SDR Drâa-Tafilalet : un statu quo qui grève l’essor du tourisme
En dépit de l’approbation, le 28 décembre 2021, par les membres du Conseil régional de Drâa-Tafilalet, de la création de la Société de développement régional de tourisme – qui devra piloter le Schéma de développement touristique de Drâa-Tafilalet et le contrat d’application régional du tourisme – ce mécanisme de gouvernance et d’exécution n’est toujours pas activé. Or, son statut principal a déjà été signé par l’ensemble des parties prenantes, il y a plusieurs années. Détails.
Au moment où les deux pôles touristiques du Royaume, Marrakech et Agadir, continuent de capter plus de 60% des flux touristiques tant en termes d’arrivées que de nuitées, d’autres destinations, qui devraient bénéficier de la reprise actuelle touristique, peinent toujours à retrouver leur dynamique d’avant-crise, notamment la région de Drâa-Tafilalet. De ce fait, l’épineuse question des disparités régionales, qui continuent de persister au sein de l’activité touristique, est plus que jamais d’actualité.
Selon Zoubir Bouhoute, expert et analyste du secteur touristique, «la destination d’Al Haouz, bien que ravagée par un séisme dévastateur, est parvenue à reprendre son activité en bénéficiant de la dynamique touristique de Marrakech. Elle a ainsi enregistré 700.000 nuitées durant les dix premières mois de l’année 2024, ce qui représente le double de ce qui été cumulé par la région de Drâa-Tafilalet, laquelle englobe cinq provinces aux potentialités touristiques avérées».
Durant la même période, les deux destinations phares du Royaume, à savoir Marrakech et Agadir, ont enregistré, respectivement, 8,43 et 5,49 millions nuitées. Une situation qui interpelle non seulement sur la nouvelle feuille de route touristique, mais aussi sur les programmes de développement régional (PDR) institués par la loi organique n° 111-14 relative aux régions. Pour rappel, le développement touristique est une compétence partagée entre la Région et l’État dans le cadre du principe de décentralisation/déconcentration.
La SDR Drâa-Tafilalet : un projet mort-né ?
Au sein de la région de Drâa-Tafilalet, dont le contrat d’application régional a été scellé en mai 2024, en vue d’accueillir 400.000 touristes d’ici 2026, la pièce maîtresse, à savoir la Société de développement régional du tourisme (SDRT), peine toujours à être activée. Sa finalité était d’accélérer le déploiement régional de cette Feuille de route 2023-2026 En effet, trois ans après la signature du statut principal de cette SDR, l’entité n’est toujours pas opérationnelle, ce qui grève le développement touristique de la région qui a pris du retard par rapport aux autres destinations.
Pour rappel, les membres du Conseil régional de Drâa-Tafilalet ont légalement entériné la création de la SDRT à l’issue de la session extraordinaire, tenue à Errachidia le mardi 28 décembre 2021. Cette démarche juridique a été suivie par les signatures de la wilaya de la région de Drâa-Tafilalt, du ministère du Tourisme, de l’Artisanat et de l’Économie sociale et solidaire, en plus de la Société marocaine d’ingénierie touristique (SMIT).
De ce fait, la région a été le second territoire à avoir eu recours, à l’époque, à l’article 145 de la loi organique relative aux régions. Elle avait en effet bénéficié de l’expérience acquise au sein de la région Souss-Massa englobant actuellement deux SDR touristiques déjà opérationnelles.
Parallèlement, la région a validé, à la même date, une convention multipartite de mise en œuvre du Schéma de développement touristique (SDT) de Drâa-Tafilalet d’environ 1,4 MMDH dans le cadre du PDR.
Ce schéma, qui a précédé la signature du contrat d’application régional, ambitionne de doubler le nombre de visiteurs nationaux et internationaux d’ici 2030 au sein de la région, et d’augmenter la durée moyenne de séjour (DMS) à 2,5 jours. Le but étant de faire émerger une destination basée sur l’écotourisme au Maroc en y développant un produit «désert & nature» qui représente la centralité de l’offre touristique régionale autour duquel graviteront d’autres positionnements complémentaires destinés à enrichir l’offre et l’expérience proposées.
Activation de la SDR : un énorme retard
De l’avis de Zoubir Bouhoute, expert et analyste du secteur touristique, «la SDR qui devrait piloter les différents programmes et projets peine toujours à se concrétiser pour des raisons inconnues, chose qui interpelle la région par rapport à l’activation de ce mécanisme de développement touristique». Ce dernier devrait être créée sous forme de société anonyme de droit privé alors que la région Souss-Massa offre déjà un benchmark complet de la configuration juridique de ce mécanisme d’exécution.
En effet, le tourisme est un secteur économique qui entre dans le champ des compétences de la région en vertu de l’article 145 de la loi organique n° 111.14.
Par ailleurs, il est à signaler que le contrat d’application de Draa-Tafilalet est composé de 15 projets axés sur la filière Desert & Oasis afin de mettre en avant le produit de la région mêlant Désert, Oasis et Montagne qui constituent la marque territoriale et le positionnement de la région.
En attendant le déblocage de cette situation, les projets qui composent la feuille de route régionale avancent puisque la SMIT a déjà lancé certains projets. Il s’agit, notamment, du théâtre d’Ouarzazate et de ses places d’animation en plus des études afférents à la mise en valeur touristique des gorges de Toudgha.
Yassine Saber / Les Inspirations ÉCO