Littérature : Dominique Nouiga incendie les rêves

Si le précédent ouvrage de Dominique Nouiga portait des thèmes liés à la guerre d’Algérie, son «Incendie des rêves» (éd. Le Fennec) se passe pour ainsi dire sous ses fenêtres rbaties : à Salé. Elle s’en expliquait lors de la présentation de son ouvrage à la librairie Livre-Moi de Casablanca, le 12 juin. Ses deux personnages principaux, Atika et Ichraq, portent les blessures et des secrets enfouis d’enfance particulièrement difficiles.
Grandir dans le bidonville de Sidi Moussa (aujourd’hui démantelé) et comme orpheline de mère marque en effet les enfants. Dominique Nouiga tenait donc à faire un récit de ces difficultés, mais, se refusant à la victimisation et bien sûr à la stigmatisation, a opté pour des héroïnes obtenant une intégration sociale de longue lutte.
Le cirque, école de la vie
L’une trouvera son expression dans l’art du cirque, l’autre, bonne élève, dans l’écriture théâtrale. L’accès à la culture ne se fait pas que par les livres, note avec insistance Dominique Nouiga. Pour préparer son roman, elle a beaucoup fréquenté les cadres et élèves de l’École nationale de cirque Shems’y, à Salé, précisément.
La vie nomade est un sujet récurent de son travail. Mais aussi, la vie d’artiste, contrairement à ce que laissent croire les préjugés, demande un apprentissage sérieux de la discipline. Il faut se dépasser soi-même, dépasser son narcissisme. Elle demande aussi d’apprendre qui l’on est et quels sont ses rêves, puisque les exprimer sera la clé d’un art réussi.
Dominique Nouiga sait de quoi elle parle, ayant elle-même une expérience professionnelle de chorégraphe. La danse fut un tournant dans sa vie, riche en rebondissements. Après la France, Rome et New York, elle s’est installée à Rabat durant les années 1980, où elle est aujourd’hui libraire, éditrice et autrice.
Une plongée dans l’enfance
«Incendie des rêves» introduit le lecteur dans une riche galerie de personnages secondaires, qui joueront tous un rôle — d’opposition, de soutien, ou un peu des deux — dans le parcours des deux jeunes filles. Un père abusif, une tante cheikha distillant le goût de la liberté, une mère malade, le chien Zeft, des amours faits de rêves et de déceptions…
L’autrice a bien évidemment ses préférences, mais tous ont leur humanité. Sa plume s’attache à retrouver, pour la première partie du roman, à retrouver le regard des enfants, puis celui des jeunes filles et de leurs rêves chevillés aux corps. D’où le titre de l’ouvrage. La découverte de l’histoire des contestations féminines et féministes aidera les personnages à se construire peu à peu.
Murtada Calamy / Les Inspirations ÉCO