Maroc

Souveraineté alimentaire : le Maroc en phase de recul ?

Après plusieurs années fastes sur le plan agricole, dues à la mise en œuvre du Plan Maroc Vert, le Royaume se trouve actuellement dans l’obligation de devoir gérer une baisse inquiétante de ses rendements agricoles et un risque de raréfaction de ses ressources halieutiques. Une donne susceptible de remettre en cause les acquis de plusieurs politiques en la matière, notamment celle dite de «substitution aux importations».

Le Maroc est-il, dans un proche avenir, menacé par la pénurie de certains produits essentiels, ou risque-t-il de recourir, pour un bon moment encore, aux importations pour combler la baisse de sa production ? Voilà des questions qui paraissent très alarmistes, mais à y voir de plus près, l’on est en droit de se les poser dès à présent. Et pour cause, le Royaume se retrouve subitement en position de faiblesse ou de risques, sur des secteurs qui constituaient, jusqu’à très récemment, des points forts : l’agriculture et les produits halieutiques.

Dans l’agriculture, la succession de six années de sécheresse a posé deux gros problèmes que sont, d’une part, la raréfaction des ressources hydriques, avec un taux de remplissage des barrages de moins de 30% depuis deux ans, et d’autre part, une baisse sensible de la production agricole, en plus d’un cheptel décimé.

Rendement agricole en baisse
À titre d’illustration, la dernière campagne agricole a été marquée par une baisse de 43% de la production céréalière, à seulement 31,2 millions de quintaux, obligeant l’État à augmenter les quotas d’importation de cette denrée de base dans l’alimentation des ménages.

Plus inquiétant encore, la production d’huile d’olive a considérablement chuté. Elle devrait s’établir, cette année encore, à des niveaux inquiétants, puisque même dans les prévisions du ministère de l’Agriculture, on s’attend à un repli de 11% de la production d’olives par rapport à l’année dernière, et de 40% par rapport aux saisons normales. Ajoutez-y le cheptel national, décimé par la sécheresse… Autant de constats qui font que l’on se demande, cette année encore, comment l’État va gérer la demande lors du prochain Aïd Al Adha.

D’ailleurs, dans la Loi de finances 2025, des exonérations fiscales importantes ont été prévues sur les importations de bovins et autres ovins destinées à la consommation, afin d’éviter une pénurie et de contenir la flambée des prix.

Pour l’heure, il faut malheureusement constater que l’objectif n’est pas encore atteint sur les marchés, et ce, sans parler de l’indisponibilité des viandes ovines dans certains lieux de vente. Tout ceci pour dire que le secteurde l’agriculture et de l’élevage souffre profondément en raison, principalement, de la sécheresse persistante. Hélas, la rareté des ressources hydriques touche aussi un autre secteur tout aussi stratégique, celui de la pêche.

Ressources halieutiques en déclin
Selon les statistiques de l’année 2024, publiées par l’Office national des pêches (ONP), les produits commercialisés de la pêche côtière et artisanale ont enregistré, en termes de valeur, une croissance de 6%, à plus de 10,54 MMDH.

Cependant, le volume de ces produits s’est établi à 1,33 millions de tonnes, en repli de 1% par rapport à 2023. Si sur la côte atlantique, on n’a enregistré q’une très légère baisse de 1% des débarquements, la situation est plus préoccupante pour les ports en Méditerranée, avec une diminution de 17% des débarquements de pêche, malgré une hausse globale de la valeur marchande des produits.

Pour les professionnels de ces secteurs, on est conscient que la surpêche pose le problème de la viabilité et de la disponibilité des ressources. Une situation que ne devrait pas occulter le chiffre d’affaires à l’exportation – d’environ 31 MMDH en 2023, pour un volume total de 847.000 tonnes – réalisé par les activités industrielles de la pêche maritime. Il se trouve que dans les marchés, le poisson devient plus difficile à trouver pour les consommateurs locaux. Pour une bonne partie des ménages, c’est même devenu un produit hors de portée.

Substitution aux importations
Pourtant, si l’on combine les résultats du Plan Maroc Vert à d’autres politiques menées ces dernières années par les différents gouvernements, il se dégage le sentiment que l’État avait essayé d’assurer une certaine souveraineté à l’économie nationale.

C’est le cas, par exemple, de la fameuse politique de substitution aux importations initiée par l’ancien ministre de l’Industrie et du Commerce, Moulay Hafid Elalamy. Une dizaine de conventions avaient concerné les secteurs de l’agroalimentaire, de l’industrie laitière, ou encore de la pêche, pour environ 1 MMDH. Sauf que là, c’est la matière première elle-même qui commence à manquer, à savoir la production agricole, en raison de la sécheresse, ou le poisson, du fait de la surexploitation des ressources halieutiques. Une autre manière de dire que, contrairement à ce que l’on peut croire, l’impact négatif du changement climatique est bien réel sur les performances de l’économie marocaine.

Avec les différents chantiers entrepris dans le cadre du Programme national d’approvisionnement en eau potable, l’espoir demeure cependant pour un début de rattrapage dès 2027.

Abdellah Benahmed / Les Inspirations ÉCO



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