« Une affaire familiale »

«Cela fait longtemps que nos amis nous demandent de revenir parmi eux, pour que le Maroc retrouve sa place naturelle au sein de sa famille institutionnelle. Ce moment est donc arrivé», a déclaré le roi Mohammed VI dans un message adressé au 27e sommet de l’UA qui s’est ouvert le 17 juillet à Kigali.

Le moment est sans doute venu d’en finir avec une politique de la chaise vide qui ne pourra plus être considérée comme efficace pour de multiples raisons. 

Le moment est sans doute venu d’adopter une nouvelle stratégie diplomatique qui consiste à «guérir un corps malade de l’intérieur». Le Maroc est, en clair, définitivement décidé à gagner la bataille de l’intérieur. À la grande surprise de nombreux observateurs, le Maroc ne demande pas clairement l’exclusion du Polisario de l’UA comme condition sine qua non à son intégration dans cette institution. Il ne pose tout simplement pas de condition, sinon celle de voir les membres de l’UA considérer et prendre note de la «blessure» causée par cette inclusion du Polisario dans l’institution et, par là même, de l’atteinte portée à l’intégrité territoriale de toute une Nation.

Aujourd’hui, le Maroc formule tout simplement sa volonté de retrouver une place légitime et naturelle à plus d’un égard, un peu comme un membre d’une famille qui a dû s’éclipser un temps pour un différend que le temps a contribué à apaiser, sans pour autant le régler.

Approche «technique»

L’heure est justement venue de régler ce «différend» en discutant au sein de notre famille africaine. La majorité de nos pays frères (plus d’une trentaine) est convaincue de la cause que le Maroc défend, celle d’une intégrité territoriale inconditionnelle, tandis que d’autres expriment encore des doutes, et c’est en s’attablant avec eux et en apportant des réponses concrètes à ces doutes que le Maroc compte mener cette bataille.

Pour ce faire, notre diplomatie semble aujourd’hui s’inscrire, s’agissant de ce dossier précis du Sahara, dans une approche plus «technique». La réintégration du Maroc dans l’UA est en soi une décision aussi bien stratégique qu’historique à travers laquelle il faut lire et distinguer un style particulier qui rompt avec une politique de la chaise vide dont l’efficacité s’est effritée en l’espace de 32 ans. Par technicité, il faut entendre les arguments avancés, l’approche adoptée et le nouveau visage qui se dessine de la diplomatie marocaine qui sera définitivement plus offensive sur le continent africain, consciente que c’est là que tout va se jouer. En d’autres termes, notre pays a décidé de gagner en efficacité. L’efficacité, le Maroc veut en faire montre en avançant des arguments «scientifiques» sur «l’anomalie que constitue la présence du Polisario dans l’UA.

Comment le Polisario peut-il siéger dans une organisation aussi crédible que l’UA sans pour autant présenter tous les prérequis? Autrement dit, comment le Polisario peut-il être considéré par l’UA comme un État au moment où la communauté internationale ne le considère ni «officiellement», ni «officieusement», comme tel ? «L’Union africaine n’est-elle pas en contradiction évidente avec la légalité internationale?», s’interroge le roi Mohammed VI, notant que «ce prétendu État», comme il le qualifie, n’est membre ni de l’ONU, ni de l’Organisation de la coopération islamique (OCI), ni de la Ligue arabe.

Abattre de nouvelles cartes minutieusement sélectionnées, qui de plus viennent annuler dans le fond des positions hostiles au Maroc basées sur des fondements contraires mêmes aux positions internationales: c’est là une approche qui laisse aujourd’hui entendre un nouveau cap franchi par le Maroc. Il faudra donc batailler de l’intérieur, batailler bien, intelligemment, vigoureusement mais batailler pour arracher un droit: celui de voir reconnaître son intégrité territoriale par le monde entier, à commencer par sa propre famille: l’Afrique. Telle une véritable affaire familiale…