Le PAM veut en finir avec l’immunité des ministres
Selon la proposition de loi émanant des députés du PAM, une interprétation démocratique de la Constitution incite à imposer une responsabilité pénale des ministres devant les juridictions ordinaires, en vertu d’une procédure définie par une loi, en lieu et place de la loi organique en vigueur.
Le parti du tracteur veut en finir avec l’impunité des ministres. Le projet de loi déposé par les députés du PAM à la première Chambre du Parlement s’inspire du principe de l’égalité devant la loi, consacré par la Constitution de 2011, en ce sens que toute forme injustifiée d’inégalité entre les citoyens est appelée à disparaître, qu’il s’agisse d’immunité ou bien d’une rente politique. C’est dans le même esprit que la Constitution de 2011 a supprimé la Cour suprême, ce tribunal pénal formé d’élus des deux Chambres du Parlement qui était chargé de juger les membres du gouvernement pour des crimes commis au cours de leur mandat. Décidément, la responsabilité pénale des ministres revient aux tribunaux du royaume, d’après l’article 94 de la Constitution.
La suppression de la Cour suprême, souligne le PAM dans sa proposition de loi, a mis fin à une «justice quasi-politique» qui symbolisait à la fois l’inégalité et l’impunité. Sachant que la Cour suprême n’a jamais été activée du temps où elle existait. Mais quelles que soient les causes, poursuit-on, rien ne justifie l’inaction de la Cour suprême. L’abolition de cette forme d’inégalité devant la loi, ainsi que d’autres, renforce le choix d’en finir avec une justice d’exception, comme ce fut le cas avec la Cour spéciale de la justice, en ligne avec les recommandations de l’Instance équité et réconciliation (IER). Cela est de nature à renforcer l’indépendance du pouvoir judiciaire vis-à-vis du pouvoir politique. Un choix confirmé par le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire institué par la nouvelle Constitution.
Le PAM rappelle au passage que la suppression de la Cour suprême n’est pas quelque chose de nouveau dans l’Histoire du Maroc. Il s’agit plutôt d’un retour à une situation vécue durant la période allant de l’indépendance jusqu’à l’avènement de la Constitution de 1962. Faisant référence à l’expérience de certaines démocraties européennes, le PAM tient à distinguer entre, d’une part, les Constitutions privilégiant le choix de l’égalité en responsabilisant les ministres devant les juridictions de droit commun (Grande-Bretagne, Danemark) et, d’autre part, celles ayant maintenu le choix de l’inégalité et des privilèges (France, Portugal, Italie). Pour les députés du PAM, une interprétation démocratique de la Constitution incite à imposer une responsabilité pénale des membres du gouvernement devant les juridictions ordinaires, selon une procédure définie par une loi, en lieu et place de la loi organique en vigueur.
En effet, l’article 94 de la Constitution de 2011 stipule que les membres du gouvernement sont pénalement responsables devant les juridictions du royaume pour les crimes et délits commis dans l’exercice de leurs fonctions. La loi détermine la procédure relative à cette responsabilité. L’approche adoptée par le PAM dans la rédaction de leur proposition de loi repose sur deux principes. Le premier selon lequel les ministres seraient pénalement responsables devant les juridictions ordinaires, du moment que la Cour suprême n’existe plus. Le deuxième insiste sur la suppression de l’immunité des ministres quant aux infractions commises en dehors de l’exercice de leurs fonctions, dans la mesure où la Constitution a évoqué les crimes et les délits, tout en préservant l’immunité seulement pour les infractions en lien avec leur mandat de ministre. Cela implique une harmonisation des dispositions du Code pénal avec les dimensions de l’article 94 de la Constitution. Il y a lieu, en conclut le PAM, de définir une procédure propre à la responsabilité pénale des ministres devant les juges des tribunaux ordinaires.
Le parti du tracteur défend l’idée de recourir à la procédure normale prévue par le Code pénal avec toutefois des règles spécifiques, notamment des garanties, encadrant les investigations, enquêtes, jugements et oppositions, relatives à la responsabilité pénale des ministres, pour justement tenir compte de la spécificité de leur statut.