Edito. Derrière les chiffres

Dans les entreprises, on respire un peu mieux. Les patrons annoncent des jours meilleurs : la production devrait progresser, portée par l’alimentaire, la chimie, l’énergie ou encore le génie civil. On pourrait y voir le signe d’une reprise enfin solide, un moral qui se redresse après des mois d’incertitude. Mais derrière les courbes et les taux d’utilisation des capacités, il y a d’autres réalités.
Dans certains ateliers, les chaînes ralentissent, faute de pièces importées à temps. Dans les bureaux, les comptables jonglent avec des trésoreries trop serrées. Et sur les chantiers, les carnets de commandes ne suffisent pas toujours à garantir l’emploi.
Les chiffres laissent croire à une embellie, mais ils ne racontent pas les inquiétudes des dirigeants qui doivent chaque mois payer leurs équipes, sécuriser leurs matières premières et négocier avec leurs créanciers. Les tendances publiées par le Haut-commissariat au plan confirment ce paradoxe : une croissance annoncée, mais des fondations parfois fragiles.
Comme souvent, la confiance est là, mais elle se heurte à des obstacles bien connus dans le monde entier. L’économie marocaine avance, c’est une certitude, mais rien n’est facile… Le contraste n’est pas nouveau : c’est celui d’un pays qui crée de la valeur, mais peine à transformer cet élan en croissance inclusive et durable. Tant que les entreprises resteront dépendantes de chaînes d’approvisionnement extérieures ou étouffées par leur trésorerie, l’optimisme affiché restera vulnérable.
L’enjeu, désormais, n’est pas seulement de produire plus, mais de produire mieux, en bâtissant des bases solides. Car les chiffres, eux, peuvent illustrer une croissance. Mais ce sont les femmes et les hommes qui travaillent derrière ces chiffres qui doivent en attester.
Hicham Bennani / Les Inspirations ÉCO