Les Cahiers des ÉCO

Politique monétaire : Le taux de change sur une pente descendante

Les conditions monétaires au Maroc restent accommodantes, favorisées par une dépréciation du taux de change et un financement adéquat de la Banque centrale. Après une appréciation de 2,4% en 2016, le taux de change devrait connaître une dépréciation de 1,5% en 2017. À moyen terme, il se déprécierait de 1,2% en 2018 et de 0,7% en 2019.

vDurant le troisième trimestre 2017, les conditions monétaires au Maroc se sont révélées accommodantes, favorisées par une dépréciation du taux de change effectif réel et un financement adéquat de la Banque centrale. En effet, l’euro s’est apprécié de 7,06% face au dollar, se situant à 1,17 en moyenne. Du coup, la monnaie nationale s’est dépréciée de 2,74% par rapport à l’euro et s’est appréciée de 4,13% contre le billet vert. Pour la Banque centrale, le dirham reste assez compétitif comparativement aux devises de certains principaux pays émergents: le dirham s’est apprécié de 2,50% face au réal brésilien et de 3,85% vis-à-vis de la roupie indienne alors qu’il s’est déprécié de 4,24% contre le yuan chinois. En conséquence, le taux de change effectif s’est déprécié, d’un trimestre à l’autre, de 0,4% en termes nominaux et de 0,2% en termes réels. Au final, après s’être apprécié de 2,4% en 2016, le taux de change effectif réel du dirham devrait connaître une dépréciation de 1,5% sur l’ensemble de l’année 2017. Une configuration qui favoriserait la compétitivité du Maroc à l’export, de son attractivité touristique ainsi que les transferts MRE. À moyen terme, ce taux de change se déprécierait de 1,2% en 2018 et de 0,7% en 2019, en raison notamment d’une inflation domestique faible comparativement à celle des partenaires concurrents.

Au niveau de la stabilité des prix, le Maroc est considéré comme un pays historiquement à très faible inflation. Pour cause, l’arrimage du panier de cotation du dirham à l’euro et au dollar (60% euro et 40% dollar) -monnaies de zones monétaires stables et à faible taux d’inflation- a favorisé le processus de désinflation engagé au Maroc. Aujourd’hui, le taux d’inflation est comparable à celui des certains pays développés. L’inflation au Maroc devrait ainsi terminer l’année sur une moyenne de 0,7%, après 1,6% en 2016, tandis que sa composante sous-jacente, qui mesure la tendance fondamentale des prix, s’accélérerait de 0,8% à 1,3%. À moyen terme, l’inflation augmenterait tout en restant à des niveaux modérés. Elle s’établirait à 1,5% en 2018 et à 1,6% en 2019. L’inflation sous-jacente devrait, sous l’effet de la consolidation de la demande intérieure et de l’accroissement de l’inflation importée, s’inscrire également dans un mouvement haussier pour atteindre 1,5% en 2018 et 1,9% en 2019. Une situation qui a permis au Maroc d’obtenir les niveaux actuels de taux d’intérêt, offrant aux opérateurs des conditions de financement avantageuses. Mais pour l’heure, le marché domestique reste encore trop étroit puisque, derrière ce faible niveau de l’inflation, il y a une atonie de la demande ressentie au niveau du marché. Pourtant, la baisse du taux directeur ces dernières années était destinée à encourager la consommation des ménages et à soutenir l’investissement des entreprises. Mais, il s’avère que la politique monétaire de Bank Al-Maghrib ne peut, à elle seule, relancer la demande. Pour les professionnels du marché, il faudra accélérer certaines réformes qui permettront de faciliter l’accès au financement, aux PME notamment, afin de rendre l’économie marocaine beaucoup plus dynamique. De son côté, la Banque centrale affirme que le crédit au secteur non financier a poursuivi son amélioration. Celui-ci a vu son rythme s’accélérer de 3,6% à 4,3%, reflétant notamment une amélioration des prêts accordés aux entreprises publiques. Ces évolutions ont été observées dans un contexte marqué par une amélioration des conditions d’offre aux entreprises et un durcissement pour les particuliers. Selon les résultats du troisième trimestre 2017 de l’enquête sur les conditions d’octroi du crédit menée par Bank Al-Maghrib, cet assouplissement serait lié à la concurrence entre les banques et se serait traduit notamment par une baisse des exigences en matière de garanties. Pour sa part, la demande aurait connu une stagnation comparativement au trimestre précèdent. Ceci dit, Bank Al-Maghrib veille à la présentation d’une concurrence «saine» au sein du secteur bancaire. Une exigence qu’elle a réitérée lors de sa dernière réunion avec le GPBM le 30 novembre dernier. D’ailleurs, sur le marché de change, le volume des ventes des banques à la clientèle s’est inscrit, au troisième trimestre, en baisse de 1,7% à 27 MMDH pour les opérations au comptant et s’est accru de 6,7% à 13,9 MMDH pour celles à terme. Quant aux achats, ils ont augmenté de 3,1% à 23,4 MMDH pour les transactions au comptant et ont diminué de 35,3% pour celles à terme, revenant ainsi à 3 MMDH. Pour ce qui est des opérations des banques avec Bank Al-Maghrib, les achats se sont établis en moyenne à 555 MDH après avoir atteint 14,9 MMDH au deuxième trimestre. Dans ces conditions, la position nette de change des banques ressort à 4,7 MMDH à fin septembre après s’être établi à 1,6 MMDH à fin juin. Pour ce qui est des taux débiteurs, le taux moyen pondéré a augmenté de 34 points de base au troisième trimestre 2017 à 5,60%.

Cette évolution traduit principalement une hausse de 39 points de base des taux assortissant les prêts aux entreprises avec, notamment, des augmentations de 46 points pour les facilités de trésorerie et de 22 points pour les prêts à l’équipement. À l’inverse, les taux appliqués sur les crédits aux particuliers ont accusé un repli de 7 points, reflétant la baisse des taux aussi bien pour les prêts à l’habitat que pour les crédits à la consommation. Pour ce qui est des autres contreparties de la masse monétaire, les réserves internationales nettes ont accusé une baisse, et les créances nettes sur l’administration centrale ont poursuivi leur renforcement entamé depuis le début de l’année. Au total, le rythme de progression de la masse monétaire est demeuré quasiment inchangé par rapport au niveau observé un trimestre auparavant, soit 5,2%, et l’écart monétaire est resté négatif. Au cours du troisième trimestre 2017, le besoin en liquidité des banques s’est accentué à 67,3 MMDH en moyenne, reflétant essentiellement la baisse des réserves de change et, dans une moindre mesure, la hausse de la circulation fiduciaire. Ainsi, Bank Al-Maghrib a relevé le montant de ses injections à 67,8 MMDH, dont 62,9 MMDH sous forme d’avances à 7 jours et 4,5 MMDH au titre des opérations de prêts garantis accordés dans le cadre du programme de soutien au financement de la TPME. Les dernières données disponibles relatives aux mois d’octobre et novembre indiquent une atténuation du déficit de liquidité à 51,8 MMDH en moyenne. Des indicateurs qui pourraient s’apparenter au déclenchement du processus de transition vers un régime de change plus flexible qui vise à renforcer la compétitivité du Maroc et la résilience de notre économie face aux chocs exogènes. Ceci dit, l’abandon progressif du régime de change fixe ne signifie pas que le taux de change ne jouera plus son rôle dans le cadre macroéconomique, même après cette phase transitoire de flexibilisation. À vrai dire, quasiment tous les pays à moyen revenu ayant adopté un régime de ciblage d’inflation continuent à se soucier de l’évolution du taux de change.



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