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Enseignants contractuels. Le bras de fer avec le gouvernement se poursuit

Le statut relatif aux enseignants contractuels sera bientôt amendé pour répondre à certaines de leurs doléances. Cet engagement gouvernemental n’a pas visiblement permis d’apaiser les esprits des protestataires qui dénoncent la suspension des salaires de quelques enseignants (promotion de 2016) qui n’ont pas signé le contrat annexe proposé par les AREF.

Le gouvernement n’entend pas se rétracter sur le système de contractualisation dans l’enseignement malgré la grogne qu’il a suscitée et les mouvements de grève déjà observés ou annoncés, mais il compte l’améliorer pour répondre à quelques doléances des enseignants contractuels. Le bras de fer des protestataires a fini par amener l’Exécutif à admettre l’existence de quelques failles. Il faut dire que le gouvernement est contraint de les écouter en raison de leur poids numérique qui ne cessera de croître au fil des années. Ceux qu’on appelle les «enseignants des académies» constituent désormais près du quart du corps enseignant, et seront majoritaires dans quelques années. À l’horizon 2030, le système d’enseignement connaîtra le départ à la retraite de quelque 92.258 enseignants. À ce chiffre s’ajoutent environ 30.810 enseignants qui bénéficieront de la retraite anticipée. On s’attend à la formation de quelque 200.000 enseignants entre 2015/2030, soit un taux de renouvellement de 80% du total du corps enseignant. Le porte-parole du gouvernement a annoncé l’engagement de ce dernier à remédier à certains dysfonctionnements qui portent atteinte à la stabilité de ces enseignants pour garantir l’équité au sein du système éducatif. Mustapha El Khalfi a insisté sur deux points: le droit à l’accès au concours des inspecteurs et la suppression de la clause, vertement critiquée, ayant trait au licenciement sans préavis ni indemnité. Même le mot «contractuels» devra disparaître dans la réforme en vue.

Éternelle revendication
Cela sera-t-il suffisant pour apaiser les esprits échauffés des enseignants? Rien n’est moins sûr car la principale revendication reste l’insertion directe dans la fonction publique, à l’instar des anciens enseignants. Les chances de voir cette revendication satisfaite sont presque nulles; c’est, du moins, ce que laissent entendre les différentes déclarations des responsables gouvernementaux qui insistent sur le volet de la mise en œuvre de la régionalisation et de la déconcentration administrative. L’Exécutif ne compte pas faire marche arrière concernant la réduction de la masse salariale dans la fonction publique, qui est l’une des recommandations des instances internationales comme la Banque mondiale, et ce d’autant plus que les besoins en enseignants sont énormes. Mais le budget consacré à la masse salariale des AREF ne provient-il pas du Budget général de l’État? Il s’agit d’un faux débat, selon les responsables. Les académies sont appelées, à l’avenir, à s’autofinancer en développant les partenariats, notamment les PPP, cherchant des subventions, gérant le patrimoine foncier dont elles disposent…

Suspension des salaires
En attendant la réforme escomptée, les enseignants contractuels sont appelés par les AREF à accepter de signer le contrat annexe complétant le contrat initial. Les salaires du mois de février des non-signataires de la promotion 2016 sont suspendus, précise Mohamed Aderdour, directeur de l’AREF de Rabat-Salé-Kénitra. Au sein de cette académie, la majorité des enseignants concernés ont signé ledit avenant. Mais ce n’est visiblement pas le cas des autres académies qui n’arrivent pas à convaincre les enseignants contractuels de parapher le document de discorde. Techniquement, la signature du contrat annexe, quelques mois après l’entrée en vigueur du statut des cadres enseignants des académies, s’impose pour que les trésoriers payeurs continuent de verser les salaires. Les protestataires dénoncent le recours à ce moyen de pression, et certains n’hésitent pas à faire miroiter le spectre d’une année blanche, alors que les académies soulignent l’importance de la signature de l’annexe pour les intégrer au nouveau système et qu’ils puissent passer l’examen professionnel visant leur titularisation au sein des AREF.

Profil des enseignants : repenser le système
La gestion de la grogne des enseignants contractuels ne doit pas occulter le débat sur la qualité de l’enseignement. La performance d’un système éducatif ne peut surpasser celle de ses enseignants. Or, la qualité des compétences du corps enseignant marocain est vertement critiquée en raison, entre autres, du système de formation qui souffre actuellement de nombreux dysfonctionnements… soulevés par le département de tutelle lui-même. Pour corriger les insuffisances qui impactent fortement la qualité de l’enseignement au Maroc, le ministère de l’Éducation nationale, de la formation professionnelle, de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique a élaboré un nouveau programme de formation des futurs enseignants qui devra durer cinq ans au lieu d’une année (voire quelques mois pour les contractuels). On compte changer l’orientation actuelle qui consiste à choisir le métier d’enseignant par défaut, rarement par vocation. L’objectif est d’inciter les jeunes à en faire un projet personnel basé sur une ferme conviction. Mais on note peu d’engouement pour ce nouveau système. Pour qu’il attire les bacheliers brillants, comme le veut le ministre de l’Éducation nationale, il s’avère nécessaire de revoir le volet matériel des enseignants qui peut dissuader les jeunes de choisir l’option de la licence pédagogique. S’agissant des enseignants contractuels déjà recrutés, le renforcement de la formation pratique est un impératif, bien que sur le plan officiel, on salue leurs compétences. Par ailleurs, une véritable stratégie de renforcement des compétences des étudiants dans certaines disciplines devra être mise en place. Le système de contractualisation a montré que le besoin se faisait sentir en mathématiques, en français et en physique. Certaines académies ont dû accepter des enseignants de mathématiques titulaires d’une licence en physique et des professeurs de français titulaires d’une licence en sciences économiques. 


Mohamed Aderdour
Directeur de l’AREF de Rabat-Salé-Kénitra

Les académies devaient mieux communiquer autour du statut des cadres enseignants pour éviter les malentendus et barrer la route à la manipulation. L’avenir leur appartient. Ils sont appelés à prendre en considération l’intérêt des élèves.


Retraite, une problématique compliquée

La question de la retraite des cadres enseignants des académies restera posée même en cas de révision du statut régissant l’exercice de leur fonction. Cette catégorie de cadres ne bénéficie pas de la Caisse marocaine des retraites (CMR), comme c’est le cas des fonctionnaires, mais plutôt du Régime collectif d’allocation de retraite (RCAR). Ce dossier devra être réglé dans le cadre de la réforme globale du système de retraite visant la mise en place d’un système bipolaire. L’étude a déjà été lancée sous la supervision du ministère de l’Économie et des finances ainsi que d’autres départements. La commission spéciale chargée des retraites devrait bientôt se réunir pour examiner cette question, comme a récemment souligné le chef de gouvernement Saâd-Eddine El Othmani. À terme, le Régime collectif d’allocation de retraite et la Caisse marocaine de retraite fusionneraient pour former le pôle public.


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