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La filière espagnole salue la réaction marocaine

La réaction marocaine, suite à la publication de l’arrêt européen, a réconforté la filière espagnole. Les professionnels espagnols estiment, à présent, que c’est aux juristes européens et marocains de résoudre cet imbroglio.

Le secteur espagnol de pêche a poussé un grand ouf de soulagement. Non pas après la diffusion de l’arrêt de la Cour de justice de l’union européenne CJUE, mais une fois la réaction des autorités marocaines fut diffusée. De fait, à peine le verdict des juges européens sur la validité du protocole de pêche rendu public, les regards se sont redirigés vers Rabat. Les déclarations des armateurs espagnols, recueillies à chaud après la diffusion du verdict des juges européens, craignaient une riposte violente de la part de Rabat. Certains médias n’ont pas hésité à rouler les tambours de la guerre et voyaient venir, ipso facto, une expulsion des embarcations européennes des pêcheries nationales. Or, la déclaration conjointe du ministre marocain des Affaires étrangères et de la coopération internationale, Nasser Bourita, et de la cheffe de la diplomatie européenne, Federica Mogherini, a pris tout le monde de court. Le communiqué du Maroc et de l’UE affichant leur détermination «à préserver leur coopération dans le secteur halieutique», est tombé comme une douche écossaise : Ceux qui s’attendaient à voir les autorités marocaines en furie, ont vite déchanté, tandis que la riposte diplomatique des autorités marocaines a rassuré la filière espagnole. Contacté par Les Inspirations ÉCO, Pedro Maza, vice-président de la Confédération espagnole de pêche (CEPESCA), a confirmé cette «surprenante réaction», des autorités marocaines. «Le climat était tendu après la rencontre de Dakhla, (réunion de la Commission mixte des professionnels maroco-espagnols de la pêche, ndlr). Toutefois, le communiqué du Maroc nous a agréablement surpris», reconnaît-il. «En toute vérité, nous ne nous y attendons pas. Cela nous a réconfortés», admet-il.

De son côté, l’Espagnol, Javier Garat, président du groupe Europêche, a confié aux Inspirations ÉCO, l’importance de transmettre aux entreprises un message de calme et de sécurité. «C’est une sage décision de la part des autorités marocaines», ajoute notre source. Garat, qui porte aussi la casquette de secrétaire général de CEPESCA, a estimé que rien n’est encore joué, mais la volonté de préserver ce partenariat est palpable. Pour cacher leur malaise face à cette décision, et en réduire l’impact, les professionnels espagnols du secteur tentent de minimiser la présence de la flotte espagnole dans les eaux du Sahara. Selon Pedro Maza, les zones poissonneuses des provinces du sud sont exploitées par les grands chalutiers pélagiques des autres pays communautaires. «Il s’agit principalement de bateaux battant pavillon hollandais ou polonais. Peu d’Espagnols pêchent dans cette région», affirme notre source. Cependant, selon son confrère Garat, il serait dix chalutiers pélagiques, dont 8 espagnols et deux hollandais, présents dans les pêcheries du Sahara en ce moment. De fait, en temps normal, ce sont environ 25 embarcations qui jettent leurs filets dans cette zone. Étant donné que la catégorie I est concernée par le repos biologique, instaurée durant les mois de février et mars, cette présence des bateaux espagnols est réduite. Aujourd’hui, la question qui brûle les lèvres est celle de voir comment la décision de la Cour européenne, d’exclure le Sahara du traité, va-t-elle affecter les prochaines négociations. Cela en sachant que les captures réalisées dans les eaux du Sahara représentent 93% des prises, et 83% de la valeur des recettes. «Nous l’ignorons !», admet, perplexe, le président d’Europêche. «D’ailleurs, personne n’est en mesure de fournir une réponse à cette grande question. Le ministre Akhannouch a parlé d’adapter les instruments juridiques. «À mon sens, ce sont les départements juridiques qui doivent prendre la relève dans ce dossier», souligne Garat. Du côté de la presse, le quotidien El Pais a considéré que cet arrêt est une «victoire morale pour les organisations qui défendent le droit à l’autodétermination». Le journal madrilène estime qu’un accord excluant les eaux du Sahara n’est pas rentable, du point de vue économique. Une chose est certaine : L’arrêt confirme ce nouveau rôle de la justice européenne, laquelle a désormais son mot à dire sur les pactes conclus avec des pays tiers. Cette nouvelle situation pourrait être un casse-tête pour les autorités européennes et leur partenaire marocain.


L’arrêt de la CJUE, contraire à la charte de l’ONU ?

Les juristes du Centre euro-méditerranéen pour la coopération et la diplomatie citoyenne se sont empressés de commenter l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne. Ils estiment «regrettable» que la CJUE n’ait pas pris en considération les «éléments objectifs» liés au principe fondamental de la primauté des intérêts de la population stipulé dans l’article 73 de la Charte des Nations Unies, s’alignant sur certaines des conclusions de l’Avocat général. Par ailleurs, aucun intérêt n’a été manifestement accordé aux conclusions du rapport indépendant commandité par la Commission européenne intitulé «Évaluation rétrospective et prospective du protocole à l’accord de partenariat dans le domaine de la pêche durable entre l’Union européenne et le royaume du Maroc». Ce rapport est pourtant une analyse objective et détaillée quant à l’impact positif de l’accord de partenariat pour l’Union européenne et le Maroc et, en particulier, pour les populations du Sahara. L’ONG trouve «curieux» que l’Avocat général estime que «le fait que 80% des projets qui bénéficient de ces 54 millions d’euros se situent au Sahara occidental ne veut rien dire en soi». «Il accorde manifestement plus d’importance à une ONG qu’il qualifie d’indépendante dans ses conclusions, qui est pourtant un bras armé du Polisario et rejette d’un revers de main l’analyse objective d’une étude indépendante commanditée par la Commission européenne. Un deux poids, deux mesures sur fond de convictions politiques et non juridiques», conclut le commentaire des experts.

 


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