Lutte contre la corruption : l’e-administration à la rescousse
La Commission nationale anti-corruption prépare le lancement du 3e volet de la stratégie nationale de lutte contre la corruption pour la période 2021-2025. La réduction du contact physique entre l’administration publique et le citoyen ainsi que l’amélioration des mécanismes du suivi des plaintes seront les deux piliers de la réforme projetée.
La perception du phénomène de la corruption a-t-elle pu changer durant cette étape de mise en œuvre de la stratégie nationale de lutte contre la corruption ? La réponse paraît malaisée, près de cinq ans après le lancement de cette initiative, chapeautée conjointement par l’instance nationale de probité et la Commission nationale anti-corruption (CNAC). Les deux principaux acteurs du suivi des indicateurs de l’ampleur du phénomène devront en effet accorder à la gouvernance des actions projetées dans le cadre de la 3e vague de projets, une place primordiale dans la mesure où le plan d’action quinquennal, qui a été validé, conditionne, dans une large mesure, les résultats qui seront obtenus à l’horizon 2025. Les axes qui ont été arrêtés portent essentiellement sur «l’amélioration des services aux citoyens, le contrôle, le renforcement des poursuites ainsi que la commande publique. Plusieurs nouvelles lois et décrets sont, de leur côté, entrés en vigueur sans que leurs retombées ne soient en mesure d’éliminer l’opacité et la complexité des procédures administratives, avec une multitude de désagréments avant d’accéder aux services publics. L’État travaille actuellement, dans le cadre de la commission, à ce que les pouvoirs discrétionnaires des agents administratifs soient plus réduits à travers l’unification des procédures, de même qu’un dispositif de facilitation d’accès aux bureaux d’accueil est en cours de généralisation.
Comment juguler le fléau ?
Pour ce point nodal de la stratégie nationale des cinq prochaines années, la réduction du contact physique entre l’administration publique et le citoyen ainsi que l’amélioration des mécanismes du suivi des plaintes seront les deux piliers de la réforme projetée. Le remplacement de l’écrit papier par l’écrit électronique pourra être le fait générateur d’une nouvelle relation entre l’État et l’administré, avec l’élimination attendue du clientélisme. Les actions projetées consistent notamment à assurer une réelle efficience à l’e-gouvernement, via la mise en place d’une gateway gouvernementale en support à la simplification des procédures en vue de créer un one-stop-shop qui rassemble l’ensemble des services en ligne dans un portail unique. En ligne de mire également la généralisation des systèmes de paiement électronique durant les cinq prochaines années, ainsi que la généralisation des portails spécifiques aux administrations. à souligner que les dotations réservées pour ce segment crucial de la stratégie nationale de lutte contre la corruption devront atteindre 205 MDH, pour l’exécution de 43 projets, avec comme principal objectif d’améliorer le délai moyen de traitement des demandes des services. La feuille de route de la commission nationale prévoit dans ce registre de mettre en place un observatoire des marchés publics, ainsi que la traçabilité de toutes les étapes et décisions prises dans le cadre de la commande publique. Les responsables comptent, à travers les mécanismes de contrôle qui ont été mis en place, de rétrécir l’étendue des risques de corruption dans les marchés publics, avec une couverture des différentes phases de l’examen de l’offre des soumissionnaires.
Les attributions de l’instance de probité se renforcent
Les circonstances exceptionnelles vécues par le Maroc depuis le mois de mars 2020 n’ont pas empêché le gouvernement et l’instance de probité d’entamer une nouvelle étude pour mesurer l’impact des actions initiées depuis le lancement de la stratégie nationale de lutte contre la corruption. L’étude qui a été initiée, au cours de cette année 2020, vise à la fois les citoyens et les entreprises dans l’optique de permettre à l’instance de probité, mais aussi à la Commissions nationale anti-corruption de prévoir plusieurs remodelages qui devront s’appliquer durant l’année 2021. La crise sanitaire, qui plane, aggrave en effet les risques de corruption dans plusieurs secteurs, de même que le nouveau statut de l’instance de probité, qui a été adopté durant cette année par le Parlement, oblige cette instance à être plus entreprenante pour une pleine application du dispositif prévu par la stratégie nationale, adoptée il y a plus de cinq ans. Une multitude des mécanismes devront être déployés, en fonction des attentes qui seront exprimées par les opérateurs économiques et les ménages. En tête de liste des missions sur lesquelles l’instance devra insister, il y a la protection des dénonciateurs ainsi que l’utilisation simplifiée des portails en ligne. Pour cette rubrique, la transparence requise devra se baser sur «la publication et le stockage régulier et ordonné des données pertinentes de la part des professionnels, les ONG, ainsi que des procédures simplifiées et accélérées pour les marchés publics et privés», indique la feuille de route.
Younes Bennajah / Les Inspirations Éco