Maroc

À Marrakech, un appel et deux visions de la migration

Lors de l’ouverture de la 5e Conférence du Dialogue euro-africain, le Maroc confirme son leadership continental sur les questions migratoires face à une Europe obnubilée par la protection de ses frontières.

57 parmi les 58 pays membre du Processus de Rabat ont adopté l’Appel de Marrakech. Seule la Hongrie de Victor Orban a fait faux bond à ce regroupement composé notamment de pays de l’Union africaine, de la CEDEAO et de trois pays du Maghreb (Maroc, Mauritanie, Libye), tandis que l’Algérie a été membre observateur. Malgré un contenu consensuel, ce texte n’a pas trouvé un écho positif auprès du gouvernement hongrois, connu pour ses positions anti-migration. Le retrait hongrois traduit les difficultés au sein de l’Union européenne (UE) à parvenir à un consensus sur le sujet. Au Sud de la Méditerranée, les pays africains membres de ce processus forment un bloc autour de la position marocaine. Le royaume est aujourd’hui le porte-parole du continent sur ces questions, depuis que le roi Mohammed VI a été désigné par l’Union africaine (UA) leader africain sur le sujet. Les représentants du Maroc, lors de cette réunion tenue le 2 mai à Marrakech, n’ont pas dérogé à la nouvelle doctrine marocaine.

L’UE veut du concret
«Le Maroc cultive une dialectique fondée sur la cohérence entre la politique intérieure et la politique extérieure. Il développe une diplomatie migratoire d’ouverture, essentiellement tournée vers la défense des priorités du continent africain. En interne, nous avons lancé une politique nationale d’immigration et d’asile», déclare Nasser Bourita, ministre des Affaires étrangères et de la coopération, en ouverture de la conférence ministérielle. Pour le Maroc, la gestion des migrations internationales ne se résume pas «aux contrôles aux frontières, à la lutte contre les passeurs. Bien que ce volet soit nécessaire, la coopération doit aller bien au-delà. Il faut une solidarité agissante», insiste Bourita. «Nous soutenons la position du Maroc qui rappelle la réalité de la migration africaine», affirme un diplomate ouest-africain. Côté européen, le discours est centré sur la gestion de la migration irrégulière. «Dans le cadre de ce processus, nous avons déjà obtenu des résultats, mais il y a encore beaucoup à faire. Nos échanges doivent produire des effets concrets. Nous ne devons pas en rester au stade des paroles», lance Dimítris Avramópoulos, commissaire européen à la Migration, aux affaires intérieures et à la citoyenneté. Ce dernier ne cache pas son impatience vis-à-vis de certains pays africains: «Il est grand temps que les pays africains aient le même niveau d’engagement. Il est nécessaire que les pays africains rapatrient leurs ressortissants se trouvant en situation irrégulière. Certains pays représentés dans cette salle l’ont déjà fait, d’autres doivent le faire», ordonne le responsable européen. Ces échanges entre l’Afrique et l’Europe promettent de se prolonger durant toute l’année en préparation du Pacte mondial pour les migrations et l’asile, en cours de négociation, et dont la signature est prévue pour décembre prochain à Marrakech.


Nasser Bourita,
Ministre des Affaires étrangères et de la coopération

La conviction du Maroc est que la migration est trop riche pour être ramenée à l’immigration irrégulière; elle est trop complexe pour être réduite aux perceptions stéréotypées associées aux migrants et trop utile pour être réduite à une équation binaire au postulat erroné et à la somme discriminante.

Louise Arbor,
Représentante spéciale du secrétaire général de l’ONU pour les migrations internationales

La migration entre l’Afrique et l’Europe ne relève pas de la responsabilité d’un seul acteur. Elle nécessite un cadre global associant les pays de départ, de transit et de destination. Le processus en cours pour l’adoption d’un Pacte global en décembre prochain à Marrakech pourra traduire cette vision.

Dimítris Avramópoulos,
Commissaire européen à la Migration

L’UE est prête à s’engager pour le développement, dans le cadre du Processus de Rabat encore une fois, à condition que les partenaires africains apportent également leur soutien. Notre soutien à l’Afrique est au centre de notre coopération. Il est aujourd’hui impératif de sortir de la mobilité sauvage pour une migration ordonnée et mutuellement bénéfique.


L’Appel de Marrakech et son plan d’action

Cet appel n’est-il qu’un document de plus que ceux déjà signés à Abidjan ou à La Valette? Le plus de cet appel est qu’il comporte un plan d’action en 10 objectifs et 23 actions. Pour réanimer ce processus, les signataires ont décidé de «cibler des actions concrètes qui reflètent la valeur ajoutée spécifique du Processus de Rabat et formuler des actions qui tiennent compte des spécificités régionales». Le plan d’action couvre la période 2018-2020. Pour rappel, le Processus de Rabat a été lancé en 2006. Il a été initié par l’Espagne, la France et le Maroc. Le processus est dirigé par un comité de pilotage composé de la Belgique, du Burkina Faso, de l’Espagne, de la France et du Maroc, ainsi que de la Commission européenne et de la CEDEAO.


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