Maroc

Kafala : Ramid remet le sujet à l’ordre du jour

Le ministère de la Justice et des libertés vient de lancer une consultation internationale pour la réalisation d’une étude sur les procédures administratives et juridiques applicables en matière de Kafala au Maroc. L’objectif est d’établir un état des lieux des procédures actuelles et de proposer des améliorations législatives et institutionnelles.

Du nouveau pour le régime de la Kafala au Maroc, un sujet qui a fait couler beaucoup d’encre suscitant à chaque fois une vive polémique au sein de l’opinion. Le ministère de la Justice et des libertés vient de lancer un appel d’offres international pour l’élaboration d’une étude sur les procédures administratives et juridiques applicables en matière de Kafala. La consultation a pour objectif, selon le département de Mustapha Ramid, «d’établir un état des lieux des procédures actuelles applicables en matière de kafala et de proposer des améliorations législatives et institutionnelles pour s’assurer du respect de l’intérêt supérieur des enfants pris en charge par ce régime de la kafala au Maroc».

À cette fin, les principaux objectifs de cette étude sont de collecter des données quantitatives et qualitatives concernant le profil et le nombre d’enfants et les familles concernées par des procédures de kafala au Maroc, en vue de renforcer la mise en place d’un système d’informations intersectoriel et par la même occasion procéder à une analyse juridique des procédures administratives, lois et décrets applicables pour ce régime.

De même, ladite consultation consistera à réaliser une analyse de conformité des pratiques de kafala, d’une part par rapport au cadre législatif et réglementaire, y compris les normes internationales et d’autre part par rapport à l’intérêt supérieur des enfants concernés en veillant à identifier les spécificités régionales. Dans ce cadre, il sera question de détecter et d’analyser les failles du système actuel de kafala en vue de proposer des pistes d’amélioration dans l’intérêt supérieur des enfants makfouls en se basant sur les bonnes pratiques internationales en la matière. Sur ce point, l’avis d’appel d’offres ouvre la voie à la proposition de «toute autre forme de prise en charge alternative similaire ainsi qu’à une proposition de modèles adaptés au contexte marocain».

Discriminations persistantes
L’étude dont la réalisation bénéficie du soutien de l’UNICEF débutera en principe en septembre prochain et les travaux sont attendus au mois de novembre selon les termes de l’appel d’offres internationales. Le consultant qui sera sélectionné devra, pour ce faire, prendre attache avec les principaux acteurs institutionnels ainsi que les partenaires dans une approche participative et inclusive impliquant un large éventail de parties prenantes, d’intervenants et de populations cibles. Selon les statistiques du ministère de la Justice, quelque 2.000 enfants sont placés chaque année auprès d’une famille kafil par le juge. Cependant, la pratique révèle un manque de coordination des acteurs et l’absence de définition claire de leurs rôles et responsabilités, en plus du fait que les données actuelles ne permettent pas d’attester «d’un suivi socio-psychologique suffisant des enfants makfouls et des familles kafils, ni de connaître le devenir des enfants pris en charge, y compris des enfants qui partent vivre à l’étranger avec leurs parents kafils».

Le département de la justice avance aussi le constat qui fait ressortir que le respect des principes de non-discrimination et de l’intérêt supérieur de l’enfant a mis en évidence des écarts persistants entre la pratique, l’interprétation de la loi et les normes en vigueur. De même, les pratiques d’une région du pays à l’autre diffèrent du point de vue de la longueur des procédures, de la disponibilité des informations pour prendre une décision dans l’intérêt de l’enfant et du degré de préparation des enfants et des familles à la kafala. Le ministère rappelle, à ce titre, que la Constitution dispose en son article 32 relatif à la famille que «l’État doit garantir égale protection et considération sociale et morale à tous les enfants, abstraction faite de leur situation familiale».

Dans la pratique, reconnaît le ministère, il existe une discrimination fondée sur la situation matrimoniale des parents au moment de la naissance de l’enfant. Les enfants nés hors mariage et les enfants abandonnés, entre autres, sont fréquemment confrontés à diverses formes de discrimination et de stigmatisation. «La kafala est aujourd’hui le seul système juridique prévu par les textes qui offre à l’enfant une alternative au placement en institution», estime le département de Ramid qui veut disposer d’une étude récente afin de prendre les dispositions qui s’imposent. L’objectif principal est, in fine, une révision de fond du régime de kafala au Maroc.


 

Recommandations internationales
Selon les explications du ministère, l’initiative s’aligne directement sur les recommandations du Comité des droits de l’enfant formulées au gouvernement du Maroc lors de la présentation de ses 3e et 4e rapports périodiques. En vue de mettre le système de justice des enfants en totale conformité avec la Convention relative aux droits de l’enfant (CDE), les observations finales dudit comité ont, en effet, porté sur la nécessité de modifier sa législation régissant le système de kafala en vue de la rendre pleinement conforme à ladite convention, d’empêcher le placement automatique d’enfants nés hors mariage et d’enfants vivant dans la pauvreté sous le régime de kafala, d’assurer un suivi approprié des enfants placés sous le régime de kafala et de prendre toutes les mesures nécessaires pour prévenir et punir l’exploitation d’enfants par le biais du système de kafala. «Ces recommandations interpellent ainsi les efforts du ministère de la Justice et des libertés, en tant que chef de file de la protection judicaire des enfants au Maroc, pour mieux améliorer la gouvernance et rehausser la qualité des prestations de service applicables en matière de kafala en direction des enfants, dans le cadre de l’application de la loi», souligne le département de Ramid.



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