«J’ai adoré être sur scène»

Lors d’une conférence de presse, tenue le 9 février, Etienne Comar présentait son film événement «Django» aux côtés des acteurs principaux, Réda Kateb et Cécile de France. Le film qui a fait l’ouverture de la Berlinale a subjugué par l’angle choisi par le réalisateur et par le jeu incroyable de son acteur.
Un film très attendu que «Django» d’Étienne Comar. En effet, toute la presse attendait ce biopic sur le musicien tzigane à la fois mystérieux et sulfureux. Pourtant, lorsque l’on sort du film, on se retrouve émoustillé par l’engagement du film, qui raconte, à travers l’histoire du guitariste manouche, le génocide tzigane de la Seconde Guerre mondiale. «Je voulais raconter l’histoire de Django à travers ces deux années sombres de sa vie, entre 1943 et 1945», confie le réalisateur qui avoue avoir eu très peu de documentation sur cette période de la vie du musicien. «Il essaie de vivre sa musique dans sa période trouble, par contre ce requiem qu’il fait, c’est sa réponse. Je trouve toujours ça très beau de voir des artistes répondre à la question de liberté, de l’engagement avec le travail même qu’ils font et non pas par la parole. Plusieurs artistes ont voulu prendre position politiquement, ce n’est pas souvent bien reçu, c’est délicat. Par contre, lorsque c’est fait à travers leur art, je trouve ça très touchant. C’est ce qui m’a touché chez Django», continue le cinéaste qui signe son premier film en tant que réalisateur.
Un film dans lequel il donne libre cours à son acteur, d’incarner un Django qui frise la perfection. «Lorsque j’ai lu le scénario, je n’ai jamais de doute sur l’envie de jouer Django. Je le connaissais assez peu, comme tout le monde, j’avais cette image de lui sur cette photo fumant une petite cigarette, avec sa moustache. J’avais entendu quelques morceaux, j’avais vu la comédie de Woody Allen», avoue Reda Kateb qui était à un moment de sa vie où il avait envie d’escalader une montagne, de considérer un rôle plus grand que lui. «J’adore jouer des personnages de la vie du quotient, mais j’avais envie de faire Django, car il me rappelle ces personnages de théâtre. Il y a quelque chose de tellement romanesque. Il recherche la lumière, mais se cache, donne, mais en garde toujours un peu, qui m’a complètement porté par sa poésie». Et c’est palpable. L’acteur qui a marqué par son rôle dans le Prophète, de Jacques Audiard, aux côtés de Taha Rahim est touchant. Il ne cherche pas à imiter, il propose une version de l’artiste fidèle, sincère et profondément convaincante. Pour se faire, Reda Kateb n’a pas hésité à côtoyer les tziganes, à vivre avec eux, s’imprégner de leurs coutumes, leur quotidien. Il a également travaillé la guitare, de façon intensive, pendant un an. «J’avais très peur, mais plus je l’ai joué, plus on est entré dans le tournage et plus je me suis senti enveloppé par lui. Etienne m’a donné, dès le départ, la légitimité pour le jouer. Jamais je n’ai dû faire un travail d’imitation, je me suis inspiré de lui et j’ai respecté les choses extérieures, mais c’est une vraie rencontre. Plus je l’ai rencontré, plus il était opaque à mes yeux. C’est le signe des grands voyages», continue l’acteur qui avoue aimer les silences que Django mettait entre les notes. Selon le cinéaste, Reda était parfait parce qu’il avait cette dimension profonde.
Selon lui, il n’a pas cherché à expliquer Django. «Je voulais absolument que Reda soit entouré de musiciens, de jazzmen. Pour que les scènes fonctionnent sur l’énergie, l’énergie tzigane», explique Étienne Comar. Un exercice jubilatoire pour l’acteur qui avait des envies de s’éterniser sur scène tellement il s’y croyait. «C’était génial d’être dans cette réciprocité, cet échange. Jouer Django face à des musiciens était impressionnant, on avait l’impression chacun de rentrer de l’univers de l’autre. Quand je jouais avec eux, ils me faisaient croire que j’étais Django le temps d’une scène. Pendant une semaine, on était dans ce magnifique théâtre, j’ai eu envie de faire et refaire cette scène, j’ai adoré être sur scène»…