Cours des comptes : Zineb El Adaoui alerte sur les défis structurels devant le Parlement
Lors d’une séance conjointe des deux Chambres du Parlement, le Premier président de la Cour des comptes, Zineb El Adaoui, a présenté un bilan détaillé des activités de l’institution pour 2023-2024. Elle a mis en lumière les réformes nécessaires pour renforcer l’efficacité de la gestion publique et réduire les pressions sur les finances de l’État.
La Cour des comptes a enregistré certains risques concernant les finances publiques «qui doivent être traités à court et moyen terme, compte tenu des pressions croissantes sur les finances publiques et du rythme de la mise en œuvre de certaines réformes programmées», a affirmé Zineb El Adaoui, devant les membres des deux Chambres du Parlement.
Le Premier président de la Cour des comptes a déroulé un exposé détaillé, étayé de chiffres clés et d’analyses critiques, mettant en évidence les enjeux cruciaux auxquels le Maroc doit faire face. En toile de fond, la gestion des grandes réformes, la soutenabilité des finances publiques et les besoins impératifs d’investissements stratégiques.
Grands chantiers et gestion publique, un bétonnage à consolider
Le premier axe de l’exposé s’est focalisé sur le suivi des grands chantiers de réformes engagés par le Royaume. Parmi ces projets, la protection sociale se détache comme une priorité à finaliser.
«La réforme du système de protection sociale mobilisera, à terme, 53,5 milliards de dirhams d’ici 2026, dont 38,5 milliards financés directement par l’État», a expliqué El Adaoui.
Ce chantier, déterminant pour l’équilibre social, doit impérativement suivre un rythme soutenu afin de répondre aux attentes des citoyens. En parallèle, le stress hydrique persistant impose des investissements colossaux. Selon les estimations, la période 2020-2027 nécessitera 143 milliards de dirhams pour assurer l’approvisionnement en eau potable et en eau d’irrigation.
Ce constat résonne également pour la région d’El Haouz, frappée par un séisme en 2024. Avec plus de 9,5 milliards de dirhams déjà engagés à fin octobre, les besoins financiers pour la reconstruction et l’aide aux sinistrés demeurent pressants.
L’investissement public, un moteur de croissance à encadrer
Zineb El Adaoui a mis en lumière l’évolution notable des dépenses d’investissement public, passées de 52,3 milliards de dirhams en 2015 à 119,2 milliards en 2023. Cet effort, bien qu’essentiel, doit jouer un rôle de levier pour l’investissement privé.
«La mobilisation accrue de l’investissement privé est indispensable pour améliorer l’allocation des ressources, dégager des marges budgétaires et alléger la pression sur les finances publiques», a-t-elle déclaré.
Cependant, elle a également alerté sur les risques associés à ces dynamiques. Les réformes fiscales, celles des institutions publiques et du système d’investissement doivent être accélérées pour répondre aux exigences budgétaires. En 2023, les transferts du budget de l’État aux établissements publics ont dépassé 65 milliards de dirhams, alors que leurs contributions aux recettes publiques restent modestes (16,8 milliards).
Les urgences à court et moyen terme
Parmi les sujets les plus sensibles, la réforme du système de retraite a été soulignée comme une urgence absolue. La Caisse marocaine de retraite (CMR), en déficit technique de 9,8 milliards de dirhams à fin 2023, risque d’épuiser ses réserves d’ici 2028.
Pour préserver la viabilité du système, des réformes structurelles doivent être entreprises sans tarder. El Adaoui a également insisté sur la mobilisation de ressources innovantes pour financer des projets structurants, notamment dans le cadre des préparatifs de la Coupe d’Afrique des Nations 2025 et de la Coupe du monde 2030, coorganisée avec l’Espagne et le Portugal.
Ces événements exigent des investissements massifs dans les infrastructures sportives, touristiques et de transport.
Les réformes précitées, a-t-elle dit, «peuvent offrir des marges intéressantes pour répondre aux besoins en financement, néanmoins, pour atteindre cet objectif, il s’avère cruciale d’accélérer leur mise en œuvre afin de mobiliser les ressources nécessaires à temps, ainsi que pour établir des sources de financement stables et chercher d’autres solutions novatrices pour réduire les pressions sur les finances publiques».
Zineb El Adaoui
Premier président de la Cour des comptes
«Les risques concernant les finances publiques doivent être traités à court et moyen terme, compte tenu des pressions croissantes sur les finances publiques et du rythme de mise en œuvre de certaines réformes programmées».
F.R. / Les Inspirations ÉCO