Driss Benwahoud : “Mon art est coloré, décalé et, je l’espère, contagieux”
Driss Benwahoud
Artiste peintre
Et vous, vous êtes comment par rapport à votre zone de confort? S’il y a bien une personne qui prend cette expression, issue du jargon «psy-coach», à la lettre, c’est Driss Benwahoud alias Daz. «Sortir de sa zone de confort», c’est presque devenu un leitmotiv pour cet artiste «coloré, décalé et contagieux» qui n’hésite pas à repousser ses limites au nom du street art. Peindre à 215 mètres de hauteur ou encore réaliser son rêve, celui de peindre sur la banquise en Alaska, rien ne lui fait peur. Driss Benwahoud, c’est un peu le 007 de la peinture, qui ne recule devant rien. Après Paris, New York, Dubaï et Abu Dhabi, cet admirateur de Jean Michel Basquiat est de retour à Casablanca, sa ville natale. Il y exposera à l’Atelier 21, du 14 juin au 23 juillet prochain, aux côtés d’autres artistes issus de la même veine artistique, comme Hassan Hajjaj, Yann Chatelin ou encore Rebel Spirit, pour ne citer que ceux-là. Nous sommes allés à la rencontre de cet artiste, résolument pop, qui n’a pas son pinceau dans sa poche !
Comment définissez-vous votre art ? Si vous deviez vous présenter en quelques mots, que diriez-vous de vous-même ?
Je pense que mon art est avant tout très coloré, décalé et, je l’espère, contagieux. Me concernant, je dirais qu’en tant qu’artiste, j’essaie de toucher les sens et les émotions du public.
Est-ce que votre art est une sorte d’exutoire ? Où est-il tout simplement le prolongement de votre personne ?
Les deux ! Je propose au public ma perception des choses, et à lui de créer la sienne. Après, effectivement, l’art est un moyen d’évasion qui nous fait du bien et nous soigne parfois. C’est aussi, pour moi, une sorte de thérapie.
Comment passe-t-on de courtier en assurance à artiste peintre ?
À vrai dire, le confinement y est pour beaucoup. Ajoutez à cela un divorce et une remise en question, et l’art m’est apparu comme une évidence, une sorte de libération.
Vous êtes une sorte de performer, comment réfléchissez-vous vos challenges ? Quelle est la performance la plus folle que vous aimeriez concrétiser et que vous n’avez pas encore réalisé ?
Je dois vous avouer que je ne réfléchis pas trop. Je suis plus un homme d’action, et j’ai donc tendance à agir impulsivement. J’aime me surpasser et aller au bout de mes limites. Concernant la performance de mes rêves, cela risque de vous paraître assez fou, mais j’aimerais peindre sur la banquise, en Alaska.
À ce propos, pouvez-vous revenir sur votre performance qui consistait à peindre une toile à Dubaï, à une hauteur de plus de 215 mètres ? Qu’avez-vous ressenti ?
(Rires) J’avais le vertige, je suis descendu de la plateforme à deux reprises. Comme je suis une personne qui adore aller au bout des choses et qui ne lâche jamais rien, j’ai réussi à peindre à 215 mètres de hauteur, à force d’acharnement et d’adrénaline. Hormis le vertige, je me suis surpassé et en garde un excellent souvenir !
Aujourd’hui, vous vivez entre Dubaï et Casablanca. Quelle ville vous inspire le plus ?
À vrai dire, les deux villes m’inspirent mais chacune différemment. Casablanca est ma ville natale, un musée à ciel ouvert de part son architecture, mais aussi sa lumière et son histoire, dont je suis imprégné. Dubaï m’inspire pour son côté cosmopolite, son côté démesuré et sa quête permanente d’innovation et de nouveauté.
Si je vous dis Jean Michel Basquiat…Je vous répondrai du tac au tac «Same old Shit» L’œuvre qui vous émeut le plus ? Celle qui vous inspire la joie ?
L’œuvre qui me fait sourire le plus est incontestablement «le jongleur» de Bernard Buffet, même si elle peut paraître triste. Elle éveille en moi la vie cyclique d’un artiste. Cette toile me fait sourire même si elle ne s’interprète pas… Elle se sent, et chacun peut avoir un ressenti différent. Celle qui m’émeut le plus -et m’amuse en même temps- c’est l’œuvre que Delacroix a appelé «la silencieuse puissance de la peinture». Elle représente pour moi cette puissance du pictural qui permet à la peinture de trouver l’expression de notre sensibilité.
Quelles sont pour vous les meilleures conditions pour peindre ?
Pour laisser libre cours à mon imagination, j’ai besoin d’être seul, coupé du monde, avec une bonne playlist.
L’œuvre dont vous êtes le plus fier ?
«Where art you from» ! Cette toile reste probablement celle qui m’a le plus permis d’interagir avec le public, car j’ai reçu beaucoup de retours positifs par rapport à ce qu’elle pouvait dégager et transmettre comme message.
Vous avez un parcours assez atypique, qu’est ce qui vous donne cette force ?
Avoir le courage de donner ses opinions dans une société qui ne pardonne rien et ne laisse rien passer. Nous vivons dans une société où le jugement est roi. Savoir dire non et avancer avec ce qui nous tient à cœur n’est pas chose facile. C’est, à mon sens, la clé de la liberté individuelle et, par conséquent, celle de la réussite.
Quel est votre mantra ?1
«Let it Be».
Éliane Lafarge / Les Inspirations ÉCO