Maroc

Rentrée gouvernementale. L’eau en urgence absolue

Si le projet de loi de Finances s’invite à la table du gouvernement à chaque rentrée, cette année est un peu spéciale. La crise provoquée par le stress hydrique chamboule tout. L’accélération de la mise en œuvre des chantiers de barrages, des stations de dessalement et des autoroutes de l’eau constituent la priorité absolue. Au total, 143 milliards de dirhams d’investissements sont prévus. Au Maroc et à l’étranger, les entreprises sont déjà dans les starting-blocks.

L’accélération des projets pour répondre au stress hydrique est la priorité des priorités sur la table du gouvernement en cette rentrée, car la situation ne relève plus seulement de l’urgence, mais elle est devenue critique. Par des mesures de rationnement, un peu partout, les Marocains ressentent déjà l’effet d’une sécheresse sans précédent qui frappe le Royaume pour la sixième année consécutive. C’est du jamais-vu depuis la fin des années soixante-dix.

Selon les estimations, la dotation annuelle en eau par habitant est juste un chouia au-dessus de 600 m3, soit quatre fois moins qu’il y a 60 ans. Le gouvernement est désormais en mode «urgence absolue» pour accélérer la réalisation des projets de renforcement et de sécurisation de l’accès à l’eau. Beaucoup de cadres du ministère de l’Équipement et de l’Eau ont d’ailleurs été priés de ne pas prendre de vacances cet été, ou de les raccourcir car le temps est compté. Il faut accélérer les appels d’offres pour la construction de barrages et de stations de dessalement d’eau de mer, et achever les travaux des «autoroutes» de l’eau qui consiste à transférer de la ressource de régions excédentaires vers celles qui sont en déficit structurel.

À date, les investissements nécessaires aux projets retenus sont évalués à 143 milliards de dirhams. Dans ce gigantesque portefeuille dont la mise en œuvre s’étale jusqu’en 2027, figurent l’interconnexion des bassins hydrauliques de Sebou, Bouregreg et Oum Er-Rbia, avec la réalisation de la tranche urgente sur 67 km ; la programmation de nouveaux barrages et l’actualisation des coûts d’une vingtaine de barrages prévus, permettant ainsi d’augmenter la capacité de stockage de 6,6 milliards m3 d’eau douce ; les projets de mobilisation des eaux non conventionnelles, à travers la programmation de stations de dessalement de l’eau de mer et l’augmentation des capacités de réutilisation des eaux usées traitées et le renforcement de l’approvisionnement en eau potable du monde rural.

Chômage, une équation vraiment insoluble ?

La trajectoire de la courbe du chômage, et encore plus celle des jeunes, est une véritable épine dans le pied du gouvernement qui, à son investiture, avait promis la création de 2 millions d’emplois sur cinq ans. Les derniers chiffres du HCP (2e trimestre 2024) devraient lui faire très mal à la tête. Le nombre de demandeurs d’emploi est passé à 1,63 million, en hausse de 90.000 personnes malgré le retrait de ceux qui sont «découragés» à chercher du travail. Ainsi, le taux de chômage est passé à 13,1%, soit 0,7 point de plus. Mais en milieu urbain, et c’est le vrai baromètre, le taux de chômage s’établit désormais à 16,7%.

Le chômage frappe de plein fouet les «15-24 ans» (36,1%) où se recrutent des milliers de «NEET», les diplômés (19,4%) et les femmes (17,7%). Il semble que les nombreux dispositifs d’incitations à l’embauche ne suffisent pas à contenir la poussée du chômage des jeunes. Plus inquiétant, cette remontée du chômage laisse penser aussi que la part structurelle est en hausse. Le contraste avec le discours officiel sur le «maintien des équilibres macroéconomiques» est particulièrement saisissant.

Financer les revalorisations salariales et la couverture sociale

Les hausses des salaires concédées aux fonctionnaires en avril dernier, et plus récemment au personnel de la Santé publique, ne sont que partiellement financées. C’est le ministère des Finances lui-même qui l’assure. En ajoutant la réforme confirmée de l’IR, le coût immédiat pour le budget de l’État est estimé à 40 milliards de dirhams. Ce sont des dépenses récurrentes qu’il va falloir financer soit par des économies, soit par de la dette ou en laissant filer un peu le déficit sachant que l’objectif que se fixe le gouvernement est de 3,5% du PIB.

Pour l’instant, la seule marge de manœuvre se trouve dans la décompensation du gaz butane qui devrait rapporter entre 12 et 13 milliards de dirhams qui iront financer la généralisation de la couverture sociale et des allocations familiales.

Apaiser les tensions dans les facultés de médecine

Les vacances d’été auront servi de «trêve olympique» entre les syndicats d’étudiants des facultés de médecine et de pharmacie, et le gouvernement. Pour l’instant, la solution à ce qui apparaît d’ores et déjà comme le plus long conflit sur les campus du Royaume n’est pas à l’horizon (ndlr : le mouvement de boycott des cours, des stages et des examens a commencé le 20 décembre 2023). Au cœur de la discorde, «le manque de clarté concernant la sixième année de formation, ainsi que le retard injustifié dans la publication du cahier des charges pédagogique pour le troisième cycle», selon les organisations syndicales des étudiants.

Malgré plusieurs rounds de dialogue et l’intervention des médiateurs ainsi que quelques concessions du gouvernement sur le point concernant la durée des études, peu de progrès ont été réalisés. Les étudiants grévistes ont logiquement obtenu zéro à tous les examens qu’ils avaient boycottés. Il reste à trouver une solution pour en finir avec cette «grève de cent ans».

Abashi Shamamba / Les Inspirations ÉCO



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