Maroc

Racisme : les Marocains “mal-aimés” en Espagne ?

La montée en puissance des actes racistes et xénophobes inquiète les autorités espagnoles. Toutefois, celles-ci n’entreprennent aucune mesure pour sensibiliser sur les dangers de cette atteinte à la cohabitation et le bien-vivre ensemble.

La montée en puissance des actes racistes et xénophobes inquiète les autorités espagnoles ainsi que les associations œuvrant auprès des collectifs migrants. De l’aveu même de Rocio Ruiz, la ministre régionale andalouse en charge de l’Égalité et des politiques sociales, ce phénomène s’est accentué d’une manière inquiétante dernièrement. Elle a déploré la hausse vertigineuse des cas liés au délit de racisme et de xénophobie.

De fait, la crise diplomatique entre le Maroc et l’Espagne a intensifié le sentiment d’animosité à l’adresse des travailleurs marocains résidant sur le sol espagnol. En témoigne le déplorable assassinat d’un Marocain, abattu de sang froid par un ex-militaire espagnol.

À cet effet, les tensions diplomatiques ont révélé au grand jour ce sous-jacent sentiment de rejet à l’adresse de la communauté marocaine et musulmane en général. Selon les dernières statistiques, fournies par l’office national contre les délits de haine, la police espagnole a reçu 610 plaintes rien que durant le premier semestre de cet année, en hausse de 9,3% en comparaison avec la même période de l’année dernière. Il s’agit d’un nouveau record selon les autorités espagnoles, depuis 2014, date du début de la collecte des statistiques autour de cette question.

Ce département, créé en 2018 collabore directement avec les services de la police en charge des importants dossiers liés aux délits de haine et de racisme. Ce qui interpelle dans ce rapport c’est que le mois de mai a enregistré une importante recrudescence des délits liés à la ségrégation raciale ou ethnique et la haine.

Il s’agit du mois où la crise diplomatique entre le Maroc et l’Espagne avait connu son pic de tensions. «Ce n’est pas nouveau comme constat… ce qui change c’est que la situation actuelle est tendue pour plusieurs raisons dont essentiellement la crise sanitaire et ses retombées désastreuses sur le marché du travail», explique Rachid Quaraoui, professeur de sociologie à l’université d’Estrémadure. Ajoutant que la crise diplomatique entre les deux pays a fourni l’alibi parfait aux racistes pour laisser transparaître leur haine, qui couvait.

Concernant le profil des victimes, il s’agit d’hommes âgés entre 26 et 40 ans. Ce qui correspond largement à la tranche d’âge de la communauté marocaine. «Ce n’est que la partie apparente de l’iceberg du racisme en Espagne. Les cas portés devant la police pourraient être plus importants, si les victimes connaissaient leurs droits.

Beaucoup de victimes passent sous silence ces actes car elles ne se sentent pas bien protégées pour affronter leur agresseur ou préfèrent éviter des problèmes selon leur compréhension de la chose», ajoute le professeur marocain. Pour cet expert en matière de dossiers liés à l’immigration, le racisme sélectif des Espagnols a toujours existé mais l’arrivée de partis politiques au pourvoir, qui adoptent ouvertement et sans gêne ce discours xénophobe, a libéré la parole et a donné lieu à des actes criminels ou attaques contre cette communauté marocaine, la plus importante sur le sol espagnol.

Les attaques contre les lieux de culte musulmans et les agressions physiques dont sont victimes les ressortissants marocains, témoignent de cette haine ancestrale que nourrissent certaines franges de la société espagnole à l’égard des voisins originaires du royaume, ajoute notre interlocuteur. En revanche, silence radio de la part des autorités. Mis à part quelques communiqués laconiques quand le mal est déjà fait, aucune réaction ou démarche n’est entreprise pour sensibiliser autour de cette question.

«Nous avons élaboré un programme détaillé avec des ateliers pratiques au profit des migrants œuvrant dans les exploitations agricoles et les régions à forte présence de ce collectif afin de les sensibiliser sur la gravité de ces délits et les encourager à porter plainte ; hélas les autorités ont estimé qu’il n’y a pas de budget pour le moment pour mener ce genre d’actions. C’est déplorable», confie cet acteur associatif œuvrant auprès d’une association d’intégration des migrants.

En effet, le dernier rapport espagnol a confirmé que seule une victime sur dix porte plainte. Selon ce document, dont les résultats ont été obtenus à travers un sondage, les sondés ont admis qu’elles étaient victimes de délit de haine ou de racisme, mais ignoraient que cela pourrait être punissable. 

Amal Baba Ali, DNC à Séville / Les Inspirations ÉCO


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