Edito. Moins de poisson, plus de défis

Les chiffres s’accumulent, les filets se vident, et, pourtant, rien ne change vraiment. Le secteur de la pêche côtière et artisanale enregistre, une fois de plus, une baisse préoccupante de ses prises : -16,7% au premier semestre, -11% à fin août. Et dans les ports comme sur les marchés, alors que le poisson se raréfie, ses prix restent désespérément élevés pour la majorité des ménages.
Ce décalage entre l’offre réelle et les prix pratiqués illustre un effet ciseau cruel. Le consommateur peine à accéder à un produit de base de l’alimentation nationale, tandis que le petit pêcheur, lui, subit la baisse des volumes sans en récolter les bénéfices.
Certes, des efforts sont en cours. Le plan d’action 2025 de l’Office national des pêches mise sur la modernisation des halles, la digitalisation des ventes, l’efficacité énergétique ou encore la traçabilité des produits.
Autant de chantiers importants, nécessaires même, pour structurer durablement la filière. Mais ces avancées technologiques ne peuvent à elles seules compenser la baisse des ressources halieutiques. Que vaut une halle aux poissons moderne si les quais restent vides ? Que pèse la digitalisation quand le poisson devient un luxe ? Sans une politique ferme de protection des stocks, sans un contrôle rigoureux de la pêche industrielle – notamment celle opérée par des chalutiers suréquipés, souvent étrangers –, toutes ces modernisations risquent de n’être que des vitrines. Il est temps de sortir de cette logique à court terme.
Le vrai progrès, aujourd’hui, ne se mesure pas uniquement en milliards de dirhams de chiffre d’affaires ou en barques modernisées. Il se mesure aussi – surtout – à la capacité du pays à préserver ses ressources marines, à garantir une pêche équitable, à protéger les petits métiers qui font vivre des milliers de familles.
Meriem Allam / Les Inspirations ÉCO