Effets Covid : 412 MMDH de pertes pour les entreprises
Retard dans les délais de paiement, défaillance d’entreprises, difficulté d’accès au crédit… la facture de la Covid-19 sera très salée.
Beaucoup de choses ont été dites sur la crise liée au coronavirus, en termes d’impacts sur la santé des entreprises. Cependant, peu d’études sont en mesure d’estimer le tribut que celle-ci vont devoir payer à la fin de l’année. On sait déjà que les opérateurs les plus touchés par la pandémie gravitent autour de l’écosystème du tourisme, à savoir les cafés, les restaurants, les hôtels, les entreprises de location de véhicules et les agence de voyages. Inversement, les opérateurs les moins touchés sont dans les secteurs des télécommunications, l’agroalimentaire, l’e-commerce et la santé, détaille l’enquête du cabinet d’étude qui couvre 2.500 entreprises autour de cinq thèmes. Ce qu’on ne savait pas, c’était le coût de la crise pour les entreprises. Le mystère est résolu.
Plus de 400 milliards de perte de CA
En termes de baisse de chiffre d’affaires (CA) en 2020 par rapport à 2019, «la crise Covid-19 aura un impact sur les entreprises de l’ordre de 412 MMDH cumulés», a révélé le PDG d’Inforisk, Khalid Ayouch, lors d’un récent webinaire organisé par la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) en partenariat avec la Société financière internationale (IFC), membre du groupe de la Banque mondiale, sur le thème «Impact du Covid-19 sur le secteur privé : État des lieux et recommandations pour la relance». Outre le CA, le cabinet s’est intéressé aux impacts relatifs aux délais de paiement, au financement, aux défaillances des entreprises et aux finances publiques. Concernant le volet des délais de paiement, 82% des entreprises interrogées ont enregistré des retards de plus de 60 jours. De longs délais qui peuvent aggraver la situation déjà très difficile des entreprises, notamment en matière de recouvrement de créance, dira-t-on. Plus de 95% des sondés ont déjà des problèmes de trésorerie. Sur un autre registre, près de la moitié des entreprises ont connu des retards de livraison d’intrants du fait de l’interruption d’activité des fournisseurs, tandis qu’un tiers d’entre elles envisagent, si elles le peuvent, de relocaliser leur approvisionnement.
Lueur d’espoir
En termes de répartition, Marrakech-Safi est la région où les entreprises sont les plus touchées par la crise à cause, notamment, de leur dépendance au secteur touristique. Viennent ensuite les entreprises de la région Fès-Meknès, essentiellement spécialisées dans l’artisanat. En revanche, les entreprises plus diversifiées situées dans les grandes villes, comme Rabat et Casablanca, font preuve de résilience, mais elles sont moins bien portantes que celles du Sud. Ces dernières, qui bénéficient d’une faible densité de population et donc d’une moindre pénétration du virus, ne s’en sortent pas trop mal.
«Mais globalement, si je devais résumer la situation actuelle, je dirais que nous sommes dans une forme d’économie diminuée. C’est-à-dire que nous avons une économie amputée durablement d’un certain nombre de secteurs d’activité», analyse le patron d’Inforisk.
S’agissant de l’aide apportée aux entreprises pour surmonter la crise, en moyenne 30% d’entre elles ont bénéficié de Damane Oxygène contre 20% pour Damane Relance. Si c’est la catégorie des petites entreprises qui a le plus bénéficié des produits Damane, le total des engagements des crédits Relance début octobre était de 26 MMDH seulement sur un potentiel d’encourt de 75 MMDH. Bonne nouvelle, le nombre de défaillance d’entreprises au mois de septembre est équivalent à celui de l’année dernière à la même période, malgré la crise. Mieux, depuis début septembre, tous les secteurs, à l’exception de ceux du tourisme et restauration, de l’industrie culturelle et créative, ont plus ou moins repris du poil de la bête, confirme le troisième baromètre de la CGEM, qui s’est déroulé du 8 au 24 octobre, relatif à l’emploi, au taux d’activité, au financement, aux délais de paiement et aux prévisions relatives à la relance. Si l’enquête prévoit également une baisse du taux d’activité du secteur du BTP en 2021, globalement, c’est l’optimisme qui gagne les chefs d’entreprises, confirmant ainsi la tendance de la 2e édition de l’enquête du patronat visant à mesurer l’impact de la Covid-19 sur les entreprises marocaines. Néanmoins, selon les chefs d’entreprises, l’État doit davantage mettre la main à la pâte pour une relance plus vigoureuse. Remboursement des crédits de la TVA, exonération des taxes, plus d’incitations fiscales au profit de la TMPE, flexibilité du Code du travail pour plus de recrutements et d’investissements, allégement, voire exonération des charges sociales pour préserver l’emploi, fluidification des procédures d’octroi du crédit… la liste des revendications des patrons est longue. En plus de ces recommandations, formulées sur la base d’enquêtes réalisées au Maroc et de benchmarks internationaux, les opérateurs du secteur touristique demandent, pour une pleine reprise de l’activité, l’ouverture des frontières aériennes et l’autorisation d’évènements accueillant un nombre de participants suffisant pour générer des profits.
Khadim Mbaye / Les Inspirations Éco