Code des douanes et impôts indirects : ce que dit la nouvelle version
La nouvelle version du Code des douanes et impôts indirects, qui a pris effet le 1er janvier, intègre plusieurs nouveautés portant notamment sur de nouvelles sanctions destinées à réprimer des situations de fraude. Étude de cas avec les déclarations sommaires de marchandises.
C’est la fin de la récréation pour les agents maritimes et transporteurs au sujet du respect des règles relatives aux éléments à mentionner dans la déclaration sommaire de marchandises. Depuis 2003, les services de l’administration de la douane ont été moins regardants, mais ce temps semble révolu. Début décembre dernier, nous écrivions que le ton montait entre les agents maritimes et la douane au sujet des déclarations sommaires de marchandises. Dans leur sortie, les agents maritimes dénonçaient l’augmentation du montant des pénalités relatives aux rectifications de poids et du nombre de colis, notamment au niveau du port de Casablanca.
Contacté par Les Inspirations ÉCO, Aziz Mantrach, président de l’Association professionnelle des agents maritimes, consignataires de navires et courtiers d’affrètement du Maroc (APRAM), expliquait que «de par les us et coutumes, les montants des pénalités ont toujours été de 1.540 DH, pour un rectificatif de poids et du nombre de colis à la baisse, et de 2.450 DH, pour un rectificatif à la hausse.
Les pénalités s’élevaient à 7.500 DH pour les pénalités majeures assimilées à des additifs, au-delà de 24h après le départ du navire. Depuis quelques semaines, nos membres de Casablanca constatent que les pénalités mineures (facturées donc 1.540 DH et 2.540 DH), sont passées à 7.500 DH, sans que les agents maritimes soient informés au préalable du changement de ces montants», expliquait-il. Nous avons donc contacté les services de la douane pour en savoir davantage.
À l’entame de son explication, notre source souligne que «les éléments de la déclaration prennent en compte, outre les caractéristiques de la marchandise, le poids et le nombre de colis. Si erreur il y a, l’opérateur devrait s’en apercevoir bien avant l’arrivée du bateau dans le port. Et si c’est le cas, il n’y aurait ni rectification, ni amende. Et c’est ce que souhaite l’administration», explique notre source. L’amende dont parlent les transporteurs maritimes se rapporte à la déclaration sommaire, qui n’est rien d’autre que la déclaration des marchandises à décharger au port de destination. Le dispositif législatif et réglementaire exige des transporteurs d’établir la déclaration sommaire par anticipation. Donc avant l’arrivée de la marchandise au port.
Dans un délai de 24 heures, l’agent maritime a la main sur la déclaration sommaire qu’il peut rectifier sans suite contentieuse. Là où le bât blesse, c’est que les agents maritimes et transporteurs se présentent aux agents de douane avec une demande de rectification, au-delà du délai, exprimant leur souhait de procéder à la rectification des éléments de la déclaration au motif qu’ils se seraient trompés.
Ce que n’accepte pas la douane. «Je peux comprendre que l’on se trompe sur le poids, ou admettre une erreur dans le nombre de colis. Lorsqu’une donnée est correcte et que l’autre ne l’est pas, la demande de rectification est considérée comme une erreur». Dans ce cas, l’agent maritime écope d’une amende de 4e classe dont le montant a été réduit de 2.500 DH à 1.500 DH des années auparavant.
Dans le cas où la demande de rectification porte sur les deux données, elle n’est pas considérée comme une erreur. «Dans ce cas de figure, on n’a plus affaire à une rectification, mais à une demande d’ajout de colis, bien que les opérateurs l’appellent simple rectification. Il faut donc faire une distinction entre les deux types de rectification de la déclaration sommaire, auquel cas l’erreur matérielle porte sur un élément». Le Code des douanes et impôts indirects assimile cet ajout à une contravention de deuxième classe et l’administration accepte la transaction moyennant le paiement d’une amende de 7.500 DH.
Benchmark
Comment seraient traitées ces rectifications dans un autre port, à l’étranger ? Dans les ports européens, la rectification ou même l’ajout à la déclaration sommaire n’est autorisée qu’après inspection de la marchandise. L’enjeu étant de s’assurer du bien-fondé de la démarche de l’agent maritime ou du transporteur. D’autant plus que pour un douanier une telle volte-face éveille automatiquement le doute, qui se traduit par un contrôle systématique de la marchandise.
De nouvelles sanctions dans le CDII
Le CDII intègre de nouvelles sanctions destinées à réprimer certaines situations de fraude. Le défaut de déclaration de marchandise, prévu par l’article 66 bis, est désormais qualifié comme une contravention de troisième classe et passible d’une amende égale à la moitié du montant non déclaré. La nouvelle version du Code des douanes et impôts indirects, qui a pris effet le 1er janvier 2022, intègre plusieurs nouveautés portant notamment sur l’assouplissement et la rationalisation du régime répressif douanier, notamment les articles 219, 279 bis, 279 quater, 280, 281, 282 bis, 283, 284, 285, 287 bis, 288, 293, 294, 294 bis, 296, 297, 297 bis, 298, 299, 299 bis, 301, 305. Les modifications apportées au titre IX du CDII, relatif au contentieux douanier, visent l’assouplissement du dispositif répressif, l’amélioration de la lisibilité et la compréhension de ce dispositif, et ce, à travers la révision de l’agencement de certains articles et, enfin, la prise en charge de nouvelles situations de fraude et les sanctions correspondantes.
Ces objectifs sont déclinés par la réduction des montants des amendes et la révision de l’assiette servant à leur calcul (articles 219, 279 quater, 282 bis, 287 bis, 294 bis); la révision de l’agencement des articles en déterminant d’abord les infractions douanières avant de préciser les sanctions qui leur sont applicables (articles 297 quater, 282 bis, 283, 287 bis, 294 bis, 297 bis, 299 bis, 301 et 305). La version 2022 du Code des douanes et impôts indirects instaure un classement homogène des infractions en regroupant, au sein d’une même classe, celles qui ne portent pas directement sur des marchandises (contraventions de troisième classe : articles 285, 294, 297 et 297 bis) ; mais aussi la prise en charge de la dématérialisation de certaines procédures douanières et l’enrichissement du dispositif contentieux par de nouvelles sanctions destinées à réprimer certaines situations de fraude (non-respect des engagements pris par les exploitants des MEAD et l’importation des marchandises prohibées visée aux articles 294-6 bis, 285, 287 bis et 294 bis).
Fin de la procrastination
Depuis la dématérialisation de la déclaration sommaire introduite depuis 2003, notre source fait savoir que la douane a eu beaucoup de mal à obliger les opérateurs à se conformer à la loi. De 2003 à 2019, la douane a différé, année après année, le caractère obligatoire du respect des nouvelles règles relatives aux éléments à déclarer dans la déclaration sommaire. «À chaque fois, les agents maritimes ont voulu se désengager de leur responsabilité en avançant qu’ils ne sont que de simples transporteurs et qu’ils ne sont pas censés connaître le contenu de la cargaison». Aujourd’hui, l’heure est à la fin de la lune de miel.
Modeste Kouamé / Les Inspirations ÉCO