Maroc

Enrichissement illicite. Le PJD fait cavalier seul

Le groupe parlementaire du PJD a officiellement retiré l’amendement sur l’enrichissement illicite qu’il a déposé d’un commun accord avec les groupes de la majorité. Le bras de fer s’annonce serré autour de ce point qui divise la coalition gouvernementale. À un an et demi de la fin du mandat gouvernemental, tout porte à croire que le texte ne verra pas le bout du tunnel. Analyse…

Le sujet demeure d’une grande actualité en raison de l’échange de tirs croisés entre les composantes de la majorité sur le projet de loi modifiant et complémentant le Code pénal, bloqué au Parlement depuis 2016. Difficile de faire sortir ce texte des tiroirs de la chambre basse même si tous les groupes parlementaires ont déposé leurs propositions d’amendement, après plusieurs tergiversations. Va-t-on assister à la reproduction du scénario de la loi-cadre de l’éducation et de la formation? Certaines voix au sein de la majorité estiment que ce sera la meilleure voie pour débloquer enfin le texte qui risque de ne jamais voir le jour si chaque partie campe sur ses positions.

Pour la loi-cadre, rappelons-le, le PJD avait fini par accepter la poursuite du processus d’adoption du texte tout en marquant son abstention pour la disposition ayant trait à l’enseignement des matières scientifiques et techniques en langues étrangères. Va-t-il encore céder à l’appel de ses alliés de la majorité et accepter de faire passer l’amendement sur l’enrichissement illicite? Rien n’est moins sûr. Le groupe parlementaire du parti de la lampe vient de retirer officiellement cet amendement. Le PJD veut garder les dispositions de la mouture initiale du texte qui a été préparée par Mustapha Ramid en 2016 alors qu’il était ministre de la Justice au sein du gouvernement Benkirane.

Le groupe du PJD estime que l’amendement de la majorité vide la disposition de lutte contre l’enrichissement illicite de sa substance, car il propose de n’interpeller les personnes concernées qu’après la fin de leur mandat, administratif comme électoral, de limiter la mission de contrôle à la Cour des comptes et de se contenter de la déclaration du patrimoine du concerné et de ses enfants, sans prendre en considération le patrimoine déclaré avant la prise de fonction.

Multiples désaccords
D’après le président du groupe parlementaire du PJD, Mustapha Ibrahimi, ce retrait intervient après l’épuisement de toutes les tentatives visant à recueillir le consensus sur les amendements relatifs à la lutte contre la corruption, quatre ajournements du dépôt des amendements et un blocage qui a duré quatre ans. Il estime que les propositions de son groupe vont permettre de diminuer l’ampleur de la prévarication et de la corruption et d’améliorer le classement du Maroc dans l’indicateur de perception de la corruption. Sauf que les autres membres de la coalition gouvernementale ne sont pas du même avis. Les dispositions de la mouture initiale relatives à la lutte contre l’enrichissement illicite sont jugées trop vagues par les alliés gouvernementaux du PJD. Plusieurs voix au sein de la majorité au Parlement mettent en garde contre une chasse aux sorcières et soulignent la nécessité de respecter le principe de présomption d’innocence. Par ailleurs, il faut souligner que le texte initial et même les propositions d’amendements sont jugés lacunaires par les observateurs et la société civile. À titre d’exemple, aucune peine privative de liberté n’est prévue en cas d’enrichissement illicite. Les acteurs associatifs plaident pour l’impératif d’introduire des peines d’emprisonnement en plus des amendes et de la confiscation des biens. À cet égard, quelques députés estiment que le problème ne se pose pas car les dispositions d’autres textes pourraient s’appliquer aux cas prouvés d’enrichissement illicite, comme celles relatives au faux et usage de faux ou encore à l’évasion fiscale… Rappelons que Mustapha Ramid a expliqué l’absence de peine privative de libertés, en cas d’enrichissement illicite, par la nécessité d’éviter des règlements de compte, notamment à la veille des périodes électorales.

Le blocage risque de durer longtemps. Il s’avère difficile d’accorder les violons. Les propos du ministre de la Justice, Mohamed Benabdelkader, sur la nécessité de discuter le texte par le gouvernement avant de poursuivre le processus législatif et sur la partialité de cette réforme, laissent entendre que le projet ne verra pas le bout du tunnel de sitôt. Les déclarations du responsable gouvernemental sont vertement critiquées par les députés du PJD. Mustapha Ibrihimi souligne que la procédure législative est claire et que le chef de gouvernement n’a pas pris la décision de retirer le texte.


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