Marketing digital : l’ère du monopole incontesté de Google touche à sa fin

Avec la montée en puissance de l’IA générative, le référencement classique atteint ses limites. Pour vendre, conquérir de nouveaux clients ou simplement rester visibles, les entreprises doivent désormais se tourner vers une nouvelle discipline, la Generative engine optimization, qui tend à positionner les marques au cœur des réponses façonnées par l’intelligence artificielle.
Depuis les débuts du Web dans les années 1990, les moteurs de recherche sont devenus l’alpha et l’oméga de la visibilité en ligne. Taper un mot-clé, générer une liste de liens, en choisir le plus pertinent…, ce rituel a façonné, pendant plus de deux décennies, la manière dont les internautes effectuent leurs recherches en ligne, contraignant les entreprises à adapter en conséquence leur stratégie d’indexation de contenu pour rester visibles. Mais ce schéma est en passe de devenir obsolète. Les interfaces conversationnelles, portées par l’intelligence artificielle (IA) générative, modifient peu à peu la manière dont les individus s’informent d’abord, prennent leurs décisions et consomment.
Première victime collatérale de cette transition, Google, le géant californien longtemps maître incontesté du référencement, se retrouve désormais fragilisé au fur et à mesure que la bataille pour la visibilité se déplace vers les algorithmes génératifs. En atteste l’évolution fulgurante du volume de requêtes en ligne (voir infographie).
En effet, il a fallu plus d’une décennie à la filiale d’Alphabet, lancée en 1998, pour franchir le cap du milliard de recherches annuelles. ChatGPT, accessible depuis fin 2022, a atteint ce seuil en moins de trois ans ! «L’essor fulgurant de l’IA générative marque une recomposition profonde de l’écosystème numérique, où les internautes ne cherchent plus par mots-clés mais dialoguent et confient certaines tâches à leurs agents d’IA», explique Mohamed Bahlaoui, Founder & Senior Online Marketeer – MB Online.
Menace existentielle
Selon Gartner, le cabinet américain de conseil et de recherche en technologies, d’ici 2028, près de la moitié du trafic issu des moteurs traditionnels pourrait être captée par l’IA. En pratique, une boutique en ligne de mode, qui dépendait hier du référencement SEO, verra demain son trafic s’évaporer si son nom n’apparaît pas dans les réponses générées par ChatGPT, Perplexity ou Google AI Overviews.
Le même risque guette une agence immobilière locale, dont les annonces pourraient rester invisibles face aux nouveaux agents conversationnels capables de proposer en temps réel une sélection de biens.
Au Maroc, un voyagiste spécialisé dans les circuits culturels ou une chaîne hôtelière à Marrakech pourrait, de la même manière, disparaître des radars si ses offres ne sont pas relayées par les assistants génératifs, au profit de concurrents mieux intégrés dans ces nouveaux écosystèmes.
«Ces changements vont amener les enseignes à repenser entièrement leur stratégie de visibilité, qu’elle soit organique, payante ou encore sur les réseaux sociaux», estime un consultant en marketing.
Redéfinir les règles du jeu
Le changement de paradigme n’échappe pas aux acteurs du marketing digital, lesquels s’efforcent déjà d’anticiper la mutation pour capter un marché émergent. De ce fait, leur champ d’action s’étend, au delà du SEO classique, à la Generative engine optimization (GEO), discipline naissante qui vise à inscrire les marques directement dans les réponses fournies par les LLM.
«Une chaîne hôtelière doit désormais s’assurer qu’un voyageur qui interroge un assistant conversationnel sur les lieux de séjour au Maroc voie son nom apparaître dans la proposition générée, et non relégué au second plan», explique un spécialiste en IA.
Peu d’enseignes, pour l’heure, prennent réellement la mesure de cette mutation. Nombre de dirigeants restent attachés aux réflexes de la publicité digitale tels qu’ils se sont imposés au cours des deux dernières décennies. Or l’essor de l’IA générative marque une rupture profonde, redéfinissant les conditions de l’autorité de marque.
«Les acteurs qui tardent à s’adapter risquent la marginalisation. Ceux qui anticipent, en revanche, pourront transformer cette menace en avantage compétitif», alerte notre consultant en marketing. Tout l’enjeu est d’en tirer parti avant qu’elle ne s’impose comme un standard du marketing digital.
Ayoub Ibnoulfassih / Les Inspirations ÉCO