Les Cahiers des ÉCO

2e Climate Chance : Les collectivités locales pour donner l’exemple…

Elles étaient au cœur du 2e Sommet mondial Climate Chance, clôturé hier à Agadir. Leur groupe sera le tout premier groupe d’acteurs non-étatiques à élaborer sa feuille de route. Les élus locaux et régionaux d’Afrique ne sont pas en reste. Ils ont pris l’engagement de participer pleinement à cet élan à travers une déclaration commune. Les détails.

Agadir, la capitale du Souss, vient d’abriter les travaux du 2e Sommet mondial Climate Chance des acteurs non-étatiques. Après le Sommet de Nantes de l’année dernière, où les acteurs non-étatiques sont parvenus à arracher une reconnaissance mondiale pour le rôle qu’ils doivent jouer auprès des États pour renforcer l’action concrète visant à combler le fossé entre les engagements actuels et l’objectif de l’Accord de Paris, Agadir était l’occasion pour les acteurs non-étatiques d’aller de l’avant dans leur volonté de jouer pleinement leur partition dans la lutte contre le changement climatique. Notamment en mettant en place une feuille de route pour montrer aux États comment ils entendent s’y prendre pour que l’objectif de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) à 2°C, voire 1,5°C, soit atteint à l’horizon 2050.

Avec les États seuls, la planète est condamnée
En effet, laissés à eux seuls, les États ne pourront jamais atteindre cet objectif. Il y a consensus là-dessus et cette prise de conscience collective figure en bonne place dans l’Accord de Paris. D’ailleurs, tout de suite après l’entrée vigueur de l’accord, cette prise de conscience a été matérialisée à travers le Marrakech Partnership for Global Climate Action. Signé lors de la COP22, le partenariat de Marrakech pour l’action climatique mondiale soutient la collaboration volontaire entre les États et les acteurs non-étatiques, y compris la société civile, le secteur privé, les finances, les institutions, villes et autres autorités infranationales, communautés locales et peuples autochtones, ainsi que des coalitions et des initiatives volontaires, telles qu’elles sont énoncées dans la décision de Paris.

Dans ce cadre, les champions ont commencé à travailler avec les États intéressés pour faciliter activement une plus grande participation des acteurs non-étatiques dans les pays en développement. «D’ailleurs, nous portons des coalitions thématiques qui s’inscrivent dans le cadre du Marrakech Partnership for Global Climate Action. Ces coalitions doivent être encore renforcées. En même temps, je crois qu’il va falloir aller plus loin notamment en travaillant sur des tas de sujets différents», signale Ronand Dantec, le président de l’Association Climate Chance et co-organisateur du sommet avec le Conseil régional de la ville d’Agadir (Voir entretien ci-après). C’est donc clair, les acteurs non-étatiques veulent travailler dans la continuité. Même s’ils saluent l’initiative de Hakima El Haité, la Championne du climat, le seul cadre du Marrakech Partnership for Global Climate Action qui permet de bien travailler lors des COP ne leur suffit pas. «Par exemple, nous avons besoin de rencontrer les bailleurs de fonds pour leur faire des propositions. Or, ces financiers qui sont d’une importance capitale dans notre action, nous ne pouvons pas les rencontrer dans les COP», justifie Dantec. Ceci étant, c’est en tenant compte de tous ces facteurs que les organisateurs du 2e sommet ont concocté un riche programme où ils ont mis en pôle-position les collectivités locales.

À ce groupe, sans doute le plus important parmi les neuf répertoriés au sein des acteurs non-étatiques, il a été demandé lors du sommet d’endosser le rôle de pionnier, notamment en préparant la toute première feuille de route de la communauté des acteurs non-étatiques. Et pour lui faciliter la tâche, le ton a été donné dès la première plénière qui a suivi les allocutions d’ouverture des hôtes du sommet, d’Abdelaziz Rabbah, ministre de l’Énergie, des mines et du développement durable, d’Aziz Akhannouch, ministre de l’Agriculture, de la pêche maritime, du développement rural et des eaux et forêts, de Patricia Espinoza, directrice exécutive de la Convention-cadre des Nations Unies sur le changement climatique et de Salaheddine Mezouar, président de la COP22. Axée sur le thème «Accord de Paris : 2 ans après», cette plénière a permis de camper le décor notamment en rappelant le cadre d’intervention des acteurs non-étatiques en général et des collectivités territoriales en particulier. Ensuite, la seconde plénière s’est attaquée à la question du financement qui est au cœur des préoccupations des acteurs non-étatiques. Pour répondre à la question: «Comment aligner les flux de financement pour une action climatique locale? Plusieurs représentants de bailleurs de fonds sont intervenus. Ce qui démontre que les financements pour les collectivités territoriales existent. Seulement, l’accès à ces financements demande quelques efforts de la part des villes.

En effet, comme l’a dit la représentante de la banque suisse HSBC, le recours aux émissions obligataires est maintenant courant pour financer des villes durables. La HSBC a également lancé, en partenariat avec la BEI, un fonds smart cities. C’est une sorte d’accélérateur de financement climat puisqu’il permet de transformer les NDC en projets bancables. À ce titre, plusieurs projets sont en cours au Viêt Nam, au Mexique, au Nigéria et en Colombie. Dans le cadre du renforcement des capacités financières des porteurs de projets, une représentante de l’AFD (Agence française de développement) a, en quelque sorte, sonné l’alerte. En faisant référence à une étude menée récemment, elle a révélé qu’il faut une enveloppe globale de 3.000 milliards de dollars US pour rendre toutes les villes de la planète durables à l’horizon 2100. C’est-à-dire qu’il faut investir une moyenne annuelle de 54 milliards à cet horizon, ce qui est loin d’être le cas. Selon elle, les collectivités territoriales devraient, dès à présent, travailler pour la mobilisation des moyens locaux, notamment les impôts et taxes locaux, les aides des pouvoirs publics, etc., ce qui leur facilitera plus l’exécution de leurs projets. Sinon, il faut retenir que l’AFD déploie actuellement un programme dénommé «100 villes et 100 projets». Destiné à la préparation de projets, ce programme, qui accorde un financement de 12 millions d’euros par projet, cible actuellement 25 villes africaines.

Plusieurs bailleurs de fonds présents
La GIZ (Coopération technique allemande) était également invitée à cette seconde plénière du Sommet Climate Chance. L’occasion pour sa représentante de présenter l’approche de renforcement des capacités des villes qu’elle a développées avec la BERD (Banque européenne pour la reconstruction et le développement) et qui est en cours de déploiement en Chine et au Mexique, notamment dans le domaine des énergies vertes. Le C40 (Cities Climate Finance Facility), qui compte 91 villes membres à travers le monde, était également présent. Ce qui a permis à sa représentante de présenter le Climate Finance Facility, un fonds lancé avec le soutien de la banque allemande Kwf qui oblige ses villes membres à dresser un plan d’action à l’horizon 2050. À ce propos, Mexico a bénéficié d’un financement d’un couloir de bus électrique de 24 km ainsi que pour l’acquisition de 100 bus électriques. Tandis que Bogota est soutenue dans la mise en place d’une piste cyclable de 22 km. L’objectif étant à terme de porter la part du vélo à 10% dans la ville. Créé pour surmonter les difficultés des fonds multilatéraux, le Fonds d’adaptation s’est également fait représenter. C’est ainsi que l’assistance a appris que 25 institutions sont accréditées par ce fonds à ce jour. Des institutions parmi lesquelles il y a des ministères mais également des ONG qui agissent sur le plan local. Selon son représentant, l’Afrique du Sud a bénéficié de deux projets dans les domaines du renforcement de capacité et de l’innovation. Il s’agit d’une municipalité et d’un comité national qui coiffe plusieurs institutions locales. Le deuxième jour, tout le Sommet Climate Chance a vibré au rythme de l’Afrique. En effet, la plénière 3 portait sur le thème «Les villes africaines face au défi climatique» et à cette occasion, les élus locaux et régionaux d’Afrique ont fait une déclaration solennelle d’intégrer les coalitions mondiales pour accélérer l’élaboration et la mise en œuvre de leur feuille de route. Laquelle sera parachevée lors du Sommet Africités, prévu en décembre prochain à Brazzaville. 


Les 7 points de la déclaration des élus locaux et régionaux d’Afrique

En marge de la seconde édition du climat chance, les élus locaux et régionaux d’Afrique ont procédé à la signature de leur déclaration contre le dérèglement climatique. Cet appel a incité les villes et les régions d’Afrique à rejoindre la Convention mondiale des maires pour le climat et l’énergie ainsi que les initiatives Régions Adapt et Under2Coalition. «Cette initiative complète les autres initiatives lancées puisque si nous voulons réussir, il faut des moyens d’action et rappeler les engagements déjà pris», explique Ronan Dantec, président de l’association Climat Chance. Ces élus se sont également engagés à lutter contre le dérèglement climatique en anticipant l’évolution des territoires, en particulier les zones urbaines afin d’éviter la croissance des émissions de gaz à effet de serre et de prendre les mesures d’adaptation nécessaires, notamment à travers la réalisation des plans climat.

Pour cela, les signataires ont souligné l’importance de reconnaître la spécificité des défis du dérèglement climatique en Afrique, qui justifie, au niveau territorial, de donner la priorité à l’accès à l’énergie, à l’aménagement du territoire et à la planification urbaine, dans le respect de la complémentarité rural-urbain. C’est dans le cadre de la mise en œuvre de ces stratégies d’accès à l’énergie et d’adaptation au dérèglement climatique que les stratégies d’atténuation doivent être développées. De surcroît, la majorité des contributions déterminées au niveau national (NDCs) devrait se concrétiser au niveau des villes et des territoires, ce qui requiert l’implication des gouvernements locaux et régionaux afin de faciliter la mobilisation et la collaboration de tous les acteurs du territoire pour leur mise en œuvre effective sur le terrain. La déclaration a appelé en conséquence à l’adoption et la mise en œuvre d’un programme de renforcement de capacités et d’assistance technique à destination des gouvernements locaux et régionaux d’Afrique, pour leur permettre de maîtriser le processus MRV (Mesurer, Rapporter, Vérifier) et de préparer des demandes éligibles à la finance climat, notamment au Fonds vert pour le climat, en insistant sur la simplification des procédures. L’autre point et non des moindres est l’importance des processus de coopération décentralisée et le renforcement des capacités en plus d’inciter les divers acteurs des sociétés civiles africaines à rejoindre ce processus d’engagement collectif. Par ailleurs, un premier bilan de cette mobilisation collective sera effectué lors du Sommet Africités qui se tiendra à Brazzaville en décembre 2018.   


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