Amnistie fiscale : c’est le moment d’en profiter !
À l’heure où le projet de loi de Finances 2021 fait couler beaucoup d’encre, voici un sujet qui passe à la trappe. Attention, certaines dispositions de la loi de Finances 2020 vont expirer d’ici le 15 décembre. C’est le moment d’en profiter.
Il ne reste pas plus de vingt jours ouvrables aux contribuables, ciblés par les amnisties fiscales prévues par la loi de Finance 2020, pour régulariser leur situation. Il s’agit notamment du cash non déclaré, des activités informelles, des avoirs à l’étranger, des chèques en bois ou encore des revenus locatifs. Concernant ces derniers, il est proposé de faire une déclaration rectificative sur la base des revenus fonciers encaissés de 2018, à condition de les déclarer correctement en 2019. Pour ces contribuables, l’administration «ferme les yeux» sur les revenus non déclarés en 2016 et 2017. L’occasion leur est donnée, jusqu’au 15 décembre prochain pour faire table rase et repartir sur une situation complètement apurée.
Par ailleurs, d’autres amnisties voient leur échéance de régularisation fixée au 31 décembre. Les contribuables peuvent régulariser leur situation de deux manières. La première option concerne ceux faisant partie d’une fédération ou association professionnelle bénéficiaire d’une convention collective. Dans ce cas, il faudra s’acquitter d’un montant libératoire négocié à l’avance. En effet, plusieurs organisations professionnelles ont pu négocier directement avec l’administration des impôts des montants libératoires à payer pour leurs adhérents. Parmi elles figurent la Fédération nationales des promoteurs immobiliers (FNPI), l’Ordre des pharmaciens, l’Ordre national des ingénieurs géomètres topographes, l’Ordre des architectes. La deuxième option qui s’offre aux contribuables est d’entrer directement en contact avec l’administration fiscale, via le site des services des impôts en ligne (SIMPL), et d’adresser une demande d’état d’irrégularité. La demande est totalement digitalisée. L’administration procèdera ensuite aux recoupements, croisements et vérifications d’informations nécessaires, afin d’identifier les incohérences ou irrégularités constatées sur la base des états déclarés.
«Il faut obtenir toutes les pièces financières justificatives pour documenter ces irrégularités. Cette option d’amnistie fiscale ne peut pas se faire par le contribuable tout seul. Il est obligé de se faire accompagner soit d’un expert comptable, soit d’un comptable agréé», explique Badreddine Ed Dihi, expert-comptable, commissaire aux comptes, associé fondateur du Cabinet Be Advisors, président de la commission juridique et fiscale du Club des dirigeants du Maroc.
L’ordre des experts comptables a produit une note technique, début janvier dernier, pour savoir comment traiter ces interventions, avec une lettre de mission et un modèle de rapport. L’idée est de produire une note explicative de l’ensemble des points, et de rapprocher l’ensemble des parties sur le montant de l’impôt à payer. Pour le contribuable, l’enjeu est d’être dispensé d’un contrôle fiscal. «La mesure est ouverte même aux entreprises qui ont un contrôle fiscal en cours, à condition qu’elles n’aient pas encore reçu leur première lettre de notification», précise Badreddine Ed Dihi. La mesure d’amnistie a été mise en place pour cibler le maximum de contribuables. Elle ne concerne pas seulement les sociétés soumises à l’IS, mais également les personnes physiques soumises à l’impôt sur le revenu professionnel. Plusieurs impôts sont concernés, notamment les droits d’enregistrement, les retenues à la source, l’IS, la TVA, la taxe sur les contrats d’assurances. Selon l’administration fiscale, le paiement de la contribution libère les personnes concernées des amendes et majorations y afférentes. Ces personnes ne feront en plus l’objet d’aucune poursuite administrative ou judiciaire. Les sociétés en cessation d’activité sont exclues de cette amnistie.
À titre de rappel…
La loi de Finances 2020 a introduit cinq amnisties fiscales. La première porte sur les revenus fonciers. Celle-ci cible les personnes physiques qui n’ont jamais déposé de déclaration. Un prélèvement libératoire de 10% leur est appliqué sur les revenus fonciers encaissés. Une autre amnistie s’applique aux chèques en bois. Pour les contrevenants, la loi de Finances 2020 a instauré une contribution libératoire au titre des amendes relatives à ces incidents de paiement. La pénalité est plafonnée à 10.000 dirhams pour les personnes physiques et 50.000 dirhams maximum pour les personnes morales. Les disponibilités détenues par les Marocains à l’étrangers et non déclarées (avoirs, cash, liquidités), les valeurs mobilières ou un patrimoine immobilier acquis par ces disponibilités, ou encore les comptes courants d’associés et prêts accordés aux tiers, sont à déposer auprès d’une banque, pour les liquidités, ou à déclarer à l’administration fiscale, pour les autres catégories d’avoirs. La contribution libératoire à payer est égale à 5% de la valeur de ces avoirs. La régularisation est possible au plus tard le 15 décembre. Les opérateurs de l’informel qui s’identifient pour la première fois au fisc bénéficient aussi de cette amnistie. Ces contribuables sont imposés sur la seule base des revenus acquis et opérations réalisées à compter du 1er janvier 2020. Ceux qui sont soumis au régime du résultat net réel ou simplifié seront évalués et taxés en retenant une marge brute d’au moins 20%. Et, en fin de compte l’amnistie, des changes. Les avoirs et liquidités détenus à l’étranger, constitués avant le 30 septembre 2019 et déclarés entre le 1er janvier et le 15 décembre, se verront appliquer soit 10% de la valeur d’acquisition s’il s’agit de biens immeubles, de la valeur de souscription ou d’acquisition s’il s’agit d’actifs financiers, valeurs mobilières et autres titres de capital ou créances détenus à l’étranger. Les avoirs liquides en devises, rapatriés au Maroc et déposés dans des comptes en devises ou en dirhams convertibles, sont imposés à 5% de leur montant. Les liquidités en devises rapatriées au Maroc et cédées sur le marché des changes contre le dirham sont imposées à 2%. Pour bénéficier de cette amnistie, il faut, outre le paiement de la contribution libératoire et le dépôt d’une déclaration auprès d’une banque, céder au moins 25% des liquidités en devises sur le marché des changes.
Modeste Kouame / Les Inspirations Éco