Finances publiques : le déficit global s’aggrave, malgré la croissance des recettes

Le déficit budgétaire a atteint 54,1 MMDH à fin août 2025, s’aggravant en raison d’un solde négatif des CST et SEGMA, malgré un solde ordinaire amélioré. Les recettes brutes ont enregistré une forte croissance de 18,7%, tirées par les recettes fiscales, mais les dépenses ordinaires ont aussi augmenté de 16,5%. Ce besoin de financement accru (75,6 MMDH) est principalement couvert par un flux net positif de 25,5 MMDH de financement extérieur.
Le bulletin mensuel de statistiques des finances publiques de la Trésorerie générale du Royaume (TGR) pour le mois d’août 2025 met en exergue une aggravation continue du déficit budgétaire global, qui s’est creusé pour atteindre 54,1 MMDH, contre un déficit de 32,9 MMDH à la même période de 2024.
Cette détérioration intervient dans un contexte d’amélioration du solde ordinaire, lequel est passé d’un excédent de 12,6 MMDH à 19,7 MMDH. L’explication de ce déficit réside dans la contribution négative des comptes spéciaux du Trésor (CST) et des services de l’État gérés de manière autonome (SEGMA), qui ont collectivement affiché un solde négatif de 1,4 MMDH en 2025.
Ce chiffre contraste fortement avec le solde positif de 22 MMDH qu’ils avaient généré un an auparavant. Ce renversement des soldes a donc absorbé la performance positive du budget général, illustrant la complexité de la gestion des finances publiques où l’équilibre global dépend de multiples facteurs interdépendants.
Le besoin de financement du Trésor s’est logiquement alourdi, atteignant 75,6 MMDH, un niveau significativement plus élevé que celui de 2024. Malgré cette situation déficitaire, les recettes brutes du budget général ont démontré une amélioration continue, enregistrant une augmentation de 18,7% pour s’établir à 271,7 MMDH à fin août 2025, soit une hausse de 42,8 MMDH par rapport à 2024.
Les recettes fiscales maintiennent leur progression
Les recettes fiscales ont été le principal moteur de cette croissance, progressant de 17% pour atteindre 235,2 MMDH. L’Impôt sur les sociétés (IS) a notamment affiché une croissance de 31,3%, s’élevant à 60,440 MMDH, tandis que l’Impôt sur le revenu (IR) a augmenté de 18,3% pour atteindre 47,195 MMDH, en partie grâce à une contribution de 3,8 MMDH issue de l’opération de régularisation volontaire. Les recettes douanières nettes ont également participé à cette dynamique avec une hausse de 8,3%, et la fiscalité domestique a bondi de 20,2%.
Par ailleurs, les recettes non fiscales ont connu une augmentation de 31,2%, dopée par l’accroissement des versements des comptes spéciaux du Trésor au budget général (16,888 MMDH contre 9,671 MMDH) et la croissance des recettes de monopoles (41,8%). Cependant, l’absence de recettes de privatisation, qui avaient rapporté 1,7 MMDH en 2024, et une baisse des recettes en atténuation des dépenses de la dette ont quelque peu tempéré cette performance globale.
Du côté des dépenses, l’exécution budgétaire a été caractérisée par une augmentation de 16,5% des dépenses ordinaires, qui ont atteint 252 MMDH. Cette progression est imputable à plusieurs postes, notamment les dépenses de biens et services, qui ont crû de 18,5%. Cette catégorie inclut une augmentation de 11,6% des dépenses de personnel (118,929 MMDH) et une hausse de 30,3% des autres dépenses de biens et services, reflétant des besoins accrus en fonctionnement des administrations.
Financement extérieur : un flux net positif de 25,5 MMDH
Les charges en intérêts de la dette ont également contribué à cette augmentation, avec une hausse de 9,3%, atteignant 33,801 MMDH, principalement due à l’accroissement des intérêts sur la dette intérieure. Un point notable aussi est le recul de 19,2% des émissions au titre de la compensation, qui se sont établies à 6,5 MMDH, suggérant une rationalisation ou une évolution favorable des prix des produits subventionnés.
À l’inverse, les remboursements, dégrèvements et restitutions fiscaux ont bondi de 37,4%, pesant lourdement sur le budget général et soulignant l’impact persistant des arriérés de TVA (32,8 MMDH fin 2024) et des demandes de restitution de l’IS (3,5 MMDH fin 2024).
Parallèlement, les dépenses d’investissement ont progressé de 7,3%, pour atteindre 72,384 MMDH, témoignant de la volonté de l’État de maintenir un niveau élevé d’investissements publics. Le défi posé par l’augmentation du déficit global a conduit le Trésor à intensifier ses efforts de financement. La stratégie a privilégié le financement extérieur, qui a généré un flux net positif de 25,5 MMDH, marquant un contraste frappant avec le flux net négatif de 5,4 MMDH enregistré en août 2024.
Cette performance s’explique par une augmentation substantielle des tirages, qui ont atteint 41 MMDH (contre 21,8 MMDH l’année précédente), principalement grâce aux opérations sur le marché financier international (20,9 MMDH) et aux financements de la BIRD (10 MMDH). Parallèlement, les amortissements de la dette extérieure ont diminué.
Le financement intérieur a également contribué de manière significative, s’élevant à 50,2 MMDH, un montant comparable à celui de 2024 (50,6 MMDH). Cependant, il est à noter une diminution des adjudications nettes (30,4 MMDH contre 51,1 MMDH), compensée par une hausse des dépôts au Trésor (+5,456 MDH). L’encours de la dette intérieure a ainsi crû de 4,2% pour atteindre 786,5 MMDH. La gestion des disponibilités du Trésor auprès de Bank Al-Maghrib a également montré une baisse de 3,6 MMDH.
Yassine Saber / Les Inspirations ÉCO