Investissement en Afrique : CFC casse les idées reçues
À l’occasion de la Journée mondiale de l’Afrique, Casablanca Finance City, fidèle à son engagement à promouvoir l’expertise africaine de ses membres, lance le débat autour des idées reçues sur l’avenir «prometteur» du continent africain.
Reconnue comme l’une des plus importantes places financières en Afrique et partenaire des plus grands centres financiers internationaux, Casablanca Finance City (CFC) a lancé hier mardi une émission «originale» sur les opportunités d’affaires en Afrique après le passage de la crise sanitaire. Au programme : les témoignages de nombreux experts et investisseurs marocains et internationaux.
Diffusée sur Internet, le rendez-vous intitulé CFC Talks-Africa Day a pour ambition d’apporter un éclairage nouveau sur les opportunités et défis de l’Afrique dans les domaines des infrastructures, de la transformation digitale ou encore de la finance verte, et ce, dans un contexte post-Covid-19 où la place financière marocaine entend jouer, avec ses entreprises membres, un rôle clé dans le déploiement des plans de redressement.
Ont pris part au premier tour de table de ces échanges Philippe Miquel, directeur général d’Engie North Africa, Raza Hasnani, directeur des investissements en infrastructure d’Africa50, et Mohammed Rachid, directeur du secteur financier et des affaires institutionnelles à Casablanca Finance City Authority. Ils ont été suivis par d’autres chefs d’entreprise ou acteurs clés sur le continent.
«L’Afrique est un ensemble de pays aux profils différents»
Tour à tour, ces «African believers» ont axé leurs prises de parole sur le potentiel de l’Afrique dans l’objectif de changer la perception qu’ont les investisseurs du continent en proposant un regard positif sur les réalités africaines, et cela, sans faire l’impasse sur les challenges que doit relever l’Afrique. À ce propos, pour Mohammed Rachid, la pire erreur que font souvent les investisseurs étrangers est de penser l’Afrique comme un seul pays. «Or, le continent africain est un ensemble de pays aux profils différents» en matière d’opportunités et de réglementations.
À cela, il faut ajouter d’autres idées reçues, telles que l’insécurité, le manque d’infrastructures et les risques du marché. Séduit par «l’énorme potentiel du continent», Mohammed Rachid est convaincu que «beaucoup d’efforts ont été faits ces dernières années» en matière d’investissement dans les infrastructures et de lutte pour le maintien de la paix. Si les infrastructures souffrent de financements encore insuffisants sur le continent, avec des besoins chiffrés de 130 à 170 milliards de dollars par an, selon la Banque africaine de développement (BAD), des secteurs clés attirent de plus en plus de financements, tels que l’électricité, les TIC ou certains segments des transports comme les ports et aéroports.
En effet, les sommes investies dans ces secteurs très prometteurs en Afrique ont dépassé pour la première fois les 100 milliards d’euros en 2018, en hausse de 24% sur un an, selon le dernier rapport annuel du Consortium pour les infrastructures en Afrique (ICA) sorti fin 2019 et qui fait autorité. Abondant dans le même sens, Raza Hasnani est convaincu que le continent africain est le meilleur endroit où investir, notamment avec l’émergence d’une nouvelle classe moyenne et la hausse du pouvoir d’achat des Africains.
«Nous voyons beaucoup d’opportunités dans les secteurs tels que l’énergie et les transports ainsi que les secteurs émergents comme ceux de l’information et de la communication, la finance et les nouvelles technologies, la santé et l’éducation», explique-t-il.
Les secteurs porteurs en Afrique
Ces deux derniers secteurs, traditionnellement réservés aux capitaux publics, attirent de plus en plus d’investisseurs privés, tant la demande est forte avec le développement, en Afrique, d’une nouvelle classe moyenne de plus en plus exigeante. Un avis largement partagé par Philippe Miquel, pour qui l’Afrique demeure une région économique où il fait bon investir, ayant la croissance la plus forte dans le monde. Toujours selon le patron d’Engie North Africa, les énergies renouvelables et les infrastructures sont des secteurs à forte valeur ajoutée et regorgent d’énormes potentialités pour les investisseurs.
De ce fait, avec un énorme potentiel pour l’énergie solaire, le continent a tous les atouts pour prendre son indépendance énergétique. Et si ce rêve devait se concrétiser, il mobiliserait beaucoup de capitaux privés comme publics. Dans ce domaine, de nombreux pays africains se sont déjà distingués. C’est le cas du Sénégal qui, après avoir misé sur le renouvelable, a réussi à augmenter considérablement sa production électrique ces dernières années.
Cependant, ce joli tableau cache malheureusement des réalités auxquelles l’Afrique est appelée à faire face. Parmi ces défis figure notamment le phénomène du djihadisme armé qui a incontestablement gagné du terrain depuis une décennie en Afrique de l’Ouest, au Sahel, autour du lac Tchad, dans la corne de l’Afrique et désormais en Afrique de l’Est, à la frontière entre le Mozambique et la Tanzanie, comme le rappelle l’Institut Amadeus dans l’édition 2021 de son rapport sur les Indices de la stabilité et de l’attractivité en Afrique, réalisé en collaboration avec CFC. L’autre défi majeur, c’est le recours croissant à l’endettement privé.
Entre 2010 et 2020, la moyenne de l’endettement des États africains est passée de 35% à 62%. La liste n’est pas exhaustive.
Khadim Mbaye / Les Inspirations Éco