Dépistage de la Covid-19: le Maroc ratisse plus large
Le ministère de la Santé met les bouchées doubles en matière de dépistage de la Covid-19 en augmentant le nombre des espaces d’accueil. Des unités dites de référence seront ainsi mobilisées afin d’accueillir les cas suspects de contamination au nouveau coronavirus.
La prise en charge des patients de la Covid-19 intègre désormais les centres de santé. Des unités dites de référence seront ainsi mobilisées afin d’accueillir les cas suspects de contamination au nouveau coronavirus. Annonce en a été faite par le ministre de la Santé, Khalid Ait Taleb, lors d’un webinaire organisé par la Société marocaine des sciences médicales (SMSM), ajoutant que les cas concernés sont ceux transférés par les médecins des secteurs privé, public et autres, ou par des pharmacies situées au niveau de chaque quartier. Le ministère souhaite de cette manière ratisser plus large en matière de dépistage de la Covid-19, en augmentant le nombre des espaces d’accueil.
Ceci devrait, selon Ait Taleb, permettre une meilleure réactivité en termes de prise en charge des patients. Concrètement, les cas ne pouvant être soignés à domicile en raison de la présence de facteurs de risque ou de l’existence de maladie chronique seront pris en charge au niveau des différents centres de santé. Notons que la dernière circulaire du ministère de la Santé portant sur la prise en charge des cas asymptomatiques stipulait que ces derniers -s’ils ne souffrent pas de maladie chronique et ne présentent aucun risque pour leur entourage- seront désormais traités à domicile, en coordination avec les autorités locales. Ces cas effectueront les tests nécessaires, notamment un cardiogramme, et recevront les médicaments tout en étant soumis à un contrôle médical continu. Il faut dire que la Covid-19 fera encore l’actualité pendant un moment. Pour l’heure, la question qui taraude les citoyens est celle des raisons ayant conduit à cette montée en flèche du nombre de cas positifs, de décès et de cas critiques dans les services de réanimation au cours de la dernière période. «Une peur légitime», admet Ait Taleb, qui indique que cette augmentation conséquente était attendue.
En effet, a-t-il ajouté, la levée du confinement sanitaire et l’élargissement du champ de dépistage allaient inévitablement mener à cette situation. C’est pourquoi une plus grande vigilance de tous est requise pour limiter les dégâts, mais surtout pour éviter les goulots d’étranglement au niveau du système de soins. Les capacités sont, pour le moment, serrées et les professionnels de la santé ont déjà tiré la sonnette d’alarme au cours des derniers jours. Des inquiétudes partagées par Said Ahmidouch, le wali de la région Casablanca-Settat, qui a souligné que la capacité des plateaux techniques est proche de la saturation, prônant l’adoption du mécanisme des sentinelles, depuis le médecin ou le pharmacien. En effet, la haussedes cas de Covid-19 détectés a eu pour effet de faire exploser le taux d’occupation des hôpitaux. À Casablanca-Settat, par exemple, le pourcentage d’occupation de lits s’élevait à 83,77% en juillet dernier. Ce chiffre englobe l’hôpital de campagne monté à la Foire internationale de Casablanca, celui de Benslimane et celui d’El Jadida. Cette région a une capacité totale de 1.929 lits, dont 1.616 étaient occupés.
Médecin de proximité: un rôle crucial
Devant la hausse des cas de contamination, les experts mettent en relief le rôle crucial que peut jouer le médecin de proximité. Intégré dans la boucle du système de dépistage, celui-ci est un filtre important de par les missions qui sont les siennes. Dr. Tayeb Hamdi, vice-président de la Fédération nationale de la santé, explique ainsi que «la médecine générale – médecine de famille libérale remplit trois missions majeures, à savoir l’organisation des soins, la veille sanitaire (surveillance épidémiologique) et la gestion de la crise sanitaire (la riposte)».
Comment donc ce professionnel peut-il casser la chaîne de contamination? Une série de mesures peuvent être envisagées, selon Dr Hamdi, qui cite dans ce sens l’identification des cas symptomatiques, le testing (prescription des tests RT-PCR), l’isolement (mise en place des mesures d’isolement), le contact tracing (recherche des contacts et leur isolement), le traitement et suivi des patients à domicile et des contacts en isolement, ainsi que le suivi des patients Covid+ en post-hospitalisation et de la communication. Dr. Hamdi, qui est médecin et chercheur en politiques et systèmes de santé, estime «qu’une situation incontrôlable est encore évitable». Il préconise pour cela de mettre en place des outils de suivi harmonisés, de bien définir la relation libéral/hôpital/unités Covid, le partage de la décision de tester avec le médecin généraliste libéral, la prise en charge des tests par l’État et les caisses de maladie et assurances, ainsi que l’implication dans la décision d’hospitaliser, isoler à domicile et post-hospitalisation. Il est aussi question de la mise en place d’un parcours clair des patients suspects ou positifs, de l’implication dans le protocole thérapeutique et de considérer la Covid-19 chez le médecin libéral comme maladie professionnelle prise en charge par l’État.
SAMI NEMLI / Les inspiration ECO