Les Cahiers des ÉCO

Marché actions/Flexibilisation du DH : Frein ou aubaine ?

Au lendemain de la mise en place du nouveau régime de taux de change, le marché actions a connu une certaine embellie. Si pour certains analystes de la place, les investisseurs ont bien négocié le virage de la flexibilisation, d’autres tentent de relativiser. Comment interpréter donc l’effet de ce nouveau régime sur le marché. Détails.

Belle progression ce mois-ci pour l’indice phare de la place. Le Masi a même dépassé la barre symbolique de 13.000 points pour enregistrer une performance annuelle de 5,02%. «Les investisseurs sont toujours enthousiastes au mois de janvier», nous explique un professionnel du marché. Hormis l’excitation du début d’année, le marché actions a été également boosté par le nouveau régime de change. Depuis le 15 janvier, la parité du dirham est déterminée à l’intérieur d’une bande de fluctuation de ±2,5%, par rapport à un cours central fixé par Bank Al-Maghrib (BAM) sur la base d’un panier de devises composé de l’euro (60%) et du dollar américain (40%). Du coup, la mise en place de la flexibilisation du dirham a eu son effet sur le marché, surtout durant la seconde partie de la séance.

Le Masi avait clôturé la séance sur une progression de 1,55% à 12.863 points, portant la performance annuelle à 3,82%. Le volume des transactions s’est élevé, quant à lui, de 2,41% depuis le début d’année à 1,02 MMDH (dont 332 MDH ayant transité par le marché central, le reste a été monopolisé par le marché de blocs). «C’était une journée particulière où les clients -encore dans le flou- anticipaient une éventuelle baisse de la valeur du dirham», souligne ce trader. Or, pour un autre analyste, «les investisseurs avaient, ce jour-là, anticipé une forte dépréciation du dirham qui est liée à l’offre et la demande». En effet, actuellement deux composantes font la variation du dirham. Aujourd’hui, la méthode active nécessite une intervention de la Banque centrale sur le marché des changes pour équilibrer l’offre et la demande et obtenir la parité fixe souhaitée dans le cadre de ce nouveau régime du taux de change. «Ce jour-ci, tout s’est passé normalement, même les adjudications se sont effectuées à un taux satisfaisant», souligne l’expert. Bank Al-Maghrib avait, en effet, servi 3,5 millions de dollars -lors de sa première adjudication de dollars américains sous le nouveau régime-. En d’autres termes, BAM avait vendu les dollars à un taux moyen pondéré de 9,2307 DH, avec un taux marginal de 9,2304 DH. Aussi, la Banque centrale a offert 20 millions de dollars alors qu’en face la demande s’est élevée à 3,5 millions de dollars seulement, les offres se situant entre 9,2304 et 9,2310. Au final, il n’y a pas eu de grands changements dans le comportement des opérateurs économiques vis-à-vis de la demande en devises. Ceci dit, la mise sous pression de la devise pourra conduire à une inflation. «C’est une anticipation par rapport à une inflation projetée», nous rappelle cet autre expert. Et comme l’inflation induit une perte de valeur, «tous ceux qui ont du cash devraient le placer dans des actifs». Puisque les actifs prennent de la valeur avec l’inflation contrairement au cash qui se déprécie. «On ne peut pas certes généraliser, mais cela reste une vue d’ensemble», commente l’analyste. Cette effervescence a été de courte durée.

Aujourd’hui, le marché s’est relativement calmé en termes de volumétrie et/ou en mouvements. Les investisseurs semblent en attente des résultats annuels pour relancer la machine. «Et là cela sera d’une autre gymnastique en intégrant la donnée de la devise flexible», ajoute l’expert. En attendant, la période des souscriptions approche également. Il y aura du cash à injecter sur le marché. «Et vu l’état du marché obligataire, c’est le marché actions qui devrait en profiter davantage»… Sinon, au niveau des placements, ce sont les bancaires qui sont actuellement les plus recherchées. Selon certains professionnels de la place, les banques devraient connaître plus au moins un développement notable de leurs activités de marché portées par la vente de produits de couverture. «Ce qui pourrait générer plus de volatilité et donc plus de risques», avertit cet analyste. Il rejoint, par contre, l’avis de ses homologues concernant l’objectif final de la flexibilisation qui n’est autre que d’augmenter sur le long terme la compétitivité de l’économie nationale. Ce qui impliquera beaucoup plus d’investissements et devra impacter positivement les sociétés cotées. Après, «tout dépendra de la position du dirham». Si l’on se place dans une position de dépréciation, ce sont les exportateurs (comme les minières) qui pourront en profiter, à l’inverse les importateurs la subiront de plein fouet. Dans cette catégorie, l’on peut citer le secteur du BTP qui importe l’essentiel de sa matière première. L’immobilier, arrive ensuite, puisqu’il est étroitement lié au premier. Les sociétés agroalimentaires comme Centrale Danone (même si elle n’est plus cotée), Cosumar et Lesieur Cristal. Par contre, relativisent les analystes, cet impact négatif ne sera ressenti que dans un premier temps, puisqu’il sera dilué avec le temps. Pour cause, le dirham a pour vocation d’être très volatile. Ce qui veut dire que même la manière d’analyser le dirham va changer. Si  avant, on scrutait les décisions de la FED et la BCE, aujourd’hui, ce sont les entrées et sorties de la devise qui permettront d’évaluer le DH. En été, le DH va s’apprécier parce qu’il y aura une forte demande et la devise sera abondante. Et inversement  dans le cas de rapatriement de dividendes. Au final, ces types de mouvements devront être surveillés, soulignent les analystes. Pour eux, seules les sociétés qui pourront gérer correctement cette volatilité qui pourront tirer leurs épingles du jeu sur le marché.



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