Allemagne : record à la Bourse, malgré la crise économique
Récession, crise de l’industrie allemande et plans sociaux : rien ne semble perturber l’indice Dax à la Bourse de Francfort, qui a franchi pour la première fois mardi la barre des 20.000 points, dopé par les marchés américains et asiatiques.
En début de séance mardi, le Dax, qui rassemble les 40 plus grandes valeurs d’entreprises allemandes, a brisé ce plafond symbolique, après avoir déjà battu son record la veille, à 19.675 points. L’année 2024 a pourtant été parsemée de mauvaises nouvelles pour la première économie européenne, mais le Dax 40 n’a pas tremblé, sa capitalisation boursière grimpant de 19% depuis janvier. Certaines valeurs de l’indice phare allemand affichent une croissance insolente, comme le fabricant d’armes Rheinmetall (+119%) ou Siemens Energy (+329%), en plein rebond après son effondrement fin 2023.
Paradoxe
L’industrie allemande, en crise profonde à cause de la faible demande mondiale et de coûts de l’énergie élevés, est pourtant bien représentée dans la composition du Dax à travers notamment les grands constructeurs automobiles du pays, en pleine déroute. Hormis le constructeur de poids lourds Daimler, toutes les valeurs automobiles se sont effondrées de 15 à 30% depuis janvier à Francfort. Mais l’indice vedette dépend très peu de la conjoncture nationale, souligne les experts: «84% du chiffre d’affaires des sociétés du Dax est réalisé à l’étranger», remarquait fin novembre Ulrich Stephan, directeur de la stratégie de placements chez Deutsche Bank.
À commencer par Deutsche Telekom, dont la filiale américaine T-Mobile exploite le plus large réseau 5G aux États-Unis, l’assureur Allianz ou le spécialiste des logiciels SAP. Les investisseurs du Dax ont donc les yeux rivés sur les États-Unis et l’Asie, où les marchés sont également en pleine forme.
Wall Street est en pleine effervescence depuis l’élection de Donald Trump, impatiente de voir arriver les baisses d’impôts, les dérégulations et l’énergie bon marché promises par le milliardaire. Les indices vedettes Dow Jones, S&P500 et Nasdaq progressent ainsi à des niveaux historiquement hauts.
Contexte favorable
En Asie, «les mesures de soutien fiscal et monétaire déjà mises en œuvre par le gouvernement chinois pourraient conduire à une reprise, dont les entreprises du DAX orientées vers l’exportation pourraient profiter», ajoute Jochen Stanzl de CMC Markets.
Le Dax 40 bénéficie aussi de la fin de l’année, période faste pour les investisseurs. Avant janvier, les investisseurs ont tendance à acheter davantage d’actions performantes pour embellir leur portefeuille de titres, une pratique qualifiée de «window dressing». Le PIB de l’Allemagne devrait reculer de 0,2% en 2024, une deuxième année de récession consécutive, à rebours de ses partenaires européen. Mais les investisseurs «se projettent au moins 9 à 12 mois dans l’avenir» et «misent sur une reprise potentielle de l’économie (allemande) en 2025», explique l’analyste indépendant Andreas Lipkow.
Les boursicoteurs ont «l’espoir» que les élections anticipées de février en Allemagne «donnent naissance à un gouvernement capable de donner une impulsion à la croissance et de s’entendre avec Donald Trump», ajoute Jochen Stanzl. Le futur président américain menace de taxer de 10 à 20% les produits européens entrant aux États-Unis. D’autres facteurs d’incertitude demeurent pour l’économie mondiale comme la guerre en Ukraine ou au Proche-Orient.
Sami Nemli Avec Agence / Les Inspirations ÉCO