Maroc

Risques sectoriels de non-paiement : une économie stable… en surface

Allianz Trade livre son «Atlas Sectoriel 2025», une radiographie des risques de non-paiement par secteur et par pays. Le Maroc y affiche une résilience relative : aucun secteur n’est jugé à haut risque, mais la vigilance reste de mise. Entre signaux modérés et tensions sectorielles, l’équilibre reste à maintenir.

Allianz Trade vient de rendre public son «Atlas Sectoriel 2025». Ce document contient une appréciation des risques liés au non-paiement de créances commerciales par pays et par secteur. Une analyse matricielle qui vient éclairer d’un jour nouveau les vulnérabilités et les résiliences de l’économie nationale.

Dans cette cartographie, le Maroc ne bascule ni dans l’alarmisme, ni dans l’euphorie. Aucun secteur n’est classé à haut risque (rouge). Une donnée importante, qui souligne une certaine robustesse du tissu économique, sans pour autant occulter les fragilités latentes.

En effet, la majorité des secteurs sont classés en risque modéré à significative (jaune et orange), tandis que quelques niches stratégiques parviennent à tirer leur épingle du jeu et décrochent la couleur verte, synonyme d’un risque limité.

La lecture sectorielle de cette matrice révèle une économie en équilibre, portée par des dynamiques contrastées. La présence dominante de la couleur orange (risque significatif) sur de nombreux secteurs clés indique que l’environnement des affaires, bien que soutenu par une stabilité politique et monétaire, reste contraint par plusieurs variables : inflation résiduelle, dépendance aux importations, demande intérieure et exposition aux chocs exogènes, notamment climatiques.

Secteurs stratégiques : des niveaux de risques contrastés
Dans l’agroalimentaire, un risque modéré (jaune) est observé par le document d’Allianz Trade. Malgré la dépendance aux intrants importés, les efforts d’industrialisation et de montée en gamme commencent à porter leurs fruits. Le label Maroc, lui, gagne du terrain sur certains marchés africains, et la filière oléicole ainsi que les produits de terroir marocains confirment leur potentiel à l’export.

Pour l’industrie pharmaceutique, l’évaluation des risques est au vert, signe de solidité et de confiance. L’essor de la production locale, notamment dans le contexte post-Covid, combiné à l’ambition de faire du Royaume un hub régional de la biotechnologie, participe à cette dynamique rassurante.

Dans le bâtiment et la construction, un risque significatif (orange) pèse, reflet des tensions sur le foncier, de la hausse des coûts de construction, et de la volatilité de la demande, en particulier dans le segment moyen standing. Le secteur du commerce, au cœur des dynamiques de consommation nationale, se situe dans une zone de risque modéré (jaune), selon l’évaluation d’Allianz Trade. Ce positionnement, en apparence rassurant, masque pourtant des fragilités structurelles qui méritent une attention soutenue.

D’une part, la grande distribution, bien que modernisée et de plus en plus structurée, reste confrontée à une demande intérieure hésitante (même si en hausse au 2e trimestre), tributaire d’un pouvoir d’achat sous pression et d’une consommation qui se recentre sur les produits essentiels.

D’autre part, le commerce de détail subit de plein fouet la concurrence des grandes enseignes, mais aussi l’effet ciseau des coûts logistiques en hausse et d’un accès difficile au financement. Par ailleurs, le commerce extérieur n’est pas en reste. Le déficit de la balance commerciale persiste, alimenté par une importation massive de biens de consommation et de matières premières, peu compensée par la valeur ajoutée des exportations hors phosphates et automobile.

À cela s’ajoute une vulnérabilité logistique encore palpable, malgré les progrès notables des infrastructures portuaires. En somme, si le secteur du commerce n’est pas en zone rouge, c’est davantage en raison de sa capacité à s’adapter à court terme que par la force de ses fondamentaux. Le vrai défi reste la transformation structurelle, par la digitalisation, la formalisation du commerce de proximité, et l’intégration logistique régionale.

Les secteurs tournés vers la consommation sous pression
Grande distribution, biens de consommation durable, textile, habillement… Ces secteurs affichent tous un risque significatif (orange). Ils subissent les effets croisés d’un alourdissement des charges logistiques, et d’un pouvoir d’achat en érosion, particulièrement dans les zones périurbaines.

Dans l’électronique et équipements informatiques, étonnamment, l’évaluation est au jaune, malgré que le secteur soit porté par une demande croissante en matériel digital, en partie stimulée par la digitalisation de l’administration publique et l’essor du télétravail. Le secteur des transports reste, pour sa part, en zone orange, impacté par la fluctuation du prix du carburant et une logistique encore perfectible. Le fret ferroviaire, bien que stratégique, souffre d’un manque de maillage national adapté à l’industrie.

Dans l’énergie, le risque est modéré (jaune). L’ambitieux programme national pour les énergies renouvelables commence à rassurer les observateurs, mais la dépendance persistante aux hydrocarbures importés demeure un facteur de risque. L’Industrie chimique et plastique, notée également orange, pâtit des contraintes environnementales nouvelles, et d’un besoin accru de modernisation technologique.

Une agriculture entre potentiel et incertitude
Le secteur agricole est classé, pour sa part, en zone orange, reflet d’une situation paradoxale : malgré les plans nationaux comme «Génération Green», la dépendance à la pluviométrie, l’irrégularité climatique et la faible valeur ajoutée générée par certaines filières pèsent encore lourd dans la balance.

Ainsi, ce diagnostic sectoriel brosse le portrait d’un Maroc résilient, mais sous tension modérée. La relative absence de secteurs à très haut risque est en soi un signe de robustesse, mais la concentration des risques «significatifs» rappelle que la marge de manœuvre est étroite. L’équilibre est là… mais il demeure fragile.

Abdelhafid Marzak / Les Inspirations ÉCO



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