Refus de visa aux pays du Maghreb : les entreprises agricoles françaises dans la tourmente
En septembre 2021, le gouvernement français annonçait le durcissement des conditions de délivrance de visas pour le Maroc, la Tunisie et l’Algérie. Cette décision s’est vite fait ressentir du côté des travailleurs saisonniers marocains et a apporté de nombreux préjudices aux entreprises agricoles françaises.
Le secteur agricole en France est en très grande pénurie de main-d’œuvre et pour pallier ces difficultés, il fait appel de manière récurrente à la main d’œuvre étrangère, particulièrement à la main d’œuvre saisonnière marocaine.
Pour introduire de la main-d’œuvre étrangère en France, il faut préalablement solliciter une autorisation de travail pour le recrutement d’étranger résidant hors de France. Les entreprises qui souhaitaient faire venir des saisonniers Marocains ont, toutes, sollicité des autorisations de travail. Le ministère de l’Intérieur a délivré les autorisations en toute légalité.
Ainsi, à partir du mois d’octobre 2021, le consulat de France à Casablanca a commencé à délivrer des décisions de refus de visas aux travailleurs saisonniers marocains, de manière totalement injustifiée, ce qui a causé de très grands préjudices aux entreprises agricoles françaises particulièrement dans le Sud-Ouest.
Le consulat évoquait les mêmes motifs dans toutes ses décisions :
Ø Il existe un risque de détournement de l’objet du visa à des fins de maintien illégal en France après l’expiration de votre ou pour mener en France une activité illicite
Ø Les informations communiquées pour justifier les conditions du séjour sont incomplètes et/ou ne sont pas fiables
Ces décisions ont fortement surpris les entreprises agricoles françaises, qui sont fortement dépendantes de cette main d’œuvre étrangère, particulièrement durant la période de la fin d’année, qui, selon l’activité, était une période cruciale de récolte, de culture, ou de vendange, etc.
Le Cabinet FB Avocat dirigé par Fatou Babou, expert en immigration et nationalité française, en droit public et droit public des affaires, a été saisi par plusieurs entreprises agricoles françaises afin d’effectuer des recours contre ces décisions de refus de visa.
« Nous avons saisi dans un premier temps, comme la procédure l’exige, la Commission de Recours contre les décisions de Refus de Visa (CRRV). N’ayant pas eu de réponse dans les courts délais, et eu égard à l’urgence de la situation, nous avons saisi le juge des référés du tribunal administratif de Nantes », souligne le cabinet FB Avocat dans un communiqué adressé à la rédaction.
« Ce dernier a refusé de suspendre les décisions de refus de visa en évoquant le moyen d’absence de doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ». Et d’ajouter : » Nous avions été assez découragés par cette décision. Cependant, nous avons continué la procédure ».
Le cabinet souligne avoir reçu les décisions de la CRRV entre le mois de mars et avril 2022 et qui confirmait les décisions du consulat en indiquant entre autres comme arguments :
• Qu’aucun contrat de travail n’avait été présenté à l’appui des demandes de visas ;
• Que les conditions de séjour et d’existence en France étaient insuffisamment justifiées
« Nous avons à cet effet saisi le tribunal administratif de Nantes en sollicitant l’annulation ces décisions de la commission des recours et par conséquent les décisions des refus de visa. Une audience s’est tenue le 12 septembre 2022, et par 23 jugements en date du 03 octobre 2022, le TA de Nantes a annulé toutes les décisions de refus de visas que nous avions contesté et a enjoint le ministre de l’Intérieur à délivrer les visas dans un délai de deux mois à compter de la notification des jugements« .
« C’est une grande victoire pour le cabinet, C’est une grande victoire pour les entreprises agricoles françaises que nous défendions et pour les travailleurs saisonniers marocains. En effet, les décisions de refus de visas qui étaient des décisions purement politiques et dépourvues de toute base légale ont causé de très nombreux préjudices aux entreprises agricoles françaises ».
« Certaines se sont retrouvées en redressement judiciaire, d’autres en liquidation judiciaire. Ces entreprises ne pouvaient ni honorer les marchés de prestation de services agricoles, ni honorer les contrats de fourniture de produits agricoles auxquels elles s’étaient engagées. Certains entrepreneurs ont même étaient victimes de dépression, de burn-out et certains travailleurs saisonniers marocains se sont désengagés du travail auprès de leurs entreprises », souligne le cabinet FB Avocat.
« Ceci pour dire que nous sommes assez confiants pour l’avenir et sommes ravis que la justice administrative française puisse faire triompher la légalité au-dessus du politique et que ces décisions rendus par le TA de Nantes démontrent encore une fois que la France est un État de droit, un pays de légalité et que face à des décisions injustifiées et illégales, les justiciables disposent de moyens juridiques pour faire valoir leurs droits », conclut le communiqué.