Maroc

Souss-Massa : Presque un désert médical ?

Le Schéma régional de l’offre de soins (SROS) pour la période 2016-2020 dresse un aperçu alarmant de l’état de santé de la population de la région Souss-Massa. Comme le montrent les indicateurs, la situation est inquiétante au sujet de la santé maternelle et infantile ainsi que pour les sujets jeunes. La région souffre aussi d’une nette augmentation de la prévalence des maladies non transmissibles.

Les chiffres révélés par le Schéma régional de l’offre de soins (SROS) au sujet de l’état de santé de la population de la région Souss-Massa sont aussi impressionnants qu’alarmants et ils ne représentent que la partie visible de l’iceberg puisque la population de cette région, qui est d’environ 2,7 millions d’habitants, soit 7,9% de la population marocaine, souffre d’ une dégradation de la qualité de vie à cause des entités démographiques (agglomérations) condensées et l’augmentation sur le plan épidémiologique de la prévalence des maladies non transmissibles telles que le diabète et l’insuffisance rénale en plus de la persistance des maladies transmissibles (SIDA, tuberculose…). Sur la base des données disponibles issues du système d’information sanitaire et des travaux des groupes thématiques dans le cadre de l’élaboration du SROS au niveau de la région Souss-Massa, plusieurs comportements à risque sont à souligner chez les sujets jeunes âgés de 10 à 24 ans qui représentent 22% de la population, soit environ 597.828 jeunes. Les données nationales montrent aussi que 48,9% de cette catégorie âgée de 15 ans et plus présentent des troubles mentaux tels que l’insomnie, l’anxiété et la dépression.

De plus, près de 16% des élèves de 13 à 15 ans sont des fumeurs, 14% ont tenté de se suicider, tandis que 15% de cette catégorie souffrent de surpoids alors qu’à ce jour la région ne dispose d’aucun espace de santé dédié à cette catégorie. Pourtant les écarts par rapport au cadre normatif sont importants et les deux centres médicaux-universitaires dont dispose la région au niveau d’Agadir sont loin de satisfaire la demande. S’agissant de la santé maternelle et infantile, l’analyse des indicateurs de couverture et de production pour l’année 2015 a montré d’une part une amélioration des proportions d’accouchement en milieu surveillé public (82%) et un taux de césarienne de 12%, lesquels taux sont d’ailleurs supérieurs à la moyenne nationale, qui est respectivement de 73 et 8,3%. D’autre part, le nombre de mort-nés est passé de 909 en 2013, à 824 en 2015. Quant au rapport des activités relatif aux déclarations des décès des femmes (15-49 ans), ce dernier montre que le nombre des décès maternels a augmenté au niveau des structures de santé, allant de 24 décès en 2012 à 41 en 2015. La première cause engendrant la mortalité maternelle est l’hémorragie avec une proportion de 39%, suivie de causes indirectes à hauteur de 29% et en dernier lieu de l’éclampsie (crise convulsive) avec un taux de 23%.

À cet égard et malgré les stratégies d’intervention au niveau régional, le taux de mortalité périnatale qui précède la naissance du bébé persiste encore avec un taux égal à 20% en 2015, alors que le nombre de décès néonatals a augmenté, passant de 161 cas en 2013 à 196 en 2015. Sur ce point, il faut savoir que la souffrance néonatale est en effet la première cause de décès, soit 27%, suivie de la prématurité à hauteur de 26% et des infections néonatales à hauteur de 14%. En matière de planification familiale (PF) cette fois-ci, les indicateurs font état d’une insuffisance en termes de recrutement et d’utilisation des services. En effet, le taux de recrutement en consultation prénatale est de 67% alors que la moyenne nationale est de 77%.

L’analyse de ce taux en 2015 par milieu et province montre une disparité entre les provinces des milieux urbain et rural. Sur ce dernier point, malgré que la vaccination des enfants âgés d’un an en milieu rural soit très satisfaisante selon le SROS, l’offre rurale de soins reste à améliorer. En effet, 37% de la population des campagnes étaient toujours desservis par la couverture de l’équipe mobile au titre de l’année 2016. Concernant la distance séparant la population des établissements de soins de santé primaire, 18% de cette population vit entre 3 et 6 km et 48% au delà de 6 km. S’agissant des maladies transmissibles, la région est marquée par une diminution de l’incidence, voir même l’élimination de certaines maladies telles que la rougeole, la polio et le paludisme autochtone.

Cependant d’autres maladies transmissibles persistent encore au niveau de la région, notamment les infections sexuellement transmissibles (IST) avec 29.272 cas pris en charge en 2014 en plus du SIDA. À lui seul, l’incidence du VIH représente 24% de l’incidence nationale tandis que 2.248 cas ont été notifiés dont 49,4% à partir de 2010. La prévalence du VIH est de 5,1% chez les professionnels du sexe et le nombre de décès par ce fléau s’élève à 311 cas par an, soit 6 décès par semaine. D’autres maladies de la même catégorie constituent toujours un risque. Il s’agit de la méningite avec 517 cas notifiés entre 2011 et 2015 en plus des leishmanioses, dont le nombre de cas est passé de 51 à 61 durant la même période, ainsi que de la tuberculose qui frappait encore avec une incidence annuelle de 41 sur 100.000 habitants en 2015.

Concernant cette dernière maladie, il faut noter que c’est à Inezgane-Ait Melloul que l’on observe une concentration avec une incidence de 123 cas pour 100.000 habitants. S’agissant des urgences, près de 297.465 passagers sont répertoriés annuellement au niveau de ce service, soit un effectif de 11% de la population régionale. Selon l’équipe du SROS, les problèmes liés aux urgences sont les résultats de plusieurs facteurs, notamment les problèmes d’accessibilité géographique et d’étendue des bassins de desserte majoritairement à prédominance rurale, mais aussi les accidents sur la voie publique alors que le système d’évacuation sanitaire présente quant à lui de multiples obstacles, notamment en milieu rural. C’est essentiellement à cause de l’insuffisance du nombre des ambulances que ces dysfonctionnements sont enregistrés.

À cela s’ajoute une carence des dotations en carburant, l’insuffisance du plateau technique de l’hôpital régional Hassan II ainsi que des risques potentiels de catastrophes naturelles, d’où la nécessité de réaliser un plan d’urgence intégré. Le dernier point et non des moindres est celui relatif aux personnes âgées qui ne disposent ni de centre de gériatrie, ni de centre de soins palliatifs, auxquelles s’ajoutent les personnes en situation de handicap. Les unités de rééducation implantées dans la région ne suffisent pas à prendre en charge cette dernière catégorie. Pire encore, la région ne dispose que d’un seul centre d’appareillage orthopédique qui doit subvenir à ses besoins, à ceux des régions avoisinantes et à celles du Sud.

Offre de soins : Un énorme déficit
La priorisation des besoins par l’équipe du SROS a permis d’identifier près de 158 projets dont 114 projets dédiés à la création, l’extension et l’augmentation des établissements de santé au sein de la région Souss-Massa et 44 autres projets pour l’acquisition d’équipements lourds. Les disparités de l’offre et l’accessibilité aux soins à l’intérieur de la région Souss-Massa persistent et couvrent toutes les composantes, notamment les infrastructures sanitaires, les équipements lourds, les ressources humaines ainsi que les différents réseaux de soins. C’est une autre conclusion à laquelle aboutit le SROS de la région Souss-Massa.

En attendant la budgétisation de ce schéma directeur et la mise en œuvre de son plan d’action à travers une évaluation et un suivi permanent, la priorisation des besoins a permis au total d’identifier près de 158 projets pour la période 2016-2020. Dans le détail, il s’agit de 114 projets dédiés à la création, l’extension et l’augmentation des établissements de santé au sein de la région Souss-Massa et 44 autres projets pour l’acquisition d’équipements lourds. Selon la projection des besoins réels en structures hospitalières par province et préfecture, le besoin total en lits hospitaliers est de l’ordre de 1.402 unités, sachant bien que la capacité actuelle installée dans la région est à peine de l’ordre de 2.240 lits. Celle-ci est répartie dans les secteurs public, privé et militaire. De surcroît, le ratio régional habitant par lit dans le secteur public est de 1.731 habitants par lit alors que la moyenne nationale ne dépasse pas 1.536 hab/lit. Le constat est le même pour les ressources humaines et les équipements lourds. Sur ce dernier point, l’inventaire et l’état des lieux font ressortir que ce parc est obsolète et qu’il doit à la fois être modernisé, renouvelé et renforcé au niveau de la région.

En effet, 40% des équipements ont été acquis depuis plus d’une décennie et 40% ont un âge compris entre 5 et 10 ans. S’agissant des ressources humaines, les besoins sont énormes selon l’analyse des écarts réalisés ainsi que l’état de l’offre de soins puisque le ratio régional habitant/médecin du secteur public est de 4.598 en 2015. De ce fait, il dépasse nettement la moyenne nationale qui est de 4.040 enregistrée en 2013.

Toutefois, c’est en matière de profils liés au personnel médical que le besoin est le plus important, notamment en e qui concerne les infirmiers polyvalents. Même chose pour les médecins généralistes et spécialistes en plus des sages-femmes et des techniciens ambulanciers, de radiologie et de laboratoire. Cette situation de pénurie en RH diffère d’une province à une autre et d’un profil à un autre. Cependant, la province de Taroudant affiche le besoin le plus élevé, toutes catégories confondues tandis que Tata a un besoin beaucoup plus accru en médecins généralistes. Cette situation concerne également les établissements de soins de santé primaire (ESSP) et les établissements médicaux-sociaux qui accusent un déficit en la matière.


 

Mise à niveau des hôpitaux
Ce constat alarmant a été déjà établi par le Conseil régional du Souss-Massa. Les observations formulées dans un rapport élaboré par la commission santé ont montré que l’état des lieux des hôpitaux souffre d’un état de délabrement, d’un sous-équipement ainsi que de l’insuffisance des effectifs et des soins tertiaires. C’est pourquoi une convention de partenariat afférente à la mise à niveau des hôpitaux publics de la région avec le ministère de la Santé a été paraphée en concertation avec le Conseil régional. En effet les deux parties se sont engagées à mobiliser un montant de 155 MDH sur trois ans pour la résolution des dysfonctionnements précités. Ces montants n’incluent pas le budget dédié au CHU d’Agadir et les hôpitaux financés par la Banque européenne d’investissement (BEI). Dans le détail, l’ensemble des hôpitaux de la région seront concernés par cette convention à travers des opérations de mise à niveau, d’équipement et de renfoncement des services de soins tertiaires (www.leseco.ma).



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