Edito. Incomplète avancée

Deux ans après l’entrée en vigueur de la loi 69.21, l’amélioration des délais de paiement est bien visible, en particulier dans la commande publique. Le secteur étatique enregistre un délai moyen stabilisé à 18 jours, loin du plafond réglementaire de 60 jours. Les établissements publics suivent, avec un recul significatif depuis 2018.
La mécanique institutionnelle fonctionne, et les réformes engagées produisent des effets. Bien que salutaire à bien des égards, cette avancée reste incomplète puisqu’elle n’atteint pas les Très petites entreprises (TPE) qui constituent une partie essentielle du tissu économique. Le tout récent rapport de l’Observatoire national le souligne sans détour.
Les TPE subissent les délais clients les plus longs (130 jours) tout en réglant leurs fournisseurs plus rapidement (83 jours). Devenant de facto, à leur modeste échelle, les «banques» de sociétés bien plus grandes. Cette position les place dans une situation déséquilibrée, pouvant tout simplement conduire à la faillite dans de nombreux cas.
Le paradoxe est flagrant. Celles qui incarnent la majorité des entreprises actives (plus de 95%) restent les plus vulnérables, en dépit d’un cadre législatif renforcé et de la mise en place de sanctions. Le texte existe, mais son effet reste segmenté. Les grandes entreprises et certaines PME s’ajustent. Les TPE, elles, continuent d’absorber les tensions du système.
Justement, dans le secteur privé, les délais se contractent lentement. En 2023, ils atteignent encore 125 jours côté clients et 85 jours côté fournisseurs. La progression est réelle, mais inégale. Elle reflète un changement partiel de culture contractuelle, encore marqué par des inerties anciennes.
Là où l’État semble avoir intégré la contrainte réglementaire dans ses pratiques, le privé avance avec prudence, parfois à contretemps. Il faudra désormais aller plus vite !
Moulay Ahmed Belghiti / Les Inspirations ÉCO