Agadir : le coup de balai de Tehraoui

Le ministre de la Santé a visité le CHR Hassan II d’Agadir, au coeur de plusieurs protestations. L’établissement, vétuste, est devenu au fil du temps le symbole d’une ville et d’une région confrontées à une pénurie aigüe de personnel soignant et d’équipements.
Amine Tehraoui, ministre de la Santé et de la Protection sociale, a effectué, mardi dernier, une visite de terrain dans différentes structures du centre hospitalier régional (CHR) Hassan II d’Agadir. Cet établissement, ouvert en 1967, est confronté à d’énormes dysfonctionnements.
La visite du ministre faisait suite au mouvement de protestation contre la mauvaise qualité des prestations de services et des conditions de travail des professionnels de la santé au sein du CHR. Des dysfonctionnements illustrés par la vétusté de l’établissement et la pression qu’il subit. En effet, cet hôpital assure actuellement une triple fonction (hôpital préfectoral, régional et universitaire).
Cette situation est notamment due au retard accusé dans la livraison du Centre hospitalier universitaire (CHU) d’Agadir, dont la mise en service a été plusieurs fois repoussée, engendrant ainsi une fracture par rapport aux besoins urgents et croissants de la population. À l’issue de sa visite, le ministre a révoqué la directrice régionale de la Santé de Souss-Massa ainsi que le directeur de l’hôpital Hassan II et plusieurs responsables de la délégation de la Santé. Il a également mis fin aux contrats des entreprises privées de nettoyage et de sécurité.
Par ailleurs, Amine Tehraoui a donné ses instructions pour l’approvisionnement de l’hôpital en médicaments et équipements médicaux nécessaires, et annoncé des mesures disciplinaires à l’encontre du personnel médical coupable d’absentéisme.
Aucune date avancée pour l’ouverture du CHU
Le ministre a également affirmé que son département œuvrait à la mise en service dans les meilleurs délais du CHU. Pour rappel, celui-ci devrait offrir des soins de niveau tertiaire, généraux et spécialisés, à plus de trois millions d’habitants de la région Souss-Massa, selon le dernier recensement général de la population et de l’habitat. Le lancement des travaux d’aménagement et d’équipement du CHR Hassan II d’Agadir est censé apporter une solution partielle aux carences actuelles.
Il s’agit d’un projet financé à hauteur de 200 MDH dans le cadre d’une convention multipartite entre le ministère de la Santé et de la Protection sociale, la wilaya, le Conseil régional et la commune territoriale d’Agadir. Cependant, pour l’heure, aucune date n’a été avancée pour la mise en service du CHU d’Agadir, selon plusieurs sources concordantes, à l’issue de la visite ministérielle.
Créé officiellement le 23 juillet 2018 (Décret n° 2.17.589) en vertu de la loi n° 70-13 relative aux centres hospitalo-universitaires, le CHU d’Agadir, dont les travaux d’aménagement et d’équipement ont débuté en 2018, attend sa livraison depuis plusieurs années.
Construit sur une superficie de 30 hectares, l’établissement a mobilisé une enveloppe de plus de 2 MMDH. Mais tout porte à croire qu’il ne sera pas opérationnel à court terme. Notons par ailleurs que l’hôpital psychiatrique, dont le chantier a été lancé le 13 février 2020 dans le cadre du Plan de développement urbain (PDU) d’Agadir, reste désespérément attendu depuis bientôt cinq ans.
Des indicateurs inquiétants
Par ailleurs, les indicateurs de l’offre de soins dans la région Souss-Massa continuent de montrer un décalage significatif avec les moyennes nationales, et ce, malgré les efforts consentis. Cette situation confirme un diagnostic déjà établi il y a quelques années dans le cadre du Schéma régional de l’offre de soins (SROS) de la région.
Selon les ratios d’habitants par médecin public pour 2024, la région, qui compte plus de trois millions d’habitants, est presque en situation de désert médical. On y dénombre un médecin du secteur public pour 5.472 habitants, contre 2.514 au niveau national, d’après la carte sanitaire et l’état de l’offre de soins. Outre une «pénurie aiguë» de médecins spécialisés à l’échelle régionale, le même constat s’applique aux ratios d’habitants par infirmier et par lit hospitalier. Le ratio habitants par lit est de 1.947 au niveau régional, contre 1.307 au niveau national.
Quant au ratio habitants par infirmier, la moyenne régionale est de 913 habitants par infirmier, comparable à la moyenne nationale d’un infirmier pour 918 habitants. Au-delà de ces déficits en personnel, les équipements de santé publics existants souffrent également de carences, notamment en ce qui concerne le nombre de scanners et d’IRM publics.
Yassine Saber / Les Inspirations ÉCO