Financements climat : un gap de 480 MMDH sur la CDN
La Caisse de dépôt et de gestion et l’Agence française de développement ont présenté le 1er panorama des financements climat au Maroc. Il en ressort que le rythme des investissements est très en deçà des objectifs escomptés. Le gap se situerait déjà à 480 MMDH dans la réalisation de la CDN entre 2011 et 2018.
La version intermédiaire du 1er panorama des financements climat au Maroc, dressant l’état des flux investis dans des projets climatiques entre 2011 et 2018, a été présentée lors d’un webinaire organisé par la Caisse de dépôt et de gestion (CDG) et présidé par son directeur général, Abdellatif Zaghnoun, et par Rémy Rioux, directeur général de l’Agence française de développement (AFD). Ont également pris part à ce webinaire, Mohamed Benyahya, secrétaire général du département de l’Environnement, Tayeb Amegroud consultant, Said Mouline, directeur général de l’Agence marocaine pour l’efficacité énergétique, Mbarka Bouaida, présidente de la Région Guelmim-Oued Noun, Mustapha El Habti, gouverneur directeur des réseaux publics locaux, Mounssif Aderkaoui, directeur des études et des prévisions financières, au sein du ministère de l’Économie, des finances et de la réforme de l’administration, Mihoub Mezouaghi, directeur du bureau Maroc de l’AFD, et Hamid Tawfiki, administrateur directeur général de CDG Capital. Lors de ce webinaire, Abdellatif Zaghnoun a fait remarquer que le rythme des investissements pour le climat au Maroc était très en deçà des objectifs escomptés, affichant un gap de 60 MMDH/an, soit 480 MMDH entre 2011 et 2018.
En effet, le directeur général de la CDG a indiqué que «pour la réalisation de sa Contribution nationale déterminée (CDN), le Maroc avait besoin d’investir 74 MMDH/an, or le royaume n’est parvenu à investir que 14 MMDH/an entre 2011 et 2018».
Abdellatif Zaghnoun a également mentionné la prédominance des projets d’atténuation avec 80% du total investi, dont 38% dédiés aux investissements en énergie renouvelable. Il a également profité de l’occasion pour rappeler que la CDG a pris un certain nombre d’engaments pour la promotion de l’économie et de la finance durable au Maroc, notamment à travers un partenariat avec le Think Tank français I4CE, dont l’objectif est de mener une action de soutien méthodologique au profit de la caisse pour la réalisation de ce panorama. Le premier engagement pris par la CDG consiste à prendre en compte les enjeux climatiques dans les orientations stratégiques et décisions de financement de la Caisse, le deuxième fait état du lancement d’une campagne de mesure de réduction de 20% de la consommation énergétique des filiales de la CDG, et le troisième mentionne une volonté de contribuer aux objectifs du Maroc en matière d’efficacité énergétique, souligne la même source. Pour sa part, Benoît Leguet, directeur général du Think Tank I4CE, n’a pas manqué de souligner l’utilité de publier des chiffres précis pour animer la réflexion et le débat publics, et promouvoir le dialogue entre les différentes parties prenantes. À ce propos, Benoît Leguet a aussi salué l’initiative de la CDG à élaborer ce qu’il appelle un «outil de pilotage de transition vers une économie bas carbone et résiliente au changement climatique». Il a également indiqué que le Think Tank I4CE avait apporté toute son expertise au Maroc, en vue d’accélérer le processus d’élaboration et de partir sur de bonnes bases pour la mise en place du panorama des financements climat au Maroc.
De son côté, Rémy Rioux, directeur général de l’AFD, estime qu’au-delà du financement, il est nécessaire de capter, d’orienter et de transformer les investissements en projets climat tout en développant des compétences techniques, notamment en matière d’ingénieries qui peuvent être partagés entre l’ensemble des acteurs concernés. Il a également insisté sur l’importance des institutions financières capables de mobiliser l’épargne et d’accompagner les acteurs financiers privés, à même de construire des marchés assurant le financement de l’économie verte. Rémy Rioux considère que si l’importance de la crise actuelle engage une dimension quantitative des systèmes d’appui de transformation de l’épargne en investissement, elle nécessite aussi d’apporter des réponses aux enjeux qualitatifs. Enfin, le directeur de l’AFD a indiqué que le Maroc était le premier pays d’intervention de l’Agence, avec pas moins de 450 millions d’engagements chaque année. Et d’ajouter que 60% des financements de l’Agence au profit du Maroc sont destinés au domaine climatique.
Chiffres clés
Le 1er panorama des financements climat au Maroc, élaboré par la CDG, constitue un outil de pilotage et de suivi des objectifs climatiques du royaume. Il dresse le bilan des flux financiers investis dans des projets climatiques d’adaptation et d’atténuation entre 2011 et 2018. Il ressort de ce panorama que le Maroc a injecté 111,5 MMDH, sur la période 2011-2018, dans les secteurs de la production de l’énergie centralisée, des transports et les projets d’adaptation essentiellement dans le secteur agricole. Les acteurs publics marocains ont généré 5,6 MMDH d’investissement climat par an, soit 40% des investissements climats du pays. Quant aux financements climat, 74% ont été mobilisés au total, directement ou indirectement, par les acteurs publics marocains. Selon les conclusions du panorama, l’essentiel des investissements a porté sur la production des énergies renouvelables, les infrastructures des transports en commun, l’agriculture et la gestion de l’eau. Par ailleurs, le secteur privé a contribué à hauteur de 60% à l’ensemble des investissements climat en tenant compte de la commande publique. En dehors de cette dernière, le taux est de 23%, indique le panorama. Enfin, les bailleurs de fonds internationaux ont contribué au financement des investissements climat au Maroc à hauteur de 6 MMDH par an, soit plus de 43%. Quant aux secteurs de l’énergie et du transport, ils ont attiré plus de 90% de ces financements.
Mariama Ndoye / Les Inspirations Éco