Maroc

Aléas climatiques. Belkassem Boulouha : “Les agriculteurs ont toujours composé avec la sécheresse”

Belkassem Boulouha
Professeur-chercheur à l’Université Mohammed VI Polytechnique (UM6P)

Les cultures arboricoles subissent de plein fouet les effets du changement climatique. Le recul des rendements inquiète autant les agriculteurs que la communauté scientifique. Belkassem Boulouha, professeur-chercheur à l’Université Mohammed VI Polytechnique (UM6P), décrypte les stratégies d’adaptation mises en œuvre dans un contexte de raréfaction des ressources hydriques.

Quel est l’impact du changement climatique sur les arbres fruitiers ? Les agriculteurs en ont-ils pleinement conscience ?
Les agriculteurs associent la sécheresse aux dérèglements climatiques et cherchent des solutions rationnelles pour y faire face. Toutefois, il convient de rappeler que le Maroc a toujours composé avec la sécheresse. Dans les années 1980, le pays a connu cinq années consécutives de déficit pluviométrique, et, pourtant, nous avons réussi à maintenir une activité agricole viable. La résilience du secteur repose sur un savoir-faire accumulé au fil des siècles. Néanmoins, l’intensification du phénomène et son imprévisibilité complexifient l’adaptation.

L’oléiculture connaît sa plus faible production depuis quatre ans. Comment expliquer cette baisse ?
L’ensemble de la filière oléicole n’est pas affecté de manière homogène. Certaines exploitations, bien entretenues et disposant d’un accès suffisant à l’eau, maintiennent leur production.

À l’inverse, d’autres, notamment dans la région d’Al-Haouz, font face à un stress hydrique accru. La baisse du niveau des nappes phréatiques a considérablement réduit les capacités d’irrigation.

En revanche, dans les zones du nord du pays, l’impact se fait moins sentir. Mais il existe un facteur structurel propre à l’oléiculture, à savoir l’alternance de la production. Un olivier produit abondamment une année, puis entre dans une phase de repos l’année suivante.

Ce cycle naturel peut s’étendre sur trois à quatre ans lorsque l’arbre est soumis à des conditions difficiles : manque d’irrigation, carences en engrais, absence d’élagage. En revanche, les arbres bien entretenus conservent leur régularité et leur productivité.

Les variations de température perturbent le cycle végétatif des arbres fruitiers. Quelles en sont les conséquences ?
Le cycle de floraison des oliviers est particulièrement sensible aux écarts de température. Les nuits froides sont essentielles pour l’induction florale, un phénomène particulièrement marqué chez des variétés comme la picholine.

Or, le changement climatique modifie cet équilibre. En effet, la variabilité accrue des températures nocturnes compromet le processus de floraison, entraînant des rendements irréguliers.

Dans la région d’Al-Haouz, les agriculteurs observent des anomalies inédites, avec des floraisons précoces, des cycles décalés et une désynchronisation par rapport au calendrier agricole. La hausse des températures hivernales, avec des pics dépassant 30 degrés en février, perturbe profondément le développement des arbres.

Sur une période critique de 150 jours, les chercheurs ont constaté qu’une fenêtre de 50 jours défavorables suffit à affecter la floraison et, par ricochet, les rendements globaux.

Ayoub Ibnoulfassih / Les Inspirations ÉCO



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