Automobile : Renault ajuste ses ambitions face à un marché automobile en repli

Confronté à une dégradation persistante du marché automobile européen, Renault revoit à la baisse ses objectifs 2025. Le départ de Luca de Meo, remplacé temporairement par Duncan Minto, coïncide avec un essoufflement de la dynamique commerciale, marqué par des stocks élevés et une pression accrue sur les marges. Le groupe prévoit désormais une marge opérationnelle de 6,5%, contre 7% auparavant.

Renault a dévoilé mardi une révision à la baisse de ses ambitions financières pour 2025. La marge opérationnelle est désormais attendue autour de 6,5% du chiffre d’affaires, contre un objectif initial d’au moins 7%. Une décision motivée par une conjoncture plus difficile qu’anticipé: «Nous faisons face à un ralentissement du marché automobile, notamment auprès des particuliers», a déclaré Duncan Minto, directeur financier du groupe, désormais directeur général par intérim.

Le constructeur français, qui regroupe les marques Renault, Dacia et Alpine, a réalisé un chiffre d’affaires de 27,6 milliards d’euros au premier semestre, soit une progression de 2,5% sur un an. Toutefois, la performance opérationnelle a marqué le pas : la marge est tombée à 6% et le free cash-flow s’est réduit à 47 millions d’euros, contre 2 milliards initialement attendus sur l’ensemble de l’année.

Des stocks qui pèsent
Renault est aujourd’hui confronté à une accumulation de stocks. Fin juin, le groupe disposait de 530.000 véhicules, un niveau jugé élevé.

«Les usines tournent à 90% de leur capacité, ce qui alourdit les flux de trésorerie», a reconnu Duncan Minto.

Cette situation traduit une anticipation trop optimiste de la demande, notamment sur les véhicules utilitaires dont les ventes en Europe ont connu un net repli. Dans ce contexte, le constructeur a révisé ses prévisions de cash-flow pour l’année, qui devraient désormais s’inscrire entre 1 et 1,5 milliard d’euros.

Malgré tout, la direction reste confiante pour le second semestre : «La dynamique reste positive pour la suite de l’année», a assuré Minto.

Plan d’économies renforcé
Face à ces vents contraires, Renault entend renforcer sa discipline financière. Un nouveau plan de réduction des coûts est en préparation, incluant une baisse des dépenses générales, administratives et de R&D. Des précisions seront apportées lors de la publication détaillée des résultats semestriels le 31 juillet prochain.

L’objectif est clair : restaurer des marges plus conformes aux attentes, tout en assurant la flexibilité nécessaire dans un marché de plus en plus volatil. L’offre multi-énergie du groupe — électrique, hybride et thermique — constitue en cela un atout stratégique.

Transition managériale sous tension
La nomination de Duncan Minto à la direction générale intervient dans un contexte délicat. Le départ de Luca de Meo, officialisé en juin pour rejoindre le groupe Kering, a pris de court la gouvernance du groupe. Un mois plus tard, la succession n’est toujours pas tranchée.

Denis Le Vot (Dacia) et Maxime Picat (ex-Stellantis) figurent parmi les noms cités. Minto, fidèle du groupe depuis 1997, assure l’intérim. «Le processus suit son cours normal», a-t-il indiqué. Il devra toutefois gérer une transition complexe, entre maintien de la trajectoire industrielle et nécessité d’un redressement financier.

Une reprise sous condition
L’optimisme prudent affiché par Renault repose sur plusieurs lancements de modèles à venir et sur une adaptation à la transition énergétique européenne, marquée par une électrification du marché en dents de scie.

Si la conjoncture ne s’améliore pas pour les clients particuliers, le groupe mise sur la diversité de son portefeuille pour tirer son épingle du jeu. Mais la mission s’annonce ardue. Après une remontée spectaculaire depuis 2020, Renault est de nouveau confronté à des vents contraires. La deuxième moitié de l’année sera déterminante pour asseoir la reprise ou confirmer les fragilités structurelles du Losange.

Sami Nemli / Les Inspirations ÉCO