs et d’être une courroie de transmission entre les autorités de régulation et les opérateurs. Elle a aussi pour objet de contribuer à la définition, à promouvoir et à faire valoir les bonnes pratiques et normes éthiques les plus élevées en relation avec l’industrie du financement collaboratif. Quant au projet de loi, hormis son élaboration avec l’appui de l’ambassade américaine, et qui est aujourd’hui au ministère de l’Économie et des finances pour révision, rien ne filtre sur son état d’avancement.