Maroc

Samir : le gouvernement appelé à revoir sa position

Six propositions de lois visant la cession des actifs de la Samir à l’État sont déposées dans les deux chambres du parlement. Le gouvernement, qui s’est déjà prononcé sur trois de ces textes, écarte l’option de la nationalisation de la raffinerie de pétrole. Le Front national pour la sauvegarde de la raffinerie marocaine de pétrole critique vertement la position gouvernementale. L’ouverture d’un débat s’impose.

La résolution du dossier de la Samir pourrait-elle être d’ordre législatif ? C’est, en tout cas, ce que pensent plusieurs observateurs ainsi que le Front national pour la sauvegarde de la raffinerie marocaine de pétrole. Cette conviction s’est traduite par le dépôt, jusque-là, de six propositions de lois par quatre partis politiques et deux syndicats. Il s’agit des groupes parlementaires de l’USFP, de la CDT et de l’UMT à la Chambre des conseillers et de ceux du PPS et de l’Istiqlal ainsi que les deux députés de la Fédération de la gauche démocratique (FGD) à la Chambre des représentants. Les six initiatives législatives visent la cession des actifs de la Samir à l’État. On estime en effet que l’État pouvait facilement procéder à la résolution de ce dossier compte tenu du fait qu’il est le principal créancier de la Samir. Aussi, la cession des actifs de la raffinerie à l’État est-elle une solution avantageuse et permettra-t-elle enfin de voir le bout du tunnel ? Le gouvernement ne semble pas être du même avis. L’Exécutif a, en effet, déjà notifié officiellement à la Chambre haute son refus des propositions de lois des groupes de l’USFP, de la CDT et de l’UMT. Les trois textes déposés à la Chambre basse sur le même dossier subiront certainement le même sort. Les parlementaires fustigent la position du gouvernement sur ce dossier sensible.

Nationalisation : une option écartée
Contacté par Les Inspirations ÉCO, le coordinateur du groupement parlementaire de la Confédération démocratique du travail, Mbarek Sadi, déplore le manque de volonté de la part du gouvernement de résoudre l’affaire de la Samir. Le groupement de la CDT attend la réponse du chef de gouvernement suite à une lettre dans laquelle il est expressément demandé à El Otmani de justifier le rejet de sa proposition de loi. Pour l’Exécutif, la nationalisation de la Samir est une option écartée. Le ministre de l’Énergie, des mines et de l’environnement, Aziz Rabbah, a déjà souligné aux Inspirations ECO que «la reprise de la Samir par l’État n’est pas considérée comme une solution, car le marché est devenu libre à la concurrence des intervenants et le dossier est entre les mains de la justice». La vente de la raffinerie au privé est, ainsi, considérée par le gouvernement comme la seule option pour résoudre ce dossier. L’Exécutif s’attend à ce que l’investisseur qui reprendra la société négocie les conditions de la reprise avec toutes les parties concernées (prix, part de marché, rééchelonnement de la dette, abandon d’une partie de cette dette…). Toutefois, les parlementaires et le Front national pour la sauvegarde de la raffinerie marocaine de pétrole ne voient pas les choses de la même manière.

Le Front reproche au gouvernement d’avoir rejeté l’idée même de discuter en séance plénière de la Chambre des conseillers les deux propositions de loi élaborées par le Front national pour la sauvegarde de la raffinerie marocaine de pétrole, puis soutenues et présentées par plusieurs formations politiques et organisations syndicales». L’Exécutif est vertement critiqué car il a «empêché la tenue d’un débat national transparent, responsable et contradictoire au sein du Parlement». Le Front national reproche au gouvernement d’avoir adopté «une attitude passive et non coopérative dans le traitement du dossier de la liquidation judiciaire de la Samir, laissant le tribunal de commerce de Casablanca se dépêtrer seul, étant totalement désarmé face à la complexité d’un tel dossier et complètement démuni pour répondre valablement aux sollicitations des repreneurs potentiels, désireux d’obtenir un éclairage et, à certains égards, un engagement des pouvoirs publics marocains quant à leur vision stratégique du secteur des énergies fossiles sur longue période».

Une valeur en baisse
L’attentisme est pointé du doigt alors qu’il fallait mettre les bouchées doubles pour éteindre le feu qui est en train de consumer la raffinerie dont la valeur ne cesse de baisser, passant de 25 MMDH à quelque 18 MMDH. Même le coût de la remise en marche de La Samir devient de plus en plus élevé avec le temps. Il faudra actuellement entre 1,5 MMDH et 2 MMDH pour redémarrer de nouveau la production de la raffinerie. La cession des actifs de la Samir à l’État pourrait être temporaire pendant deux ou trois ans, avant de procéder de nouveau à la privatisation, comme l’avait déjà précisé le Front national. À cet égard, le gouvernement est tenu, d’une part, de bien préparer le terrain afin d’insuffler une nouvelle dynamique à la Samir et, d’autre part, de lui redonner son éclat d’antan et d’instaurer les règles de transparence et de bonne gouvernance en vue d’éviter les erreurs du passé. 

Le contrat de location en retard

Le gouvernement est critiqué sur le retard accusé en matière de conclusion du contrat de location des bacs de stockage de la société. «Ce qui est préjudiciable pour les finances publiques, les réserves de change du royaume et le pouvoir d’achat des citoyens», comme tient à préciser le Front national pour la sauvegarde de la raffinerie marocaine de pétrole. L’Exécutif est, ainsi, appelé à mener à bien le dossier d’exploitation des réservoirs de la Samir. Rappelons à cet égard que le gouvernement avait reçu l’approbation du Tribunal de commerce en la matière et a décidé de conclure un contrat avec l’Office national des hydrocarbures et des mines (ONHYM) portant sur les droits d’exploitation des réservoirs de la raffinerie. Mais ce dossier traîne encore. Un retard, expliqué par Rabbah, par la nécessité d’avoir un avis juridique pointu sur cette question.

Jihane Gattioui / Les Inspirations Éco



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